Un non-évènement, devant une vingtaine ou plus de journalistes et médias. Telle pourrait être la synthèse de la conférence de presse, tenue ce mardi 17 juin 2014, par l’Ambassadeur de France en Tunisie qui n’a connu l'annonce, d’aucun projet, d’aucune nouvelle aide ou d’une quelconque décision nouvelle.
François Gouyette, diplomate chevronné est venu, en effet, faire étalage, sans qu’on en sache la véritable raison , du soutien financier qu’apporte la France à la Tunisie de l’après Ben Ali, dans un document de 20 pages plein de millions d’euros, noir sur blanc. Des aides, par ailleurs presque toutes accordées lorsque le Nahdhaoui Ali Larayedh dirigeait la Tunisie.
Dans ce document qui sera la base de toute la rencontre de presse, il est d’abord rappelé que «la France est le premier partenaire économique de la Tunisie. Premier fournisseur et premier client, elle a accueilli 26,4% des exportations tunisiennes en 2013. Avec plus de 90 M€ d’investissements directs en 2013, la France est le 1er investisseur étranger en Tunisie. Ces investissements, à destination de l’industrie pour 90%, ont permis la création de près de 4000 emplois. La France est également le premier investisseur en stock de la Tunisie : environ 1300 entreprises françaises y sont aujourd’hui présentes, employant quelque 125 000 salariés. La France reste aussi le premier pays européen pourvoyeur de touristes en Tunisie : 770.000 en 2013». On aura beau demander une comparaison du nombre des entreprises françaises installées en Tunisie, entre fin 2010 et fin mai 2014,et la réponse est éloquente :"nous n’avons actuellement pas les chiffres". On aura beau rappeler de la promesse de François Hollande de booster le nombre des touristes français pour la Tunisie cet été, on nous répondra que le ministre français des affaires étrangères, viendra lui-même passer quelques jours de vacances en Tunisie. Espérons qu’il ne lui arrivera pas ce qui était arrivé à «M.A.M» !
- Je t’aide, tu m’aides, nous nous aidons !
Abordant le vif du sujet, c'est-à-dire l’aide promise par la France de François Hollande, depuis sa visite en 2013 à la Tunisie, force est d'entendre cette tirade intéressante : «La France a annoncé, en juillet 2013, l’octroi de 345 M€ de prêts et dons exceptionnels du Trésor destinés à financer plusieurs projets majeurs pour le développement économique en Tunisie, en cas d’attribution des marchés à des entreprises françaises ». On remarquera en effet, que ce n’était là que de l’aide, conditionnée à l’achat de produits français . Questionné à ce propos par nos soins, l’Ambassadeur Gouyette, trouve cela normal. «Il n’est pas anormal d’offrir de l’aide concessionnelle et cela se fait sous le contrôle de l’OCDE », dit l’Ambassadeur. Comme nous le confirmera par la suite Gurvan Le Bras, Premier secrétaire de l’ambassade, le choix des entreprises se fera, bien sûr, dans le cadre d’appels d’offres, mais l’argent ne sera pas donné si ce n’est pas une entreprise française qui remportera le marché. Ils sont désormais loin, les temps où Tunis et Paris parlaient Partenariat et Co-développement, même lorsqu’on est un gouvernement, dit socialiste, comme celui de F. Hollande.
Les temps en Tunisie sont désormais d’une, dite révolution, qui a mis tout le pays à genoux, jusqu’à même ne pas discuter les conditions quasi-usurières de la France qui veut s’implanter dans des créneaux hautement stratégiques du secteur du transport (SNCFT, Ports et avions).
Cette aide sous condition, les Français ont bien choisi les projets qu’elle devra concerner. Il s’agit du «matériel roulant du Réseau ferroviaire rapide (RFR), un projet structurant de transport collectif dans le Grand-Tunis, le RFR permettra notamment de désenclaver les quartiers défavorisés de la périphérie (5 lignes, 86 km, 600.000 passagers/jour). La France propose de "contribuer à l’acquisition du matériel roulant qui nécessitera à terme plusieurs centaines de millions d’euros ", dit le document de l’ambassade.
Il s’agit ensuite, de la «rénovation du réseau ferré dans la région de Gafsa qui vise à réhabiliter les voies ferrées entre Gafsa, Sfax et Gabès afin d’augmenter la capacité de trafic des trains circulant sur cette voie et d’accroître significativement le transport de phosphate (extraction en provenance du bassin minier), tout en améliorant la fluidité du trafic de passagers. Actuellement, le coût du transport par camion de la tonne de phosphate est estimé à 24 dinars la tonne. "Grâce au projet de la SNCFT, il devrait être divisé par cinq ". Il s’agit enfin, du projet de «régulation des ports de Radès, de La Goulette et de Bizerte, un projet de l’Office de la marine marchande et des ports (OMMP), qui concerne les trois principaux ports tunisiens. Il permettra à la Tunisie d’améliorer sa capacité d’import-export et de trafic maritime en optimisant les conditions d’approches maritimes et terrestres (gestion et régulation du trafic portuaire)». Pour tout cela, comme l’annonce d’ailleurs l’Ambassadeur de France, des «projets de loi relatifs aux protocoles financiers viennent d’être validés par l’Assemblée nationale constituante (ANC)». On ne sait pas s’il y a un lien à faire, entre ces projets, la visite annoncée du président de l’ANC en France où il rencontrera du beau monde, dont le président français, ainsi que la prochaine visite de Rached Ghannouchi en France aussi au Quai d’Orsay, annoncée par l’Ambassadeur français ce mardi 17 juin 2014 !
- Les effets d’annonce du «je t’aide, moi non plus» !
«La France a contribué à hauteur de 10 M€ au Partenariat de Deauville pour des projets d’assistance technique », dit le document distribué, lors de la rencontre de presse. On sait désormais que toute cette réunion, n’a rien apporté de concret à la Tunisie, que les promesses !
«Les Caisses des dépôts et consignations française et tunisienne ont signé en 2013 un accord pour la création d’un fonds d’investissement conjoint de 20 M€ destiné à financer des partenariats commerciaux et industriels, équilibrés et durables pour des PME françaises et tunisiennes à fort potentiel de croissance dans la zone méditerranéenne », dit encore le document de l’ambassade française. On sait pourtant que la CDC tunisienne est une coquille vide et qu’il faudra attendre des lustres avant qu’elle ne dispose des moyens de financer quoique ce soit !
Toujours ce document qui énumère tout ce que la France de François Hollande a fait pour la Tunisie de l’après Ben Ali, «en juillet 2013, les présidents François Hollande et Moncef Marzouki ont décidé la conversion de 60 M€ de dette en investissements privés ». Le même document donne ensuite la réponse à la non-mise en exécution de cette décision. «Les équipes techniques des deux pays travaillent à définir les modalités de cette conversion de manière à stimuler l’investissement étranger tout en contribuant au développement régional». Il est un fait, depuis 2011, que la Révolution tunisienne n’arrive toujours pas à identifier les projets qu’il lui faut dans les régions. Et quand bien même le pourrait-elle, les régions concernées font depuis 2011 tout pour ne rien mettre à exécution.
Mais dans tout cela, que peut faire la France pour une Tunisie, dont toutes les composantes sociales et politiques se déchirent pour les fauteuils de l’ANC et de la présidence de la République. Une Tunisie qui n’a, jusque là besoin, que de crédits pour consommer et non de projets pour travailler !
Par Khaled Boumiza - Source de l'article Africanmanager
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