En Tunisie, en Egypte ou en Libye, les grands contrats restent pour l'heure en veilleuse, tandis que les nouveaux gouvernements nés des soulèvements populaires se mettent en place.
Tunisie l'attente de nouvelles perspectives
« Nous avons fait le dos rond », entend-on régulièrement parmi les 1.250 entreprises françaises installées en Tunisie. Grèves, sit-in, occupation d'usines : le début de l'année 2011 a été très délicat pour certaines d'entre elles, au point de provoquer parfois l'intervention directe du gouvernement français auprès des autorités tunisiennes. Le contexte politique a mis en veilleuse les grands contrats initiés sous l'ancien président Ben Ali. En attendant des perspectives futures qui seront tracées par le tout nouveau gouvernement, dominé par le parti islamiste Ennahda, les questions qui se posaient sur les grands dossiers d'infrastructures du pays avant le 14 janvier sont toujours ouvertes. Tant sur la centrale à gaz promise entre Tunis et Bizerte - un projet de 400 millions d'euros susceptible d'intéresser Alstom et General Electric France -que pour le grand projet Elmed - de 2 milliards de dollars (1,5 milliard d'euros) -censé relier la Tunisie à l'Italie qui devaient susciter l'intérêt de GDF Suez et d'EDF. Ou, sur les transports, le projet de réseau ferroviaire rapide (RFR) de Tunis, qui intéressait à la fois Alstom et Colas Rail pour la signalisation et l'équipement des voies et Bombardier France pour le matériel roulant. La mise en place d'investissements destinés au financement de grands projets dans les régions intérieures, promis par Ennahda, pourrait ouvrir de nouvelles perspectives aux entreprises françaises.
Libye les entreprises font front commun
« Pas mal de choses sont en train de se dessiner, mais rien n'est fait, résume le président de la chambre de commerce franco-libyenne Michel Casals. Plusieurs entreprises françaises ont repris le chemin de la Libye sans pour autant y redéployer tout leur personnel. » Dans ce pays où le nouveau gouvernement s'est installé le 22 novembre, les 50 entreprises françaises qui étaient sur place avant la guerre savent qu'il faudra attendre un peu avant de négocier les grands contrats. « Il faut que l'offre internationale se mette en place et que les financements, qui supposent un dégel massif des avoirs libyens, soient là », observe le directeur général de Medef international, Thierry Courtaigne. Les entreprises françaises tentent, pour l'heure, de reprendre le commerce courant (céréales, machines...). Et de pousser leurs pions dans onze secteurs (lire ci-dessus) pour lesquels grandes entreprises et PME sont invitées par le gouvernement français à présenter une offre commune aux Libyens.
Dans le secteur bancaire, Paris, en coopération avec Tunis, pose ainsi des jalons pour une offre de formation à la Banque centrale de Libye. Dans le même esprit, Egis tente, selon plusieurs sources, de se positionner pour un audit des transports dans le pays. « Les Libyens n'ont pas besoin d'argent - les avoirs vont être dégelés et la production de pétrole repart plus vite que prévu -, mais ils manquent d'expertise, justifie un défenseur des dossiers français. C'est sur ce créneau que nous pouvons nous différencier. »
Egypte personne n'a fui
Egypte personne n'a fui
« Aucune des 120 entreprises françaises implantées ici n'a fait demi-tour », se réjouit un expatrié au Caire, neuf mois après la révolution-coup d'Etat qui a conduit au renversement d'Hosni Moubarak. Ce qui n'est pas un mince signe de confiance envers les potentialités d'un pays fort de 81 millions de consommateurs, tant la conjoncture a été difficile ces derniers mois, en raison des diverses grèves et de l'attentisme suscité par la perspective d'une arrivée au pouvoir des islamistes. La croissance, qui caracolait depuis six ans à près de 6 % en moyenne, ne dépassera pas 2 % cette année. Les entreprises françaises s'avèrent même plus nombreuses aujourd'hui qu'il y a un an, puisque les turbulences n'ont pas empêché le boulanger Paul d'inaugurer de nouveaux points de vente il y a deux mois, Schneider d'ouvrir un nouveau département, Danone de se doter d'une ferme laitière, ou Brioche Doré, Guy Degrennes et 5 à Sec de s'implanter.
Certes. Toutefois les volumes d'affaires ont reculé dans nombre de secteurs, reconnaît Dominique Maupin, d'UbiFrance. Si les entreprises rechignent à citer les projets d'investissements reportés ou carrément gelés, il est clair que le volume des investissements étrangers à chuté ; toute origine confondue, il est passé de 6 milliards de dollars en 2010 à environ 1,5 milliard cette année. Les projets dans le tourisme, notamment, sont en suspens. Les travaux sur la ligne 3 du métro du Caire, en revanche, seraient repartis.
Par Marie-Christine Corbier et Yves Bourdillon - LesEchos.fr
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