Le Forum de Genshagen, fruit d'un partenariat entre la Fondation Genshagen et l'Institut Montaigne, réunit chaque année une centaine de décideurs et de représentants français et allemands des mondes de la politique, de la diplomatie, de l'économie, de la culture et des médias autour d'un thème relatif à l'Europe. L'objectif de ces rencontres est derenforcer le dialogue franco-allemand mais également d'impulser des réflexions stratégiques sur l'avenir de l'Europe.
Cette année, le IVème Forum de Genshagen pour le dialogue franco-allemand a pour thème spécifique « L'Union européenne et la Méditerranée : Quelles attentes réciproques, quelles perspectives communes ? ». Dans la perspective de cet événement, Harris Interactive a interrogé deux échantillons représentatifs de Français et d'Allemands afin de mettre au jour leur perception des relations franco-allemandes ainsi que leur appréciation et souhaits à l'égard des relations entre l'Union européenne (UE) et les pays de l'espace méditerranéen.
Cette enquête 20131 a donc plus précisément pour objectif de mesurer les évolutions de la perception de la relation entre la France et l'Allemagne dans la continuité des enquêtes déjà menées en 20112 et 20123. Au-delà de ces premières mesures barométriques, il s'agit, en second lieu, d'examiner la perception française et allemande de l'espace méditerranéen, d'appréhender la lecture des conséquences du « Printemps arabe » pour les pays de cette zone et pour l'UE, et d'identifier les souhaits des Français et des Allemands en ce qui concerne les relations entre l'Union européenne et cet espace méditerranéen.
Quel regard portent les Français et les Allemands sur l'attitude de l'Union européenne et des pays membres depuis les premières révoltes qui ont secoué les pays arabes en décembre 2010 ? Quels impacts ont eu ces mouvements sur leurs perceptions de l'espace méditerranéen ? Les populations française et allemande soutiennent-elles la perspective d'un approfondissement des relations politiques, économiques ou sociales avec ces pays ? Sont-elles confiantes ou inquiètes à l'égard de leur avenir ?
Que retenir de cette enquête ?
• Soulignons en premier lieu que si des différences de perception sont parfois observables, les réponses données par les Français et celles données par les Allemands convergent sur un grand nombre de points.
• Relations franco-allemandes
Plus de 9 Français sur 10 mentionnent spontanément l'Allemagne comme le partenaire le plus important de la France parmi les pays de l'Union européenne. La réciproque est vraie également pour un peu plus de 8 Allemands sur 10, qui citent la France comme partenaire privilégié. Notons que cette citation réciproque de l'Allemagne par les Français et de la France par les Allemands est en progression constante depuis la première vague de ce baromètre, réalisée en 2011.
• Relations entre Etats membres et Union européenne
Les deux populations indiquent que les relations franco-allemandes revêtent une grande importance pour l'avenir de l'Union européenne (note moyenne de 7.8 sur une échelle de 1 à 10). Ces chiffres connaissent une hausse significative suite à la légère baisse enregistrée en 2012, signe que le dialogue franco-allemand demeure une pierre angulaire de la construction européenne aux yeux des deux pays.
La note attribuée à la qualité de la relation franco-allemande est également en hausse depuis l'année dernière, surtout auprès de la population allemande (7, +0,6 point par rapport à 2012) et dans une moindre mesure en France (5.9, +0,1 point). Toutefois, notons qu'en France, 40% des personnes interrogées (-5 points) continuent de juger « mauvaises » les relations entre la France et l'Allemagne, ce qui n'est le cas que de 17% des Allemands.
Si le couple franco-allemand est perçu comme plus important et plus apaisé que l'année dernière, il n'en est pas de même vis-à-vis de l'Union européenne. En effet, de plus en plus de Français (40%, soit +11 points par rapport en 2012) comme d'Allemands (44%, soit +14 points) souhaitent que l'Union européenne dispose de moins de prérogatives au profit d'une plus grande souveraineté des Etats. Cette considération est particulièrement répandue et en hausse parmi les catégories populaires et, en France, parmi les personnes se déclarant proches du Front national.
• La France et l'Allemagne, l'Union européenne et l'espace méditerranéen
Avec quel pays de l'espace méditerranéen développer des liens plus étroits ?
La deuxième partie du sondage conduit dans le cadre du Forum annuel de Genshagen 2013, s'intéresse aux liens entre l'Union européenne et les pays de l'espace méditerranéen, notamment ceux ayant vécu le « Printemps arabe ». Notons que près d'un Allemand sur deux et plus d'un Français sur trois souhaitent que l'Union européenne n'approfondisse ses relations avec aucun des pays de l'espace méditerranéen. Parmi les pays cités par les sondés, les Français mentionnent le Maroc (36%), la Turquie (28%) et l'Algérie (23%), tandis que les Allemands placent la Turquie en 1ère position (31%) puisIsraël (25%) et l'Egypte (18%).
Si le sondage révèle également qu'une majorité absolue de Français comme d'Allemands souhaite qu'elle joue un rôle plus actif entre l'Union européenne et les pays de l'espace méditerranéen, peu souhaitent son entrée dans l'UE (13 % pour les Français, 15 % pour les Allemands).
• Le sentiment de proximité vis-à-vis des pays de l'espace méditerranéen
Que ce soit sur le plan culturel, économique, politique, social ou encore en termes de mode de vie, les Français et les Allemands interrogés ne manifestent pas un fort sentiment de proximité vis-à-vis de ces pays. Les sondés se sentent davantage proches de ces pays sur le plan géographique (66 % pour les Français, 53 % pour les Allemands) et dans une moins mesure, sur le plan historique (46 % pour les Français, 36 % pour les Allemands).
Notons également que 23 % des Français et 29 % des Allemands ayant participé à ce sondage ont répondu ne se sentir proche sur aucun des plans proposés. Cela peut contribuer à expliquer l'absence d'attrait pour des relations plus approfondies avec ces pays.
• Visibilité, sentiment de proximité et craintes exprimées suite au « Printemps arabe »
Les révoltes dites du « Printemps arabe » ont permis à un peu plus de la moitié des populations interrogées de mieux comprendre la situation des pays de l'espace méditerranéen, mais n'ont pour autant pas vraiment permis d'accroître le sentiment de proximité avec eux (35% en France et 38% en Allemagne). Selon les Français et les Allemands sondés, elles ont surtout eu pour effet d'accroître les flux migratoires en direction de l'UE (respectivement 68% et 78%) et d'accroître les risques terroristes dans les pays de l'UE (58% dans les deux pays).
Notons également que pour 52% des Français et 54% des Allemands les suites du « Printemps arabe » vont de pair avec un développement progressif dans ces pays des processus et institutions démocratiques.
• Soutien direct, indirect, ou pas du tout ? Formes d'intervention souhaitées dans le cadre du « Printemps arabe »
Un quart des Français interrogés ont le sentiment que leur pays a trop soutenu les populations civiles ayant pris part aux révoltes du « Printemps arabe », alors que 32% des Allemands ont le sentiment inverse. 59% des Allemands déclarent qu'ils auraient souhaité une intervention de l'Allemagne sous une forme directe ou indirecte dans le cadre du « Printemps arabe », contre 48% des Français interrogés.
52% de ces derniers considèrent que la France n'avait pas à intervenir ou est suffisamment intervenue, contre 40% des Allemands Les deux populations auraient privilégié des solutions diplomatiques ou humanitaires ; les Allemands étant plus nombreux toutefois à indiquer qu'ils auraient souhaité que l'Allemagne intervienne en formant la police et l'armée dans les pays avec de nouveaux pouvoirs en place (24%, pour 13% en France), ou en accueillant des réfugiés sur son sol (22%, pour 7% en France).
• Seul un répondant sur quatre fait preuve d'optimisme concernant l'avenir des pays ayant connu le « Printemps arabe », qu'il s'agisse de leur avenir économique ou de leur avenir politique et social. En effet 72% des Français et 74% des Allemands sondés sont pessimistes quant au développement économique de ces pays, et respectivement 75% et 73% le sont quant au développement politique et sociétal. Mais cela n'empêche pas une majorité de Français et trois-quarts des Allemands de souhaiter que leur pays respectif approfondisse les liens économiques et politiques avec les pays de l'espace méditerranéen.
Toutefois, cet approfondissement, bien que jugé important, n'est pas perçu comme prioritaire et une indécision existe quant à l'échelon politique le plus pertinent pour initier et mettre en oeuvre ces relations : celui, bilatéral, des Etats-membres (44% des Français et des Allemands), ou celui, à la fois régional et plus global, de l'Union européenne (56 % des Français et des Allemands).
Méthodologie :
- Enquête réalisée en ligne du 26 septembre au 04 octobre 2013 :
- En France : échantillon de 1 000 personnes représentatif de la population française âgée d'au moins 18 ans.
- En Allemagne : échantillon de 1 000 personnes représentatif de la population allemande âgée d'au moins 18 ans.
- Méthode des quotas et redressement appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l'interviewé(e).