L’«Appel de Tunis» - Un lobby d’économistes au secours d’une UPM déjà en difficulté

Une quinzaine d’économistes européens et sud-méditerranéens ont lancé, samedi 17 janvier 2009, à Tunis, un appel pour réactiver l’intérêt pour l’Union Pour la Méditerranée (UPM) et remobiliser les partisans de ce groupement de 43 pays.
L’«Appel de Tunis» insiste sur l’enjeu d’accélérer la mise en place des institutions de l’Union et d’entamer l’exécution de projets concrets dans les domaines de l’agriculture, de l’énergie et des finances.
L’Appel de Tunis estime que les pays membres de l'UMP n'ont pas encore réellement pris la mesure de la crise économique et que si rien n'est fait, maintenant, la région risque d'être marginalisée.
Pour les signataires de l’Appel, l’euroméditerranée se trouve à la croisée des chemins et n’a hélas que deux choix :
Soit elle ne réagit pas et les égoïsmes l’emporteront : Chaque pays jouera sa propre carte. Le bilatéralisme régnera en maître. Et, dans une période où les tentations protectionnistes vont réapparaître, il n’est pas exclu que celles-ci débouchent sur une réduction des échanges et sur une montée des tensions économiques et politiques.
Soit, et c’est la deuxième solution, les pays des deux rives de la Méditerranée saisiront l’opportunité historique de l’UPM pour renforcer leurs liens et pour, enfin, peser sur la scène économique internationale.
Concrètement, les signataires de l’appel ont suggéré la création d’une banque régionale dédiée au partenariat euro-méditerranéen.
Il s’agit d’un ancien projet auquel se sont farouchement opposées la Banque mondiale et la Banque européenne d’investissement (BEI) qui n’y voient pas l’utilité car il fait double emploi avec les mécanismes de financement mis en place (MEDA, FEMIP,…).
Un des signataires de l’appel, M. Christian Boissieu, universitaire et président du Conseil d’Analyse économique auprès du Premier ministre français, a défendu cette institution dont les ressources pourraient être alimentées par une partie de l’épargne européenne et par une réaffectation des règlements financiers mis en place par l’Union européenne pour financer le partenariat euro-méditerranéen.
M. Boissieu a saisi cette opportunité pour plaider en faveur de l’accès des pays sud-méditerranéens aux fonds structurels dont ont bénéficié des pays comme l’Irlande et le Portugal.
Le Premier ministre tunisien, M. Mohamed Ghannouchi, qui a reçu, la même journée, les signataires de l’Appel, a toujours déploré l’insuffisance des ressources mises à la disposition des associés de l’Union européenne. Tout récemment, il a déclaré à Madrid que «l’UPM ne fonctionnera qu’à condition que des fonds suffisants soient fournis pour accroître l’égalité entre les deux rives».
Dans l’ensemble, les Tunisiens sont très pressés pour voir des résultats. Ils ne ratent aucune occasion pour mettre la pression sur les fondateurs de l’UPM afin qu’ils passent dans les meilleurs délais au concret.
M. Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de la Coopération internationale, a indiqué que la Tunisie est, désormais, tenue par l'obligation des résultats et s'attend à ce que des projets clairs soient définis et financés à des conditions favorables. Il a ajouté que l'UPM se doit également de favoriser la libre circulation des personnes dans les deux sens et de renforcer le sentiment d'appartenance à un même espace.
Quant à M. Afif Chelbi, ministre de l'Industrie, de l'Energie et des PME, le temps joue contre l'UPM, d'où tout l'intérêt de lancer un signal fort en entamant la mise en œuvre, dans les meilleurs délais, de projets concrets. Au nombre de ces projets, il a cité le financement des études de faisabilité des interconnexions électriques, du projet de production d'électricité, au sud de la Tunisie, à partir de l'énergie solaire et d'un autre de dépollution chimique (2 milliards d'euros).
L’Appel de Tunis intervient à un moment où beaucoup de voix commencent à s’élever pour déplorer son inefficience.
M. Adrianus Koetsenruijter, ambassadeur-chef de la délégation de la Commission européenne en Tunisie, a qualifié, récemment, l’UPM de «structure bureaucratique et sans ressources».
Au sud, l’Algérie, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci, a critiqué le caractère “politique” et pléthorique du secrétariat de l'Union pour la Méditerranée suite aux décisions prises par les chefs de la diplomatie des pays membres en novembre à Marseille.
A travers cet appel, les signataires, qui se proposent de jouer de lobby, appellent les pays européens à saisir l'opportunité du programme d'UPM pour accélérer l'intégration économique euro-méditerranéenne et les pays du sud à relancer leur intégration régionale : «Aucune zone économique du sud n'est parvenue à émerger sans un minimum d'intégration économique régionale. La zone asiatique fournit dans ce domaine un modèle», note l'Appel.

Par Abou SARRA - Webmanagercenter.com - le 21 janvier 2009
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Les signataires :
Moulay Hafidh Amazirh, PDG Intercontrol Engineering (Maroc),
Christian de Boissieu, professeur à Paris II
Farid Ben Bouzid, PDG Salama Assurance (Algérie)
Jean Louis Guigou, délégué général de l’IPEMED
Abderrahamaane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque centrale d’Algérie
Elyès Jouini, professeur à Paris IX
Hans Helmut KOTZ, professeur à Fribourg (Allemagne)
Jean-Hervé Morenzi, professeur à Paris IX
Radhi Meddeb, PDG de Comète Engineering (TUNIS)
El Mouhoub Mouhoud, professeur à Paris IX
Chekib Nouira, président de l’IACE (Tunisie)
Olivier Pastré, professeur à Paris VIII
Jean-Louis Reiffers, professeur à l’Université de la Méditerranée
Mohamed Sagou, ancien ministre marocain des Finances
Slim Zarrouk, vice-président de l’IACE (Tunisie).

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