Pour Jacques Barrot, le commissaire européen chargé des Transports et vice-président de la Commission européenne explique pourquoi le secteur des transports peut servir de modèle pour la consolidation du partenariat euroméditerranéen.
Dès le début du processus de Barcelone, le secteur des transports a été identifié comme l'une des priorités du partenariat euroméditerranéen.
À l'heure où l'Union européenne a pris la décision de donner une nouvelle impulsion au partenariat euroméditerranéen, j'ai la conviction que le secteur des transports, sur la base du travail déjà engagé, peut être un creuset très fertile pour la consolidation et l'émergence de projets très concrets.
Quatre dossiers majeurs viennent à l'esprit.
À l'heure où l'Union européenne a pris la décision de donner une nouvelle impulsion au partenariat euroméditerranéen, j'ai la conviction que le secteur des transports, sur la base du travail déjà engagé, peut être un creuset très fertile pour la consolidation et l'émergence de projets très concrets.
Quatre dossiers majeurs viennent à l'esprit.
Il faut renforcer la sécurité maritime en Méditerranée. Près de 20 % des pétroliers et 30 % des navires marchands du monde circulent en Méditerranée ! Accroître la sécurité maritime, dont le niveau varie fortement selon les États, est primordial compte tenu de l'importance du trafic et de la fragilité particulière de cette mer presque fermée.
Il convient pour cela d'appliquer pleinement les exigences de sécurité et de sûreté maritime figurant dans les réglementations de l'Organisation maritime internationale et de l'Organisation internationale du travail. Un programme de formation et d'assistance technique pourrait être mis en place sous l'égide de l'Agence européenne de sécurité maritime (EMSA).
L'Union européenne doit également se doter de navires capables d'intervenir efficacement lors de marées noires, en retirant le pétrole de la mer avant qu'il n'atteigne le rivage. L'EMSA, dans le cadre de son plan d'action contre la pollution par les hydrocarbures, a été chargée de créer un réseau de « bateaux-pompes ». Mais l'Union, en cas de catastrophe maritime en Méditerranée, se heurterait au paradoxe de ne pas pouvoir aller pomper le pétrole qui serait répandu dans les eaux des pays tiers, alors même que les nappes dériveraient vers les côtes européennes. Pourquoi ne pas élargir le champ d'intervention de l'EMSA à l'ensemble des pays du pourtour de la Méditerranée ? Cette mesure traduirait concrètement la solidarité de l'Union européenne et une proposition en ce sens pourrait être présentée d'ici à 2009.
Le développement des autoroutes de la mer dans le bassin méditerranéen revêt une importance cruciale.
Les passages de massifs montagneux, très présents dans le Sud méditerranéen (Alpes, Pyrénées, Balkans), sont particulièrement sensibles. Les autoroutes de la mer permettraient de soulager les grands axes autoroutiers et de lutter contre les pollutions induites par les flux de camions, en embarquant à bord de navires des camions complets ou leurs remorques.
Ces projets ont besoin d'un support politique fort afin de mobiliser tous les acteurs de la chaîne de transport et de surmonter la complexité des questions de transbordement, pour assurer la qualité et la fréquence du service sur laquelle se fonde l'intérêt du concept.
Pour permettre le lancement effectif des liaisons d'ici à la fin 2009, il convient d'identifier et de sélectionner au plus vite les liaisons les plus pertinentes entre les différents ports du pourtour méditerranéen, mais aussi de l'Atlantique et de la mer Noire. Dans l'intervalle, pour faciliter l'élaboration des plans de financement, je souhaite proposer le relèvement des plafonds d'aides nationales, en les alignant sur ceux du programme européen d'interopérabilité Marco Polo.
Troisième champ d'action : la réalisation d'un espace aérien commun euroméditerranéen. Le trafic aérien entre les pays du pourtour méditerranéen et l'Union européenne s'élevait à 35 millions de passagers en 2006, avec un taux moyen de croissance de 2,8 %.
Il y a matière à développer ces échanges, comme en atteste l'accord aérien exemplaire établi entre l'Union Européenne et le Maroc, qui a d'ores et déjà permis à ce pays d'accroître ses vols réguliers vers l'Europe de plus de 30 % en 2007, et propose aux familles des deux rives de la Méditerranée des offres plus nombreuses à un meilleur prix.
L'Union européenne doit se fixer pour objectif la réalisation d'un espace aérien commun en Méditerranée, en présentant en 2009 un projet de mandat. Cet espace devrait reposer sur la conclusion d'accords aériens euroméditerranéens, qui permettront la convergence réglementaire, l'ouverture commerciale du marché mais aussi le plus haut degré de sécurité, de sûreté et de respect de l'environnement.
Étendons aux villes de la rive sud de la Méditerranée la mobilité urbaine durable. L'Afrique du Nord et le Moyen-Orient enregistrent un taux d'urbanisation qui dépassera 70 % dès 2015. C'est l'un des plus forts du monde.
La question urbaine se retrouve donc au cœur des grands enjeux de la région, qu'il s'agisse d'accès au logement, d'éducation, d'environnement, d'équipement en réseaux d'assainissement, d'accès à l'eau, et bien sûr de lutte contre la congestion et la pollution liées au transport individuel.
Des plans de transports métropolitains durables, visant le transport de passagers comme le fret, constitueraient une base solide pour une planification efficace de la mobilité urbaine dans les grandes cités du pourtour méditerranéen. Un projet pilote euromédi- terranéen pourrait également être lancé sur le modèle du programme Civitas, qui regroupe 36 villes européennes autour de la mise en place de systèmes innovants pour un transport urbain propre et économe en énergie. Cette initiative pourrait être le laboratoire permettant de préparer, en vue des prochaines perspectives financières, un programme urbain et régional de convergence euroméditerranéenne, fort de notre expérience de soutien aux zones européennes en difficulté.
À bien des égards, la relation de l'Union européenne avec ses voisins du pourtour méditerranéen est un élément clé de la stabilité mondiale. Mais, d'une part, la coopération régionale entre pays du sud de la Méditerranée est très insuffisante. D'autre part, le partenariat euroméditerranéen doit retrouver un nouvel élan.
Je crois de toutes mes forces à l'Europe des projets concrets. L'histoire à montré, de la Communauté européenne du charbon et de l'acier à la politique de solidarité régionale, qu'elle est source de progrès, de stabilité, d'échanges fructueux entre les États.
C'est dans cet esprit, fidèle à la vision de Jean Monnet, que j'ai récemment présenté un projet de mandat pour une communauté des transports entre l'Union européenne et les pays des Balkans occidentaux. C'est dans cet esprit que la Commission européenne pourrait étudier la faisabilité d'un projet similaire étendu à toute la Méditerranée. C'est dans cet esprit que les chantiers concrets que je viens d'énumérer doivent être lancés.
Le Figaro Débat - 13 mai 2008
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