Le secteur privé du Sud de la Méditerranée ne crée pas assez d'emplois

Pour Chahir Zaki, les entreprises privées du Sud de la Méditerranée
ont avant tout un problème de taille (photo : F.Dubessy)

"Par rapport aux projections de la demande, nous ne pouvons que constater l'insuffisance de création d'emplois de la part du secteur privé." Chahir Zaki pointe les difficultés récurrentes des entreprises à embaucher. 

Intervenant lors de la conférence annuelle du réseau Emnes (Euro-Mediterranean network for economic studies), qui se tenait à Bruxelles le 27 juin 2019, le professeur associé de la Faculté de sciences économiques et politiques du Caire (FEPS) constate que la majorité des emplois créés le sont dans les services qui représentent 80,1% des salariés en Jordanie, 49,6% en Tunisie, 47,1% en Egypte et 38,3% au Maroc. Ce secteur offre moins de valeur ajoutée, de marge, et donc offre peu de possibilités aux entreprises concernées d'étoffer leur personnel. 

Le marché privé de ces pays se polarise autour d'une majorité de très petites entreprises et de quelques grands groupes qui dominent le marché. Les premières n'ont aucune ambition, ou aucun moyen, de se développer. Changer de dimension implique des coûts auxquels elles ne peuvent répondre à cause de leur faible productivité, de leurs ressources financières très limitées et de leur impossibilité à se déployer à l'export. 

"Les entreprises du Sud de la Méditerranée ont un problème de croissance. Elles naissent petites et se trouvent dans l'incapacité de grossir. Elles n'arrivent donc pas à intégrer la chaîne de valeur mondiale", constate Chahir Zaki citant aussi "les mesures non tarifaires entravant l'accès au marché des produits en provenance de cette région et le manque de sources durables de financement."

Intégrer la chaîne de valeur mondiale

L'économiste, membre d'Emnes, condamne aussi "les institutions déficientes" qui mènent les entreprises à se spécialiser dans les secteurs traditionnels au détriment de la haute-technologie. "Les réformes pour faciliter le commerce, l'export doivent être menées localement", indique-t-il citant notamment la nécessité d'une harmonisation des règles et des normes, d'une augmentation du nombre de laboratoires et d'organismes de certification, ainsi que l'indispensable besoin de recourir à l'assistance technique des gouvernements, comme des donateurs internationaux, pour atteindre ces objectifs. 

Chahir Zaki insiste sur l'importance vitale d'attirer les investissements directs étrangers dans les industries, spécialement celles fabriquant des produits à forte valeur ajoutée. "Ceci conduirait à stimuler la création d'emplois et par conséquent favoriserait l'inclusivité", souligne l'économiste. Selon lui, "renforcer les compétences des travailleurs aiderait les économies du Sud à intégrer la chaîne de valeur mondiale. Ce qui augmenterait la demande de salariés compétents au lieu d'affronter une féroce compétition sur les marchés internationaux." Le Plan d'investissement extérieur (PIE) de l'Union européenne constitue en ce sens une initiative susceptible d'attirer plus d'argent dans les entreprises privées.


Par Frédéric Dubessy - Source de l'article Econostruminfo

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