C’est l’ultime round qui a eu lieu hier mercredi à Bruxelles entre une délégation marocaine et son vis-à-vis de la Commission européenne.
Pour la partie marocaine, il s’agit d’obtenir le maintien du cadre d’accès de nos fruits et légumes au marché de l’Union européenne, tel que spécifié par l’accord agricole. Cependant, la Commission s’en tient à l’acte délégué tout en proposant quelques réajustements des quotas accordés à certains produits comme la fraise, l’ail, ou encore le concombre. Des produits qui ne pèsent pas grand-chose face aux tomates qui seront les plus pénalisées par le nouveau cadre qui sera appliqué dès le 1er octobre 2014 (voir notre édition du 28 avril.www. leconomiste.com). Or, si la Commission européenne campe sur sa position, le Maroc n’écarte pas le recours à l’arbitrage de l’Organisation mondiale du commerce.
Une démarche qui relève bien évidemment du ressort du gouvernement qui reste muet sur la question. Une action à l’OMC reste envisageable, vu la fermeté toujours affichée par Rabat à l’égard du dossier. L’enjeu étant de taille. Rien que pour la tomate, environ 35% du volume exporté seront évincés du marché européen.
Sans oublier la perte de plusieurs milliers d’emplois sur toute la chaîne de valeur. Pour le moment, c’est le flou total pour ce qui est de la préparation de la prochaine campagne d’exportation. De source professionnelle, peu d’engouement est observé actuellement en ce qui concerne les semis de tomates dont le calendrier commence dès la prochaine semaine. En cause, le manque de visibilité sur les perspectives d’export. «Nous ne disposons aujourd'hui d'aucune information annonçant une solution sur ce dossier. Les dispositions prises par l'UE à travers les nouveaux actes délégués ont provoqué une forte frustration parmi les milieux professionnels, eux qui croyaient en un partenariat responsable et durable avec l’Union», laisse tomber, amer, un responsable de l’Association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes.
Et tout l’espoir est fondé sur ce round qui peut se révéler être le dernier dans la mesure où l’Europe se trouve à la veille des périodes des vacances alors qu’au Maroc, c’est les travaux de plantation des maraîchages. Laisser traîner les choses semble aussi une manière de tergiverser (voir ci-dessous correspondance de Bruxelles). «Si aucune offre valable n'est présentée de la part des Européens, de nombreux opérateurs seraient dans l'obligation de recourir aux procédures juridiques pour défendre les acquis du secteur», renchérit un autre membre de la même corporation.
Mais le recours auprès de la Cour européenne de justice ne peut être introduit qu’après coup. Autrement dit, un exportateur qui se voit appliquer un cadre de dédouanement de son produit autre que celui prévu par l’accord agricole a la possibilité d’attaquer cette décision auprès de cette juridiction. C’est un processus aussi long que coûteux.
Mais le jeu vaut la chandelle. Le nouveau dispositif va générer un manque à gagner à l’export de l’ordre de 130.000 tonnes et la perte de 30.000 emplois permanents. Une estimation que les professionnels jugent minimale. Pour la seule culture des tomates, les plus menacées, les exportations seront réduites de 150.000 tonnes. Pour cette campane qui tire à sa fin, il est prévu de réaliser 269.000 tonnes dans le cadre du contingent préférentiel et pas moins de 150.000 tonnes hors quotas. Or, c’est ce dernier volume que Bruxelles cherche à contrecarrer par son nouveau mode de dédouanement.
Hors contingent, les exportations marocaines de tomates bénéficient d’un abattement des droits de douane ad-valorem de 60%, soit 5,7% contre 14,4% comme tarif douanier commun. Le prix d’entrée conventionnel applicable à ces fruits du 1er octobre au 31 mai est de 46,1 euros/100 kg. Alors que celui de l’OMC varie tout au long de l’année. Il se situe entre 52,6 et 112,6 euros/100 kg. Malgré ces niveaux, les exportateurs marocains dédouanent dans ce cadre pour augmenter les volumes. Surtout durant les périodes où les flux à l’import intra et extra-UE sont importants. Il n’empêche que les exportations marocaines de tomates représentent moins de 3% de la consommation européenne, bien qu’elles constituent 60% de l’import hors UE.
Par A. G - Source de l'article L'Economiste
Pour information
Entré en vigueur le 1er octobre 2012, le protocole n°1 de l’accord Maroc-UE prévoit l’élimination des droits de douane applicables aux importations dans l'UE de produits agricoles frais et transformés, de poissons et de produits de la pêche originaires du Maroc. A l’exclusion d’une liste limitée de produits qui reste soumise au système de quotas, au calendrier d’exportation et aux prix d’entrée. Il s’agit principalement des tomates, concombres, courgettes, ails, fraises, clémentines, artichauts, oranges, raisins de table, abricots, pêches et nectarines. Mais les six premiers produits restent les plus pénalisés par le changement du système des prix d’entrée. Parmi les principaux produits qui ne sont plus soumis à contingent, tout en bénéficiant de l’exemption des droits de douane, il y a lieu de citer l’huile d’olive, l’haricot vert, les pommes de terre et les melons. De plus, certains contingents enregistrent des hausses annuelles. C’est notamment le cas des tomates, des courgettes et des concombres. -
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