Directeur des Études de Paris EUROPLACE, Karim ZINE-EDDINE a animé la talbe ronde sur la finance des marchés émergents, lors du Forum financier international de Paris Europlace (#IFFParis, 11-12 juillet 2018). © DR
Directeur des Études de Paris EUROPLACE, Karim Zine-Eddine, à l’occasion du récent Forum financier international(#IFFParis), est revenu sur la mission que s’est fixée l’Africa FinLab.
Créé à l’initiative de Paris EUROPLACE et officiellement lancé en mars dernier à Abidjan, au siège de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), ce laboratoire d’idées s’implique dans le soutien et la promotion de la finance en Afrique et veut pour cela mobiliser les expertises et les investisseurs internationaux. Un engagement utile, au regard des besoins de financement considérables dont l’Afrique a besoin pour relever les nombreux défis des prochaines années…
Une tribune libre de Karim ZINE-EDDINE
Directeur des Études, Paris EUROPLACE
L’Afrique est en transformation profonde depuis plusieurs décennies, les ralentissements de ces deux dernières années, qui ont surtout concerné quelques grands pays exportateurs de pétrole et de matières premières, n’entament en rien cette dynamique, qui transforme progressivement les économies africaines.
Selon les données de l’OCDE, l’Afrique devrait continuer à croître à un ryhtme de 4 % par an, à horizon 2022. Cette moyenne cache des disparités régionales importantes, puisque l’Afrique de l’Est, comme les Pays de l’UEMOA, devrait continuer à croître de 6 % par an, le Nord de l’Afrique de près de 5 %, alors que le Sud de l’Afrique, fortement dépendant de l’exportation de matières premières, à un rythme inférieur à 3 % par an.
Cependant, pour consolider ces évolutions, l’Afrique a besoin de mobiliser des financements massifs. Ceux-ci sont estimés entre 600 Md$ et 1 200 Md$ par la CNUCED et ils concernent tous les domaines : financement des infrastructures (90 Md$), financement des entreprises (100 Md$), financement de l’accès universel aux services énergétiques (50 Md$), etc.
Partant de ce constat, des acteurs de la finance africaine et française de premier plan, réunis au sein de Paris EUROPLACE, ont lancé l’AfricaFinLab, laboratoire de la finance africaine, avec pour objectif d’accompagner la finance africaine dans ses transformations et pour s’intégrer dans la nouvelle ère de la finance mondiale, qui est une finance plus directe, innovante et digitale. L’AfricaFinLab a pour principal objectif d’intervenir sur les leviers qui transforment la finance africaine.
Quelles sont aujourd’hui les dynamiques de transformation de l’Afrique ?
Les économies africaines se transforment très clairement, de nombreux rapports et analyses montrent quelques tendances de fond. Parmi les principales, notons :
Tout d’abord, l’endogénéité de la croissance d’un nombre croissant de pays africains. Celle-ci est de plus en plus portée par l’investissement en infrastructures, la consommation locale, soutenue par une classe moyenne qui se développe et s’élargit. Celle-ci a plus que doublé en vingt ans, s’urbanise, consomme, créé des entreprises et s’inscrit clairement dans la dynamique mondiale de l’économie digitale.
Portées par cette nouvelle dynamique, les économies africaines se diversifient. La croissance africaine n’est plus uniquement fondée sur les secteurs énergétiques et miniers, mais concerne de plus en plus les secteurs de la technologie, les médias, les télécommunications, ainsi que les services financiers, la distribution et les produits de consommation, etc.
Une deuxième tendance de fond est l’attrait croissant de l’Afrique pour les investisseurs internationaux, la presse s’en fait régulièrement l’écho. Ceux-ci viennent de tous les continents, de Chine, du Japon, des États-Unis, d’Europe, etc. Près de 60 Md$ d’investissement en moyenne par an, au cours de ces dernières années, soit cinq fois plus qu’en 2000.
Enfin, un dernier point important concerne le secteur bancaire. On assiste depuis quelques années à la montée en puissance de grands groupes bancaires africains, qui développent des stratégies à l’échelle du continent et contribuent activement à renforcer l’intégration bancaire et financière africaine. Ces groupes bancaires sont de plus en plus dans les standards internationaux, notamment en matière de solidité, de solvabilité et de liquidité.
Dans ce contexte et au regard des défis à relever dans les années à venir, notamment en matière de financement, l’Afrique devra faire une révolution financière pour accélérer le développement de ses systèmes bancaires et financiers. Ceci est d’autant plus urgent que les marchés des capitaux africains ne contribuent encore que très marginalement au financement des économies africaines, dans un contexte mondial de mutation des systèmes financiers sous l’impulsion, notamment, de la digitalisation de la finance.
Photo-souvenir : Karim Zine-Eddine et les panélistes de la table ronde dédiée à la finance des marchés émergents. © DR
Accompagner, soutenir, former : les trois objectifs de l’Africa FinLab
L’Afrique a très largement pris conscience du rôle de la finance, comme outil indispensable à la croissance. De nombreux pays africains se mobilisent pour structurer leur système financier et accompagner la transformation de leurs économies.
Dans ce contexte, l’Africa FinLab s’est fixé pour mission d’intervenir pour mobiliser les expertises et les investisseurs internationaux en faveur de l’Afrique. Les promoteurs de L’Africa Finlab ont souhaité confier au Directeur général de la BRVM (Bourse régionale des valeurs mobilières, à Abidjan), Edoh Kossi Amenounvé, la présidence de cette initiative, car justement ce sont les marchés financiers, qui sont les plus à même de mobiliser massivement des financements.
Le défi de l’inclusion financière, tout comme les solutions portées par la finance digitale, tels que le ebanking et le crowdfunding, ou encore des technologies comme la blockchain, devraient fortement accélérer la financiarisation des économies africaines.
C’est pourquoi, L’Africa FinLab s’est fixé trois objectifs.
Le premier : accompagner le développement des marchés des capitaux africains. Un premier projet concret a été lancé, la mise en place d’un laboratoire de la finance africaine pour mieux faire connaître les marchés financiers africains et les opportunités qu’ils offrent aux investisseurs, notamment internationaux. Une deuxième initiative à l’étude concerne la mise en place d’un fonds d’investissement dans les valeurs cotées dans les bourses africaines.
Une vue de la salle de la conférence dédiée à la finance des marchés marchés émergents. © AM/APP
Le deuxième : soutenir l’innovation et la digitalisation de la finance, en particulier le développement des FinTech. L’ambition est de soutenir la création d’écosystèmes favorables au développement des FinTech en Afrique.
Un premier travail sur la conduite d’une stratégie FinTech en Afrique a été conduite en partenariat avec Deloitte Afrique. Un second travail a été mené sur le cadre juridique pour le crowdfunding. Un axe important de développement est le lancement de l’Africa Blockchain Summit (ABS). La 1re édition de l’ABS, organisée en partenariat avec la Banque Centrale de Tunisie et le Groupe Talan, s’est tenu le 14 mai dernier à Tunis, autour de plusieurs événements : un hackathon, une conférence de banques centrales, un atelier pratique, la réalisation d’une POC, etc.
Enfin le troisième objectif : créer un cadre pour le développement des compétences, en priorité en matière d’innovation et de finance digitale. Des programmes de formations sont en cours de réalisation.
L’Afrique traverse une période historique, qui déterminera son rôle dans l’économie mondiale en cours de transformation, dans lequel le rôle de la finance digitale sera déterminant dans les économies africaines des années à venir. Le développement des solutions bancaires mobiles en Afrique est une preuve de la capacité de l’Afrique à avancer rapidement dans ce domaine.
Cependant, les défis sont encore nombreux : accélérer l’inclusion financière ; développer de nouvelles solutions de financement adaptées aux besoins des entreprises africaines, telles que le crowdfunding ; mobiliser l’épargne domestique en facilitant l’accès aux produits d’épargne, etc.
La FinTech africaine devra être créative, innovante et surtout déployer des solutions interopérables pour accélérer l’intégration financière en Afrique, l’approche des FinTechs sera à ce titre déterminante.
Source de l'article Africapresse Paris
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