Dans une démocratie naissante, le pluralisme est considéré et appliqué comme une forme d'ordre social, et dans le domaine politique, il implique qu'un grand nombre de groupements et d'associations librement formés se retrouvent réciproquement en situation de concurrence pour gagner de l'influence sur la vie sociopolitique.
Ces groupements peuvent être de nature politique, économique, juridique, ethnique ou autre. L'ensemble de ces groupements constitue ce qu'on appelle la société civile.
Dans ce nouveau dynamisme démocratique, le pluralisme se caractérise par le respect, l'acceptation et la reconnaissance de tous les points de vue, aussi différents ou divergents soient-ils; et leur diffusion, ainsi que leur application ne devraient rencontrer aucun obstacle.
Ainsi le pluralisme se base-t-il sur des discussions contradictoires, dont les résultats reposent souvent sur des compromis qui finissent par satisfaire tous les groupes concernés, ou tout au moins, sont acceptables dans leur ensemble. Dans le pluralisme, les dialogues, les échanges de points de vue et les discussions, ainsi que les idées et les points de vue qui y sont débattus, ont un caractère constructif dans le cadre des processus sociaux d'expression des idées et de la volonté politique des citoyens, aussi contraires, opposés au régime en place ou proches de l'opposition soient-ils.
Depuis le "printemps arabe", on a souvent remarqué que, même dans une société moderne, comme le cas de la Tunisie, certains groupements d'intérêts sont plus influents et plus forts que d'autres et qu'en réalité le principe de concurrence ne s'applique pas de manière aussi simple, fluide et facile.
Mais c'est justement pour cette raison que l'État postrévolutionnaire a le rôle important de déceler les lacunes éventuelles du système de concurrence et de trouver les palliatifs nécessaires.
Il y a, par exemple, la possibilité de procurer de l'aide supplémentaire aux associations d'intérêts plus faibles, pour les rendre plus compétitives. Ces mesures étatiques de régulation sont nécessaires pour maintenir le pluralisme en action. Dans les sociétés respectant le pluralisme, il existe, parallèlement à la société civile qui exerce une influence sociopolitique ou économique, des groupements qui aspirent directement à des fonctions électives: ce sont les partis politiques.
Comme beaucoup d'autres pays arabe, on a déjà laissé aller à pester contre des partis politiques parce qu'ils ont, par exemple, promis de prendre certaines mesures sans rien réaliser par la suite. Malgré les critiques que l'on peut adresser aux partis politiques en ce qui concerne les résultats de leur travail, il faut reconnaître qu'ils constituent malgré tout un élément nécessaire et indispensable à toute démocratie. Le peuple peut exercer sa souveraineté par le biais de ces partis politiques; c'est vraiment grâce à eux qu'il peut agir de manière effective.
L'alternative serait d'élire un représentant, en tant que peuple, et d'assumer soi-même toutes les tâches qui incombent aux dirigeants politiques. Mais cela n'est tout simplement pas possible, compte tenu de leur grand nombre et de la complexité des thèmes.
Au lieu de cela, il est nécessaire d'avoir des groupements et des partis politiques pour présenter des candidats aux diverses fonctions gouvernementales, pour discuter des solutions aux problèmes qui se posent et pour représenter les intérêts des électeurs. Ils constituent ainsi, d'une part, le porte-parole pour les idéaux et les objectifs politiques de la population et, d'autre part, ils participent de manière décisive à la construction de la volonté politique de la population parce qu'ils savent appréhender les positions de cette population pour les articuler et leur donner forme au sein des discussions.
Il ne suffit donc pas de considérer les partis comme de simples messagers qui passent des informations sur le peuple aux dirigeants. Ils doivent également être considérés comme des groupements actifs qui contribuent à la construction de la volonté politique puisqu'ils prennent aussi, par exemple, le rôle de médiateurs, lorsqu'il y a conflit entre le point de vue du peuple et celui du parlement, ou entre celui du gouvernement et celui du président.
En général, ce sont des personnes qui partagent les mêmes idéaux qui se regroupent pour créer un parti et pour intégrer leur proposition de programme en politique. Dans une société plurielle, la création de partis politiques est libre, ce qui signifie que chacun a le droit de créer un parti tout en respectant les principes républicains et démocratiques. En règle générale, les partis politiques possèdent aussi bien un programme de base qui reflète ses valeurs et ses objectifs à long terme, qu'un programme électoral qui est plutôt orienté sur le court terme.
Comme les partis politiques au sein des sociétés plurielles doivent faire face à des tâches importantes, il est essentiel qu'ils soient organisés de manière transparente et démocratique. Cela implique, d'une part, que chaque citoyen peut intégrer librement et ouvertement un parti politique; et d'autre part, il doit être stipulé que chaque membre a le droit et la possibilité de participer à la définition de la ligne du parti, à l'élection de son dirigeant et à la désignation des candidats aux fonctions politiques et étatiques.
Outre leurs fonctions d'articulation des intérêts de la population, ainsi que la construction de sa volonté politique, ce sont par ailleurs les partis qui mettent en place le personnel nécessaire aux fonctions gouvernementales. Puisqu'ils relient le peuple à ses représentants, ou les représentants du peuple à ses dirigeants, les partis sont autant indispensables au paysage politique du monde arabe postrévolutionnaire que les groupements et associations d'intérêts décrits précédemment.
Par Mohamed Elarbi Nsiri - Source de l'article Huffpostmaghreb
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