Outre leur passé commun chargé d’histoire, les pays de la Méditerranée sont liés par un destin commun. Pour Fathallah Sijilmassi, ancien secrétaire général de l’UpM, «l’avenir de l’Europe est au Sud».
C’est le titre même de son dernier ouvrage qui traite de tous les aspects de coopération entre les deux rives de la Méditerranée. Ce livre de 405 pages tente de répondre à une question majeure pour le futur des relations entre ces pays : «La Méditerranée est-elle trop grande ou trop petite pour une coopération régionale efficace ?» et prône un agenda positif en Méditerranée. «Oser un agenda positif en Méditerranée est donc une condition sine qua non pour le renouveau du partenariat euro-méditerranéen. Des thèmes tels que l’éducation, l’emploi ou la place de la femme dans la société sont des déterminants de réussite ou d’échec social», explique-t-il. Pour la réalisation de cet agenda, il associe la jeunesse, la bataille de l’emploi, l’économie de la connaissance et l’implication de la société civile. Décryptage.
Débats institutionnels et questions financières : les faits à savoir
Pour donner un nouveau souffle au partenariat entre les deux rives de la Méditerranée, il est nécessaire de faire un diagnostic précis et lucide concernant l’état des lieux ainsi qu’une évaluation des atouts et faiblesses tout en traçant une vision et une stratégie pour les perspectives d’avenir. «La problématique principale des relations euro-méditerranéennes n’est pas institutionnelle. Ou du moins qu’elle n’est pas qu’institutionnelle. Depuis plusieurs décennies, il existe en réalité un nombre important d’institutions agissant en Méditerranée», relève Fathallah Sijilmassi s’interrogeant s’il y en a même un peu trop. Il explique par ailleurs que les sceptiques de l’UpM (Union pour la Méditerranée) font souvent un arrêt sur image par rapport à la situation de 2008 oubliant au passage que la région en 2019 ne ressemble en rien à ce qu’elle était en 2008 et que l’UpM n’est pas une organisation supranationale qui s’impose aux Etats mais une organisation intergouvernementale qui n’est que le reflet de la volonté et des priorités des Etats qui la composent. Sur le plan de la coopération, il estime que le renforcement du partenariat euro-méditerranéen et euro-méditerranéen-africain constitue une véritable opportunité, à la fois pour la gestion des affaires propres à ces régions mais également comme contribution positive à une meilleure gouvernance mondiale. Au niveau financier, l’expert indique que la problématique principale n’est pas non plus une question de disponibilités financières. Selon lui, il faudrait entre autres un plus grand engagement politique de l’UE, une plus grande appropriation du processus par les pays du Sud, promouvoir un agenda positif en Méditerranée pour donner une nouvelle impulsion qualitative du partenariat euro-méditerranéen. Les relations euro-méditerranéennes sont appelées à actualiser leur mode opératoire pour gagner en efficacité et en perspective stratégique.
Un agenda positif en Méditerranée
«La vitalité de la jeunesse, le courage des femmes, le dynamisme des universités, le potentiel des PME, l’engagement des diasporas et l’existence de multiples réseaux de la société civile et des villes donnent autant de preuves d’une réalité euro-méditerranéenne qui ne cherche qu’à s’exprimer davantage pour donner la pleine ampleur de son potentiel», relève l’auteur de ce livre. Néanmoins, les différents indicateurs dans la région concernant les jeunes, les femmes, les étudiants, les universitaires, les chercheurs, les entrepreneurs et plus généralement tous les représentants de la société civile montrent clairement un déficit de participation ainsi qu’un décalage entre les actions publiques et les réalités sur le terrain. Parallèlement, ces catégories de la population disposent des atouts importants pour la région.
A cet égard, il met en évidence les atouts existants, les expériences de success stories et la nécessité de parvenir à trois objectifs majeurs, à savoir : mobiliser les politiques et les financiers en faveur d’une approche régionale coordonnée, s’appuyer sur les réseaux et les success stories existants et changer d’échelle afin d’amplifier le mouvement et rendre plus tangibles les résultats sur le terrain.
Potentiel de développement entre les deux rives : le cas du Maroc
Pour illustrer le potentiel de la région, le livre met en exemple la zone économique «Nord» du Maroc et le port de Tanger-Med comme le trait d’union entre l’Europe et l’Afrique. «Cette zone puise dans sa position géographique stratégique (trait d’union entre l’Europe et l’Afrique, et porte d’entrée de la Méditerranée) pour développer une infrastructure intégrée (industrie, transport, logistique…) afin de renforcer la compétitivité des entreprises qui y sont installées.
C’est donc un atout au service du développement des entreprises», explique l’auteur du livre dans ce sens, Tanger Automotive City est principalement marqué par le méga-investissement industriel de Renault qui y fabrique 400.000 véhicules par an destinés majoritairement à l’exportation vers l’Europe mais également l’Afrique et les pays méditerranéens. Du côté du port de Tanger Med, celui-ci consolide, avec sa dernière extension en 2019, sa position de plus grand port d’Afrique et de Méditerranée. Il est connecté à 186 ports dans 77 pays et relié à 9 autres ports méditerranéens ouvrant la voie potentiellement à un renforcement de l’intégration régionale.
Dans ce cadre, le dispositif logistique est renforcé par le lancement de la première ligne à grande vitesse en Afrique qui relie Tanger à Casablanca en deux heures seulement (contre 4h30 précédemment) en passant par Kénitra (autre centre industriel important où notamment Peugeot s’est installé). En 2018, près de 550 entreprises exerçant leur activité dans plusieurs secteurs d’activités étaient installées dans les deux zones franches d’exportation dans la région de Tanger. «La majorité de ces entreprises est marocaine et européenne avec une croissance notable d’entreprises multinationales et une claire tendance à la diversification. Il est toutefois intéressant de noter que des entreprises d’autres pays du Sud de la Méditerranée y sont installées également», relève-t-il ajoutant que malgré leur nombre limité il existe un potentiel de développement.
Par Ouchagour Leila - Source de l'article Aujourd'hui Maroc
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