Les participants venus de plusieurs pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord à un rassemblement organisé par l’UE ont adopté des recommandations pour orienter l’aide au développement de l’entrepreneuriat.
Une dizained’entrepreneurs libanais ont été invités les 21 et 22 mai à rejoindre environ 150 confrères et consœurs du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord à Bruxelles pour participer à EU MED Means Business, une conférence sur le développement de l’entrepreneuriat dans les pays du voisinage-sud de l’Union européenne.
L’événement a été organisé par la Commission européenne, dont le mandat se termine le 31 octobre, alors que les électeurs de 28 pays européens viennent de renouveler leur Parlement (voir page 6), dont la composition influera sur la composition de la nouvelle instance exécutive de l’UE. Dans ce contexte, la conférence s’était fixé deux objectifs : dresser un bilan du volet de la Politique européenne de voisinage (PEV) consacré au développement de l’entrepreneuriat dans les pays du sud de l’UE – Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Palestine, Syrie et Tunisie – et inviter les entrepreneurs des pays concernés à définir leurs priorités afin d’orienter les prochains projets lancés dans le cadre de la PEV.
Capitales privilégiées
« L’intérêt de ce type d’événements se limite généralement au réseautage. La nouveauté cette fois, c’est que nous avons vraiment pu comparer les obstacles qui pénalisent le développement des entreprises au Liban avec ceux qui existent dans les autres pays arabes », a expliqué à L’Orient-Le Jour Bassel Jalaleddine. Le jeune homme a fondé en 2017, avec Ibrahim Ezzeddine, Cherpa, une plate-forme d’apprentissage en ligne dédiée aux « métiers du futur » : robotique, électronique, etc.
« Ce qui est frappant, c’est qu’à quelques différences près, nous faisons face aux mêmes problèmes d’un pays à un autre », a constaté de son côté Mohammad Sabouneh, qui a lancé en 2015 avec Ghassan Abi Fadel et Tarek Jaroudi, Moodfit, une plate-forme en ligne de design intérieur. Selon les personnes interrogées, les deux principales difficultés auxquelles font face les entrepreneurs des pays inclus dans le voisinage-sud de l’UE sont d’une part les carences du système éducatif qui ne forme pas suffisamment les étudiants à appréhender le monde de l’entreprise ; d’autre part les rigidités en matière de réglementation – notamment fiscale – qui constituent un frein à l’investissement. Un avis partagé par Najwa Sahmarani, qui a fondé en 2013 avec Fadi Mikati l’ONG Tripoli Entrepreneurs Club, basée au Liban-Nord et dédiée au développement des startups. « Une autre difficulté commune est liée au fait que la majeure partie des aides et autres programmes de soutien sont généralement concentrés dans les capitales. Cela se vérifie particulièrement au Liban, où tout se passe à Beyrouth au détriment des autres régions du pays », a-t-elle exposé.
C’est donc en partie sur ces diagnostics que se sont focalisés une partie des ateliers programmés pendant la conférence à Bruxelles, avec des interactions en visioconférence avec des participants restés à Tunis, au Caire et à Rabat. Les travaux se sont conclus mercredi sur une session assez inédite au cours de laquelle les participants ont adopté, via une application mobile mise en service pour l’occasion, douze recommandations prioritaires choisies parmi une grosse trentaine de propositions. Le dépouillement du vote – retardé en raison d’un problème technique – s’est déroulé sous les regards du commissaire de l’UE pour la Politique régionale et l’Intégration européenne, l’Autrichien Johannes Hahn ; du directeur pour le voisinage méridional à la Commission européenne, l’Allemand Michaël Köhler ; et de plusieurs diplomates dont l’ambassadeur du Liban en Belgique, Fadi Hajali.
Bien placés
« C’était une expérience enthousiasmante, parce que nous étions finalement bien placés pour définir nos priorités et les soumettre aux instances de l’UE », s’est réjouie Tracy Achkar, chef de projet au sein du fond d’investissement Viridis, spécialisé dans les startups de l’environnement et membre de la fondation Diane, lancée en 2015 et qui fait la promotion du développement durable.
Les pistes retenues proposent notamment de favoriser la mise en place de partenariats public-privé pour favoriser le développement d’entreprises performantes en Méditerranée ; d’adapter les méthodes d’enseignement pour permettre aux étudiants d’être formés aux problématiques concrètes de l’entreprise ; de renforcer la coopération entre les écosystèmes entrepreneuriaux des différents pays voisins de l’UE ; de créer des indicateurs de performance adaptés aux incubateurs ; ou encore d’aménager la fiscalité pour mettre les investisseurs en confiance. Des doléances enregistrées par M. Hahn, qui s’est engagé dans son discours de clôture à les porter lors des discussions de la commission « avec les gouvernements et lors des prochaines réunions de l’Union pour la Méditerranée ».
La PEV a été lancée au début des années 2000 alors que l’UE s’apprêtait à intégrer dix nouveaux pays, a rappelé Michael Köhler lors d’un point presse organisé en marge de la conférence. Elle avait été pensée à l’origine pour apporter une réponse au fait que l’intégration de ces nouveaux États membres allait provoquer des changements dans les relations entre ces derniers et les pays tiers avec lesquels ils partagent des frontières. Le principal instrument de la PEV est l’Instrument européen de voisinage (IEV). Sur les 10,8 milliards d’euros alloués à la région par son biais pour la période allant de 2014 à 2020, près de 4,2 milliards ont été consacrés jusqu’ici à la coopération socio-économique, répartis entre le voisinage Est et Sud, selon l’UE.
Les autres Libanais invités à la conférence étaient : Zina Dajani (Antwork), Tamara Ghandour et Omar Itani (Fabricaid), Rami Lakkis et Salah Zeaïter (Lebanese Organisation of Studies and Training – LOST), David Munir Nabti (Pitchworthy), ainsi que Tara Nehmé (Ticklemybrain).
Par Philippe HAGE BOUTROS - Source de l'article l'Orient le Jour
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