Tunisie – UE : Plateforme de débat sur les relations UE-Afrique à Tunis


À l’occasion de la présidence roumaine du Conseil de l’Union européenne, l’Ambassade de Roumanie à Tunis a lancé le 4 avril une plateforme de débat sur les relations UE-Afrique. Dés lors, le premier débat a eu lieu sur “Les relations UE-Afrique.

Un effort commun pour un partenariat renforcé”, auquel ont participé des experts africains, des représentants du ministère des Affaires étrangères, la délégation de l’UE à Tunis, des ambassadeurs et des diplomates d’États européens et africains accrédités à Tunis (Afrique du Sud, Algérie, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Égypte, Guinée Equatoriale, Mali et Nigéria).

Les invités d’honneur étaient Son Excellence M. Karim Ben Bécher, Directeur général pour l’Afrique au Ministère des affaires étrangères tunisien, Son Excellence M. Victor Loé, Ambassadeur du Cameroun à Tunis et doyen du corps diplomatique, le Professeur Rafâa Ben Achour, juge à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, expert auprès de l’Union africaine et membre du Comité du droit international de l’UA et ancien ministre et ambassadeur, le professeur Ezzeddine Zayani, ancien ambassadeur, ancien conseiller principal du représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies au Mali, secrétaire général du Centre Tunisien d’Etudes sur la Sécurité Mondiale et Adel Smaoui, ancien ambassadeur, ancien consultant senior de l’Union africaine et président de Tunisia International Consulting.

L’Afrique et l’Europe sont liées par des relations historiques, géographiques et économiques étroites, et l’UE est le principal partenaire de l’Afrique en matière de commerce, de développement et d’assistance humanitaire. En outre, il convient de mentionner les préoccupations communes concernant la lutte contre le terrorisme et la migration illégale.

Le débat a été une bonne occasion d’évaluer le nouveau contexte géopolitique de l’interaction UE-Afrique, les cadres et mécanismes de coopération existants, ainsi que les attentes des parties, en ce qui concerne la politique européenne de voisinage et le nouvel accord post-Cotonou, le rôle de l’Union africaine et le potentiel de coopération dans les domaines du développement, de la sécurité, de la bonne gouvernance et de l’état de droit, de l’éducation, de la gestion du changement climatique, etc.

Renforcer le partenariat entre les parties, trouver le juste équilibre entre des programmes spécifiques et une stratégie à long terme couvrant l’ensemble du continent africain, en tenant compte des objectifs des cadres de coopération régionale et sous-régionale, le développement de la coopération à plusieurs niveaux, le renforcement de l’intégration intra-régionale , font partie intégrante des sujets abordés dans le débat.

Lors de l’ouverture de la réunion, l’Ambassadeur de Roumanie à Tunis, Son Excellence M. Dan Stoenescu, a souligné que l’un des objectifs de la Roumanie en tant que président tournant du Conseil de l’UE au premier semestre 2019, est d’apporter sa propre contribution au renforcement de la coopération multidimensionnelle de l’UE avec l’Afrique et à la consolidation du profil d’acteur global de l’UE. Il a également évoqué la longue tradition de coopération bilatérale entre la Roumanie et l’Afrique, ainsi que la participation active de la Roumanie dans des structures multilatérales destinés à soutenir la paix, la sécurité et le développement du continent africain. Il a souligné que l’UE et l’Afrique mettent l’accent sur l’importance d’un espace contigu de paix, de prospérité, de stabilité et de sécurités.

Traditionnellement, la Roumanie accorde une attention particulière à la région africaine et agisse de manière équilibrée et inclusive pour trouver des solutions politiques aux crises dans la région et soutenait son développement durable.

L’Ambassadeur de Roumanie a également déclaré que si la Roumanie obtenait un nouveau mandat au Conseil de sécurité de l’ONU pour 2020-2021, elle poursuivrait cette approche et développerait sa coopération avec les États africains au profit de la région africaine. Parallèlement, la Roumanie est prête à poursuivre les efforts déployés par les États africains dans le cadre de leurs mandats en tant que membres non permanents du Conseil de Sécurité des Nations unies.

Dans ce contexte, l’ambassadeur de Roumanie a exprimé sa reconnaissance pour le rôle de la Tunisie en tant que modèle positif sur le continent africain.

Source de l'article Directinfo

Élisabeth GUIGOU, Présidente de la Fondation Anna Lindh : « Nos trois grands projets : un Erasmus des Associations, une Académie des Médias, un Bateau-école de l’interculturalité ! »


La Fondation Anna Lindh que préside l’ancienne ministre Élisabeth GUIGOUse prépare activement à participer au sommet des Deux Rives (#SD2R), les 23 et 24 juin prochains à Marseille. 

Ce moment fondateur par lequel le Président Emmanuel Macron entend relancer la coopération en Méditerranée offre une occasion unique de promouvoir la cause de l’interculturalité méditerranéenne, conformément à la mission de la Fondation Anna Lindh. Élisabeth GUIGOU y plaidera trois projets d’envergure. Entretien exclusif.

Tout d’abord, quel est le périmètre géographique d’action de la Fondation Anna Lindh, que vous présidez depuis quatre ans ?

Élisabeth GUIGOU – Aujourd’hui la fondation existe depuis quinze ans. Elle a été créée en 2004 à l’initiative de l’ancien Président de la Commission, Romano Prodi, avec l’approbation des chefs d’État et des ministres des affaires étrangères européens d’abord, puis des chefs d’État des 15 pays du sud de la Méditerranée. Ainsi nous sommes 43 – 42 pour le moment, la Syrie étant mise entre parenthèses du fait de la guerre – autour de la table. En fait tous les pays de l’UE 28 et les 15 riverains de la Méditerranée du Sud et de l’Est, avec en plus des pays non encore membres de l’Union, comme le Monténégro, l’Albanie et la Bosnie-Herzégovine.

Les axes de votre mission ?

Élisabeth GUIGOU – Nous sommes tout à fait dans le « bottom up », notre rôle étant de soutenir l’expression de la société civile associative des deux côtés de la Méditerranée, et de favoriser les échanges interculturels.
Nous nous adressons seulement aux jeunes, jusqu’à 35 ans, que nous formons au dialogue interculturel. Ils sont d’origines sociales et de métiers très divers : jeunes entrepreneurs, artistes, sportifs, créateurs, journalistes – d’ailleurs nous décernons chaque année un prix du meilleur reportage sur la région – etc., mais tous ont en commun leur engagement associatif.

Nous accomplissons aussi un travail de recherche avec notre Rapport sur les tendances interculturelles [Lien ici pour télécharger le Rapport 2018, ndlr], fruit d’une grande enquête réalisée tous les trois ans, avec 13 000 personnes interrogées dans 13 pays différents sur les tendances de nos sociétés… Figurez-vous que le dernier Rapport, paru en 2018, s’est avéré très réconfortant, car malgré l’aggravation depuis dix ans des problèmes de la région, on observe qu’il y a bien une stabilité convergente des aspirations des sociétés. En fait, de part et d’autre de la Méditerranée, les populations considèrent en majorité que oui, nous avons de grands problèmes communs – le terrorisme, les migrations, le défi de l’emploi des jeunes… – mais, entre nous, le plus important est ce qui nous rapproche ! C’est formidable, vraiment ! Cela rend optimiste !

Mais on ne se contente pas de publier cette enquête. Nous avons aussi engagé un travail de fond avec les universités notamment du réseau UNIMED, l’Union des Universités de la Méditerranée, basée à Rome. Nous faisons travailler universitaires, chercheurs et doctorants sur les importantes masses de données accumulées depuis des années, très intéressantes, et détaillées par pays.

Lors d’une entrevue que vous m’avez accordée il y a quelques années, vous aviez évoqué votre volonté de mettre sur pied une action de « déradicalisation » de la jeunesse tentée par les extrémismes. Où en êtes-vous ?

Élisabeth GUIGOU – Nous avons élaboré et déployé fortement ce que je considère être notre programme-phare, le « Young Mediterranean Voices - Jeunes voix de la Méditerranée » qui a touché près de 100 000 jeunes à ce jour. Avant cela, la Fondation avait développé un programme presque similaire, le Young Arab Voices, qui concernait les seuls pays arabes où l’on formait des jeunes au dialogue interculturel. Cela a rencontré un tel succès que nous l’avons donc étendu à toute la Méditerranée.

Le programme consiste d’abord à former les jeunes pour leur permettre de décoder ce qu’ils reçoivent notamment des médias, et de plus en plus des réseaux sociaux. Nous avons un partenariat avec Facebook pour donner aux jeunes les moyens de prendre la parole avec un discours positif, et en tout cas contrer les discours de haine.
Nous avons aussi élaboré une méthodologie qui a désormais fait ses preuves, avec notamment la conception d’un manuel à l’adresse des éducateurs, pour les aider à aborder les sujets délicats – la religion, l’égalité de genre…
À la demande de la Commission européenne, qui finance plus de la moitié de notre budget, La Fondation Anna Lindh assume aussi le pilotage du programme « Erasmus+ virtuel » qui fait dialoguer chaque mois sur la Toile des jeunes du Sud et du Nord de la Méditerranée.

Venons-en à l’actualité… La Fondation est un opérateur institutionnel du sommet des Deux Rives, qui se tiendra à Marseille, les 23 et 24 juin prochains. Ainsi vous vous êtes beaucoup impliquée dans sa préparation. Qu’allez-vous proposer ?

Élisabeth GUIGOU – Notez d’abord la cohérence du projet, puisqu’au fil des mois il y aura eu cinq fora préparatoires à ce sommet des Deux Rives qui vise effectivement à relancer la coopération en Méditerranée en s’appuyant sur les pays du Dialogue 5+5* et les remontées des voix de la société civile méditerranéenne, conformément au souhait du Président Emmanuel Macron**. Ces fora de la société civile se sont donc déroulés dans diverses capitales, chacun d’eux se focalisant sur un thème : à Alger sur les énergies, à Rabat sur l’économie, à Malte sur la jeunesse, à Montpellier sur la culture, à Palerme sur l’environnement et le développement durable, et enfin à Tunis où une réunion de synthèse sera tenue le 11 juin par l’Assemblée des Cent [les « Cent » étant l’ensemble des dix personnalités représentatives de la société civile issues de chacun des dix pays de l’espace 5+5, ndlr].

Outre ma participation en tant qu’invitée institutionnelle à tous ces événements, la Fondation Anna Lindh a été la cheville ouvrière du forum sur la jeunesse de Malte, à la mi-avril, que nous avons co-organisé avec les autorités maltaises – avec lesquelles nous avons d’ailleurs une solide et ancienne coopération, car nous avons tenu à Malte à la fin de 2016 notre forum triennal qui a rassemblé un millier de jeunes en présence du ministre maltais des affaires étrangères Georges Vella, aujourd’hui président de la République, et de la Haute représentante de l’UE Federica Mogherini, et que nous organisons régulièrement des rencontres des jeunes lauréats de nos programmes à Malte, avec l’appui de l’actuel ministre des affaires étrangères, Carmelo Abela.

À Malte, les jeunes ont retenu des projets dont nous espérons qu’ils seront sélectionnés pour être présentés aux chefs d’État à Marseille. Début mai, nous avons aussi apporté notre contribution au forum de Montpellier, axé sur la culture, et là aussi nous avions comme à Malte une trentaine de jeunes participants dont la Fondation a financé les frais de voyage et d’hébergement.

Quels sont les projets issus de vos travaux à Malte et à Montpellier ?

Élisabeth GUIGOU – Plusieurs ! Dont trois, principalement… L’un d’eux relève d’un objectif sur lequel je me suis mobilisée dès ma nomination à la présidence de la Fondation Anna Lindh : créer un Erasmus des Associations.

Certes, aujourd’hui nous avons déjà l’Erasmus universitaire européen, dont l’ouverture aux pays du sud de la Méditerranée est actée – mais bien sûr, il faut aussi que les universités locales coopèrent, ce qui ne va pas toujours de soi, concrètement.

Nous avons aussi développé l’Erasmus+ virtuel de dialogue sur le Net, comme je vous le disais… et nous, à la Fondation, nous organisons des échanges entre les jeunes des Deux Rives. Mais cela ne dure que quelques jours, dans le cadre du programme de formation… et moi je voudrais que l’on aille au-delà, que l’on s’adresse à des publics non universitaires – soit qu’ils ne l’ont jamais été, soit qu’ils ne le sont plus.

Alors, vous voyez bien l’avantage d’un Erasmus des Associations qui permettrait, au travers de celles-ci, de sélectionner des jeunes qui s’engagent dans la société civile – ils viennent d’ailleurs souvent de milieux sociaux défavorisés et leurs projets associatifs démontrent qu’ils sont complètement engagés, dans un sens positif.

Aller vers un tel Erasmus des Associations, cela signifie que des clubs sportifs, des théâtres, des orchestres… et bien d’autres entités pourraient accueillir des partenaires du Sud, et réciproquement (?). Des séjours de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, tout dépendra des budgets que l’Union européenne, avec une participation des États membres, acceptera d’y consacrer. En tout cas, on s’adresserait ainsi à des publics diversifiés sur le plan social, et surtout à des créatifs, des personnes qui ont démontré leur capacité à agir, à leur manière, en dehors des institutions.

Voilà, c’est notre projet Erasmus des Associations ! Et pour qu’il ne soit pas ressenti comme trop eurocentré par nos partenaires du Sud, j’ai proposé de l’appeler Erasmus Averroès ! [Philosophe, théologien, juriste et médecin musulman andalou de langue arabe du XIIe siècle, ndlr]

Le second projet que la Fondation veut mettre en avant ?

Élisabeth GUIGOU – En référence à notre espace méditerranéen des deux rives, il nous paraît indispensable de former des jeunes journalistes à comprendre – ou en tout cas à respecter – les différences des autres, leur culture. Car cela ne va pas de soi, c’est certainement encore moins facile aujourd’hui, face à la puissance et à la pression parfois radicale des réseaux sociaux… Ainsi nous avons cet autre grand projet de créer une Académie des Médias qui enseignerait le dialogue interculturel.

Et le troisième projet ? On m’a dit qu’il s’agirait d’une histoire de bateau-école… à la mer ?

Élisabeth GUIGOU – C’est un projet que j’ai soutenu à Montpellier, dans les débats passionnés des groupes de travail… Il s’agit de raviver cette idée déjà assez ancienne de disposer d’un bateau qui, durant l’été, ferait le tour de tous les festivals de la Méditerranée, de tous types – musicaux, théâtraux, de patrimoine… – et qui accueillerait en même temps une école d’été pour la formation au dialogue interculturel des jeunes journalistes ou au-delà, de jeunes que l’on aurait sélectionnés pour leur engagement.

Je pense que cela répond à un besoin, car il faut donner des outils intellectuels et matériels à ces jeunes pour décoder le tsunami de l’information qui se déverse sur la Toile, comment faire le tri, être conscient aussi de ce qu’ils restituent eux-mêmes.
Il faut absolument miser sur la jeunesse, car vous voyez bien que dans la lutte contre la radicalisation, quand des jeunes parlent à d’autres jeunes, c’est beaucoup plus efficace que les messages institutionnels, souvent sinon toujours détournés ou soupçonnés…

Pour finir sur l’ouverture interculturelle que nous promouvons, je citerai encore cette initiative, il y a deux ans, d’organiser la première conférence euroméditerranéenne sur la traduction d’œuvres arabes en langues européennes. Savez-vous que le taux de traduction depuis l’arabe est ridicule, de l’ordre de 1 % ? Il faut absolument faire plus ! C’est aussi un plaidoyer que je porterai à Marseille, avec d’ailleurs le soutien du ministère français de la Culture.

Vous avez plusieurs fois cité les jeunes qui participent activement aux travaux de la Fondation Anna Lindh. Comment les sélectionnez-vous ?

Élisabeth GUIGOU – Ils sont tous déjà affiliés à la Fondation, via leur engagement associatif. En particulier tous ont déjà participé au programme « Young Mediterranean Voices du dialogue interculturel »… Nous les avons donc sélectionnés petit à petit, pour leur énergie et leur créativité. 
Bien sûr, ils sont issus d’horizons professionnellement et socialement différents, mais surtout ils ont tous fait la preuve – car c’est tout de même une forme de récompense que de les inviter – de leur engagement associatif.

Par exemple au sommet du Dialogue 5+5 des ministres des Affaires étrangères, qui s’est tenu en mars à Malte – indépendamment de la préparation du sommet de Marseille – j’ai proposé à cette occasion au ministre maltais hôte que les dix ministres rencontrent dix jeunes parmi ceux que nous avions retenus pour notre forum.
Cela a été accepté et nous avons organisé un petit-déjeuner où dix jeunes ont pu s’exprimer face aux dix ministres, en direct. Tous les ministres ont été bluffés, vraiment !
Cette anecdote illustre bien, entre autres, une facette de la philosophie de notre action : donner aux jeunes de Méditerranée la possibilité de s’exprimer.

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* Les pays du Dialogue 5+5 : Portugal, Espagne, France, Italie, Malte, pour la rive Nord ; Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, pour la rive Sud
Le périmètre retenu pour le sommet des Deux Rives est celui des chefs d’État et de gouvernement des pays composant le Dialogue 5+5 sur la Méditerranée occidentale, auxquels seront également associés l’Union Européenne, l’Allemagne, mais aussi les organisations méditerranéennes (Union pour la Méditerranée, Fondation Anna Lindh), les principales organisations économiques internationales présentes dans la région (Banque Mondiale, Banque européenne d’investissement, Banque européenne pour la reconstruction et le développement, l’Organisation pour la coopération et le développement économiques).

**Emmanuel Macron : « J’ai annoncé en début d’année à Tunis l’organisation d’un Sommet des deux rives, qui serait construit sur la base de l’actuel dialogue 5+5 de manière encore plus inclusive, avec une forte contribution des sociétés civiles [...] Il nous faut retrouver le fil d’une politique méditerranéenne différente en tirant les enseignements de ce que nous avons réussi et de ce que parfois nous ne sommes pas parvenus à faire. »
Emmanuel Macron, Président de la République française. Conférence des ambassadeu- rs et des ambassadrices, à Paris le 27 août 2018.

Par Alfred Mignot - Source de l'article AfricaPresse Paris

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Liens utiles

Reconnaissance des qualifications de l’enseignement supérieur : des experts réunis à Barcelone par l’Université EMUNI et le Secrétariat de l’UpM examinent les pistes possibles pour avancer

Recognition of higher education qualifications: experts gathered in Barcelona by the EMUNI University and the UfM Secretariat outline possible ways forward

L’Université euro-méditerranéenne (EMUNI) et le Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée (UpM) ont organisé ensemble la conférence « Reconnaissance des qualifications de l’enseignement supérieur : Où en est la région euro-méditerranéenne ? » au siège du Secrétariat de l’UpM à Barcelone le 12 avril.

La conférence a permis la tenue d’un dialogue fructueux entre les décideurs, les recteurs d’université, les experts et les représentants de l’UNESCO, les autorités nationales et les organismes nationaux compétents en matière d’assurance qualité et de reconnaissance des qualifications internationales, les réseaux régionaux universitaires et étudiants, le secteur privé et la société civile organisée des deux rives de la Méditerranée.

Tout au long de la journée, les participants ont partagé les meilleures pratiques et souligné la nécessité de recourir de manière coordonnée à des approches descendantes et ascendantes pour progresser concrètement vers une reconnaissance accrue des qualifications de l’enseignement supérieur dans la région euro-méditerranéenne.

Pour en savoir plus
L’Union pour la Méditerranée (UpM) - Site internet

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Le projet SAFEMED IV financé par l’UE a organisé une formation sur la conduite d’enquêtes de sécurité sur les accidents de mer

EU-funded SAFEMED IV project held training on conducting marine casualty safety investigation

Du 1er au 5 avril 2019, le projet SAFEMED IV, financé par l’UE, a organisé à Lisbonne (Portugal), dans les locaux de l’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM), un cours destiné à acquérir des compétences de base pour les enquêtes sur les accidents. 

Seize participants venus d’Algérie, d’Égypte, de Jordanie, d’Israël, de Libye, du Liban, du Maroc, de Palestine et de Tunisie ont assisté au cours.

Le cours a présenté toutes les étapes pertinentes du processus de conduite d’une enquête de sécurité sur un accident de mer. La formation portait sur les principes et les outils pertinents à l’appui de l’évaluation d’un lieu d’accident ainsi que sur la collecte de preuves matérielles, la conduite des interrogatoires des témoins, l’analyse des facteurs humains et des conditions sous-jacentes, les recommandations de sécurité, ainsi que le suivi et le traitement des rapports d’enquête. Les participants ont également été initiés à la manière dont ils doivent gérer les médias pendant l’enquête.

L’objectif de la session de formation était de doter les enquêteurs des connaissances et des compétences nécessaires pour enquêter efficacement sur les accidents maritimes conformément à la directive européenne 2009/18/CE établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents dans le secteur des transports maritimes et au code relatif aux enquêtes sur les accidents de l’Organisation maritime internationale.

L’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM) met en œuvre SAFEMED IV, un projet d’assistance technique qui rassemble des acteurs nationaux, européens et internationaux dans le but de relever les normes de sureté, de sécurité et de protection de l’environnement marin en mer Méditerranée, dans le cadre du Plan d’Action régional pour les transports 2014-2020 de l’UpM.

Pour en savoir plus
L’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM) – site internet

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Projet connexe
Alors que la sécurité et la sûreté maritimes ainsi que la protection de l’environnement marin sont des préoccupations communes des états membres de l’UE et des pays non-européens riverains de la mer…

L’UE entend faciliter le financement des petites entreprises en Afrique et dans le voisinage européen

EU flags

La Commission européenne met à disposition 4,2 millions d’euros au titre du plan d’investissement extérieur pour permettre aux banques en Afrique et dans le voisinage européen de mieux aider les secteurs sous-financés. 

Le commissaire chargé de la coopération internationale et du développement, Neven Mimica, a signé cet accord de soutien la semaine dernière en marge des réunions de printemps de la Banque mondiale à Washington.

Ce programme d’assistance technique appuiera des mesures concrètes de renforcement des capacités pour aider les banques locales à mettre au point de nouveaux prêts et produits financiers mieux adaptés pour soutenir les secteurs sous-financés tels que les jeunes entrepreneurs, les femmes et les PME des pays à faible revenu, fragiles et touchés par des conflits, qui ont des difficultés à obtenir des financements auprès de leurs banques locales.

Il complétera le programme de prêts et de garanties de 42 millions d’euros du PIE, qui vise à encourager les banques locales à accorder des prêts aux petites entreprises qui, jusqu’à présent, ont eu des difficultés à accéder au financement. Il investira également dans des secteurs à fort impact tels que la santé, l’éducation et l’agriculture sur des marchés émergents difficiles.

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Des porteurs de projets de toute la Méditerranée mobilisés pour réduire les déchets plastiques

Greece 2F © Milos Bicanski

Elle n’a beau représenter que 1% des eaux marines dans le monde, la mer Méditerranée fait partie des plus polluées. Elle concentre à elle seule 7% de tous les microplastiques (fragments de moins de 5mm) d’après les chiffres de WWF, avec 1,25 million de fragments par km². 

C’est même quatre fois plus que dans « l’île de plastique » du Pacifique Nord. Il y a donc urgence pour tenter de sauver notre Mare Nostrum de l’envahissement plastique. Oui, mais comment ?

Pour la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur cela passe par la mobilisation des acteurs et plus largement des sociétés civiles des régions méditerranéennes pour « réfléchir et agir collectivement ». L’institution a lancé dans ce sens le challenge international « Zéro déchet plastique en Méditerranée à horizon 2030 » afin de soutenir les innovations répondant à ce défi. Plus de 60 propositions émanant de 11 pays différents ont été reçues. 15 ont été sélectionnées pour participer à un bootcamp en avril dernier. Les lauréats viennent d’être dévoilés à l’occasion du salon VivaTech, trois jours dédiés à l’innovation, qui vient de se clôturer ce 18 mai.

Robot nettoyeur, biomatériaux et recyclage à l’honneur

Sur le podium 2019 du challenge, on retrouve le robot nettoyeur baptisé « Jellyfishbot », qui a déjà fait ses armes dans le Vieux-Port de Marseille ou celui de la Pointe-Rouge. Il peut récupérer les pollutions en surface, en traitant 1000 m²/h grâce à une autonomie de six à huit heures. Le projet vise à rendre le robot autonome et capable d’évoluer à terme dans une flottille pour des opérations de nettoyage plus régulières et efficaces.


À ses côtés, un projet à vocation sociale et écologique a aussi été mis en lumière. MycoConcept a pour objectif de produire des matériaux entièrement compostables et biodégradables pour apporter une alternative aux produits pétrochimiques utilisés dans les domaines de l’emballage, de la protection d’articles et de la construction. Et ce en utilisant la partie végétative filamenteuse des champignons, appelée mycélium. À terme, d’autres « déchets » issus de l’agriculture locale seront utilisés : paille et balle de riz de Camargue, sarments de vignes, sous-produits des pépinières viticoles, drêches de brasserie, déchets d’élagage, etc.

Un projet libanais se hisse également en haut du tableau. Live Love Recycle a pour but d’aider à contrer la crise des déchets au Liban. Il s’agit d’un service gratuit basé sur une application mobile avec lequel les résidents de Beyrouth peuvent commander jusqu’à deux fois par mois le retrait gratuit de leurs matières recyclables. En plus de la réduction des déchets, ce programme a permis la création de 430 emplois pour les personnes issues de communautés vulnérables.

Repères

Les 15 projets retenus : 
Agriplastic, Another, Arteko, L’éco-Kit, Fungipack, Greencityzen, Jellyfishbot, Live Love Recycle, Mushtic, Mycoconcept, Nenuu, Pèlerin, Recycled Park, Smart Futures, Valorization of Waste.

SPar Agathe Perrier - Source de l'article GoMet

Coopération internationale Les jeunes et la société civile préparent le Sommet des deux rives avec l'UpM

Une centaine de jeunes et de représentants de la société civile ont préparé des propositions pour le Sommet des deux rives (photo : UpM)


Réunis les 22 et 23 mai 2019 à Barcelone par l'Union pour la Méditerranée (UpM), dans le cadre du dialogue régional "Regards croisés sur les enjeux prioritaires en Méditerranée", une centaine de représentants de la société civile et d'organisations de jeunesse de l'Euroméditerranée ont apporté leur contribution au futur Sommet des deux rives (24 juin 2019 à Marseille). 

Les participants ont insisté sur l'urgence d'agir face au changement climatique et à la dégradation de l'environnement dans la région. Ils ont notamment parlé du "développement d'une économie circulaire appliquée aux dimensions verte et bleue, la gestion durable de l'eau et l'assainissement, l'avènement des énergies renouvelables et l'action pour le climat dans le cadre de la transition énergétique". 
La discussion a porté également sur un partenariat nécessaire avec les jeunes pour la création d'emplois et l'économie sociale pour tendre vers une économie plus inclusive. L'UpM rappelle que "l’augmentation potentielle du produit intérieur brut de la région pourrait dépasser les 20 milliards d’euros à court terme, si le chômage des jeunes était réduit de moitié". 

L'autonomisation des femmes et des jeunes passe par l'importance de l'éducation. Le panel réuni dans la capitale catalane a donc discuter de nouveaux paradigmes d'apprentissage dans une approche holistique de l'éducation, de défis spécifiques à la formation professionnelle et d'une meilleure intégration des femmes et des jeunes dans les parcours éducatifs, technologiques, ingénieurs et mathématiques (STEM). 

Pour Nasser Kamel, secrétaire général de l'UpM, "ce dialogue régional sert de tremplin pour proposer des initiatives plus alignées et percutantes pour la Méditerranée qui répondront de manières adéquates aux défis environnementaux, sociaux et économiques." 

L'Union pour la Méditerranée s'est associée à plusieurs partenaires pour cette manifestation : l'Institut de la Jeunesse (InJuve), le Centre pour l'Intégration de la Méditerranée (CMI), l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), la Fondation Anna Lindh (ALF) et le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP).

Par Frédéric Dubessy - Source de l'article Econostruminfo

L’UE finance un atelier régional pour l'élaboration de rapports nationaux sur l'évaluation des cybermenaces






EU funds regional workshop to elaborate national reports on cyberthreat assessment

Un atelier régional sur l'évaluation des cybermenaces a été organisé du 8 au 10 avril à Rabat, au Maroc, dans le cadre du projet financé par l’UE CyberSud. L'événement a rassemblé 53 représentants de l’Algérie, de la Jordanie, du Liban, du Maroc et de la Tunisie.

L’atelier a mis l’accent sur les avantages pour les pays de rédiger un rapport national sur l’évaluation des menaces cybernétiques et leur a également donné l’occasion de partager leur expérience avec des experts en provenance de la France, la Roumanie, l’Espagne, le Royaume-Uni et les États-Unis. Chaque délégation s'est efforcée de formuler des suggestions sur les étapes à suivre pour élaborer des rapports nationaux sur les cybermenaces.

CyberSud est un projet conjoint de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe. Il contribue à la prévention et au contrôle de la cybercriminalité et d’autres infractions impliquant la preuve électronique dans la région du Voisinage Sud, en conformité aux normes internationales de protection des droits de l’homme et au respect de l’État de droit ainsi qu’aux bonnes pratiques.

Pour en savoir plus
CyberSouth – Page web

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Projet connexe
Le projet contribue à la prévention et au contrôle de la cybercriminalité et d’autres infractions impliquant la preuve électronique, en conformité aux normes internationales de protection des droits…

Réunion de la Fondation européenne pour la formation pour aider les pays voisins à améliorer la qualité de leurs systèmes d’enseignement et de formation professionnels

ETF

L’assurance de la qualité est un outil important pour garantir que l’enseignement et la formation professionnels (EFP) sont efficaces et pertinents. La Fondation européenne pour la formation (ETF) s’emploie à aider les pays voisins de l’UE à améliorer la qualité de leurs systèmes d’EFP.

Afin de stimuler la coopération et de favoriser le dialogue entre les pays voisins de l’UE, l’ETF a créé en 2017 un Forum pour l’assurance qualité. Il s’agit d’un réseau d’experts travaillant sur les questions d’assurance qualité.

La réunion du Forum a eu lieu du 10 au 12 avril 2019 à Tunis, en Tunisie. L’objectif de la formation était de renforcer les capacités des membres du Forum à évaluer par eux-mêmes et par les pairs la politique et les pratiques d’assurance qualité de l’enseignement professionnel, tant au niveau transnational que national.
L’événement comprenait des séances de formation formelle sur le processus de visite par les pairs et un processus guidé « d’apprentissage par la pratique » dans le contexte d’une visite pilote par les pairs. La formation formelle et non formelle était conforme au manuel d’orientation et de formation - document de travail du Forum de l’ETF sur les visites par les pairs.

Pour en savoir plus
Fondation européenne pour la Formation - Site internet

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Un projet financé par l’UE a organisé une conférence sur l’enseignement supérieur à l’attention des étudiants jordaniens et syriens

EU Jordan Syria

Les étudiants jordaniens et syriens de HOPES-Madad ont partagé leurs préoccupations, leurs ambitions et leurs projets d’avenir après l’obtention de leur diplôme dans le cadre d’une conférence régionale de deux jours sur l’enseignement supérieur. 

Plus de 110 représentants se sont réunis pour discuter des dernières réalisations, des solutions novatrices et réalistes en matière d’employabilité, d’apprentissage mixte et de solutions d’enseignement en ligne.

HOPES (Higher and Further Education Opportunities and Perspectives for Syrians – Possibilités et perspectives d’enseignement supérieur et continu pour les Syriens) est un projet régional doté d’un budget de 12 millions d’euros, financé par le Fonds régional d’affectation spéciale de l’UE en réponse à la crise syrienne. Il est mis en œuvre par le service allemand d’échanges universitaires (DAAD) en collaboration avec le British Council, Campus France et l’organisation néerlandaise pour l’internationalisation de l’éducation (Nuffic). Il vise à améliorer les perspectives des jeunes Syriens et à contribuer à la préparation de la reconstruction de la Syrie après la crise. Le projet entend améliorer l’accès des réfugiés syriens en âge de poursuivre des études postsecondaires, ainsi que des jeunes des communautés d’accueil touchées par l’afflux massif de réfugiés en Égypte, en Irak, en Jordanie, au Liban et en Turquie, aux opportunités d’enseignement supérieur et continu de qualité.

Pour en savoir plus

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La Tunisie deuxième membre africain du Forum international des transports


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La Tunisie a rejoint aujourd’hui, jeudi 23 mai 2019, en tant que membre permanent, le Forum international des transports (ITF) en tant que 60ème membre de l'organisation.

« L'ITF est la seule organisation intergouvernementale dotée d'un mandat mondial pour tous les modes de transport des pays de l'OCDE. Les ministres des transports des 59 États membres actuels ont élu à l'unanimité l’admission de la Tunisie à l'organisation lors de leur sommet annuel à Leipzig, en Allemagne. La Tunisie est le deuxième Etat africain qui rejoint l’ITF » a déclaré Hichem Ben Ahmed, ministre du Transport.

«Je suis convaincu que le forum fournira le cadre approprié pour le dialogue et la coordination entre les principaux acteurs du secteur des transports en vue d'une vision commune pour de meilleures performances en matière de transport et de logistique. Grâce à notre position géographique stratégique au cœur de la Méditerranée et notre position en tant que carrefour des principales routes du commerce maritime et aérien méditerranéen, notre infrastructure en évolution continue, et grâce à notre vivier d’intelligence et d’innovation, nous aspirons à nous positionner en tant que Hub économique régional et pôle méditerranéen du commerce et de services » a-t-il précisé à cette occasion.

Source de l'article Businessnews

"Je trouve la politique de la France en Méditerranée assez déconcertante"

Jean-François Coustillière se penche sur les périls de la Méditerranée  (photo : F.Dubessy)

A l'occasion de la publication de son livre "Périls imminents en Méditerranée"*, Jean-François Coustillière, président-fondateur de l'association Euromed-IHEDN, dresse un panorama peu optimiste de la situation régionale et s'alarme des réponses peu convaincantes de l'Union européenne et de la France.

econostrum.info
 : Comment expliquez-vous que la Méditerranée se trouve de plus en plus fragilisée ? 
Jean-François Coustillière : Les peuples arabes ont pris conscience en 2011 qu'ils n'étaient pas destinés à être soumis à des pouvoirs autoritaires. Les salafistes déploient leur influence qui débouche parfois sur le djihadisme visant à imposer la loi de Dieu. Les religions monothéïstes continuent d'apporter une argumentation à des affrontements de pouvoir et de soumission et enfin, les monarchies arabes se resserrent face aux républiques. Ce remaniement des situations intérieures explique cette fragilisation, mais pas seulement. 

Quels sont donc les périls imminents que vous décrivez dans votre ouvrage ? 
J-F. C. : Les périls imminents, ce sont d'abord les dégradations que l'on peut observer dans les pays du Sud de la Méditerranée, et qui, évidemment, ne me paraissent pas en voie de se résorber, ni même de s'améliorer. 
Je ne vois pas comment ces pays, déjà en grande difficulté et confrontés à une démographie croissante, pourraient avoir les moyens de redresser la barre et trouver un équilibre économique et politique leur permettant d'envisager un meilleur avenir. 
Second péril, la Méditerranée, contrairement à ce que disent beaucoup de personnes, redevient la zone d'affrontement des grandes puissances et des puissances moyennes qui en font un enjeu. Aujourd'hui, deux porte-avions américains se trouvent en Méditerranée. Je ne comprends pas, pourquoi ! Il n'existe aucun motif majeur pour le justifier. Sauf à imaginer une nouvelle intervention militaire. 
Nous voyons aussi la Chine qui avance ses pions sur le plan économique, la Turquie qui déploie son influence sur tous les pays du Maghreb, l'Arabie saoudite et le Qatar qui ne cessent d'investir des sommes faramineuses, notamment au Maghreb. Sans oublier la rivalité entre l'Iran et l'Arabie saoudite qui s'appuit sur celle entre les chiites et les sunnites. Le soutien au terrorisme et les conflits en découlant en sont l'expression la plus violente comme nous l'observons au Yémen, au Liban et en Syrie.

"L'UE a perdu sa capacité à jouer le rôle de stabilisateur de la région"

Jean-François Coustillière organise le 20 mai 2019 à Marseille les 
10e Rencontres de Cybèle (photo : F.Dubessy)

Comment expliquez-vous ce retour ? 
J-F.C. : Les Etats-Unis, convaincus de pouvoir exporter la démocratie, y compris par une politique violente de "changement de régime", sont conduits à multiplier les ingérences impérialistes. Dans le même temps, nous assistons à des tentatives de reconstitutions d'empire par la Chine, la Russie, voire d'autres encore. Tout ceci se trouve renforcé par des tensions et des conflits qui se multiplient en Libye, en Syrie, et viennent s'ajouter à ceux plus anciens comme l'affrontement israélo-palestinien, le problème du Sahara occidental, la partition de Chypre... Sans qu'aucun ne se résolve ! 
Le situation devient donc vraiment de plus en plus explosive. 

Quel peut-être le rôle de l'Union européenne et de la France ? 
J-F.C. : L'Union européenne est désorientée par l'émergence des populismes qui empêche la coordination des Etats membres. L'UE perd sa capacité à jouer le rôle de stabilisateur de la région. Elle doit également subir le développement du terrorisme sur son sol, mais aussi les mouvements migratoires qui enveniment les relations Nord-Sud. 
Quant à la France, je trouve sa politique en Méditerranée assez déconcertante, et surtout peu compréhensible pour nos interlocuteurs. Je ne peux que relever son suivisme de l'Arabie saoudite, sa faiblesse de réaction sur le dossier Iran, ses erreurs sur la Syrie, la réserve de ses relations avec la Russie et sa soumission aux Etats-Unis d'Amérique. 
Nous devons respecter nos valeurs, préserver notre indépendance, tout en coopérant sur des voies possibles de coopération ou de contribution à la résolution des conflits. Il faut défendre nos capacités autonomes d'action et adopter une stratégie claire qui soit compréhensible par tous.

"L'initiative du Sommet des deux rives s'inscrit dans cette démarche souhaitée"

Au-delà de ce tableau très pessimiste, n'y aurait--il pas des raisons d'espérer ? 
J-F.C. : Je crois que les raisons d’espérer résident dans toutes les situations où nos décideurs nationaux s’expriment avec détermination dans le respect de nos valeurs. Au risque même de déranger des puissances qui ne partagent pas complétement ces priorités. Les occasions ne sont pas si rares. Elles ne sont pourtant pas toujours mises à profit et on peut espérer que l’avenir permettra de démontrer que la défense de nos intérêts nationaux peut largement y gagner. 
L’initiative du « Sommet des deux rives » voulue par le Président de la République et programmée le 24 juin 2019 à Marseille, semble bien s’inscrire dans cette démarche souhaitée. 
Une autre voie d’espoir relève du devenir de l’Union européenne. Celle-ci, aujourd’hui divisée et affaiblie, n’a pas d’autres choix envisageable pour sa survie que de se renforcer et de se donner les moyens d’une puissance crédible sur le plan international. Elle aura alors, enfin, les moyens d’accompagner son environnement sud vers la paix et la prospérité pour son intérêt propre, notamment sécuritaire, mais également pour celui de toute la région euro-méditerranéenne. 

Propos recueillis par Frédéric Dubessy - Source de l'article Econostuninfo

* Entretiens avec José Lenzini (Méditerranées) et préface d'Antoine Sfeir. 232 pages - Editions de L'aube.

Réunion du Comité de pilotage du Programme Sud III en Tunisie

EU-funded South Programme III held bilateral steering committee meeting in Tunisia
La réunion du Comité de pilotage du Programme Sud III en Tunisie s’est tenue à l’invitation du ministère des Affaires étrangères le 11 avril 2019 à Tunis au siège du Ministère.

Cette réunion a porté sur les domaines d’intervention principaux du programme en Tunisie à savoir la consolidation de l’espace juridique commun, la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la contribution tunisienne aux activités régionales proposées par le Programme.

Ce fut également une occasion opportune d’examiner les synergies possibles entre le Programme et les deux programmes conjoints Union Européenne/Conseil de l’Europe qui viennent de démarrer en janvier 2019 en Tunisie, le « Projet d’Appui aux Instances Indépendantes en Tunisie (PAII-T) » et le « Amélioration du fonctionnement, de la performance et de l’accès à la justice en Tunisie (AP-JUST)».

L’objectif du Programme Sud III (2018-2020) est de garantir la durabilité des résultats acquis lors des deux phases précédentes en contribuant au renforcement des droits de l’homme, de l’État de droit et de la démocratie dans le sud de la Méditerranée, conformément aux standards européens et internationaux et selon une approche basée sur la demande. Le programme place au centre de ses priorités la lutte contre toutes formes de violence à l’égard des femmes. Le programme dispose d’un budget de 3 334 000 €, financé à 90 % par l’Union européenne et à 10 % par le Conseil de l’Europe, en charge de sa mise en œuvre.

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FEMISE organise un atelier sur l’entrepreneuriat social dans la région MENA

EU-funded FEMISE to hold workshop on social entrepreneurship in MENA region

FEMISE, en collaboration avec la « Royal Scientific Society », iPARK et CASE-Centre de Recherche sur la recherche sociale et économique, organise un atelier sur l’entrepreneuriat social (ES) dans la région MENA, sur son potentiel et ses obstacles et sur le rôle des acteurs de soutien financier et technique. 

Un accent particulier sera mis sur la manière dont l’ES apporte des solutions à la crise des réfugiés en Jordanie et au Liban.

Les participants à l’atelier « Entrepreneuriat social dans la région MENA : Potentiels d’inclusion et de croissance » discuteront d’un certain nombre de questions liées au rôle de l’entrepreneuriat social dans la région, notamment sur :
sa contribution à la résolution de problèmes les plus pressants dans les pays de la région MENA, notamment la crise des réfugiés en Jordanie et au Liban.
les principaux défis auxquels sont confrontés les entrepreneurs sociaux quotidiennement,
l’applicabilité de différents modèles d’entrepreneuriat social dans la région,
la création d’un environnement favorable qui faciliterait leurs opérations,
les moyens par lesquels la coopération transnationale et interrégionale pourrait induire un cercle vertueux pour l’émergence d’écosystèmes de l’entrepreneuriat social dans la région MENA.

Le FEMISE est une association qui reçoit des fonds de l’UE et qui entend contribuer au renforcement du dialogue sur les questions économiques et financières du partenariat euro-méditerranéen, dans le cadre de la politique européenne de voisinage et de l’Union pour la Méditerranée. Plus spécifiquement, le projet cherche à améliorer la connaissance des enjeux prioritaires dans les domaines économiques et sociaux et de leurs répercussions sur leurs partenaires méditerranéens dans le cadre de la mise en œuvre des accords d'association et des plans d'action avec l'UE.

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Forum Euro-méditerranéen des Instituts de Sciences Economiques (FEMISE) – Site internet

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Projet connexe
Le FEMISE (Forum euro-méditerranéen des instituts de sciences économiques) est un réseau d’instituts de recherche du nord et du sud de la Méditerranée qui promeut le dialogue et la recherche sur les…

L’UE soutient la coopération scientifique et technologique au Liban

EU Lebanon

La délégation de l’UE a signé début avril avec le Liban les termes du partenariat pour l’innovation et la recherche dans la région méditerranéenne.

Les solutions pour améliorer la disponibilité en eau de la production agricole durable sont au cœur du PRIMA (Partenariat pour la recherche et l’innovation dans la région méditerranéenne) au Liban.

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Préparer les forêts du futur en Méditerranée

Forêt méditérranéenne © Irstea

Avec une augmentation des températures et une baisse des précipitations au printemps et en été, la région méditerranéenne est particulièrement touchée par le changement climatique, et d’autant plus vulnérable aux incendies. De 1998 à 2017, la région a subi plusieurs séries d’années exceptionnellement chaudes et sèches.

Les scientifiques d’Irstea analysent la réponse des écosystèmes forestiers au changement climatique et aux incendies pour préparer les forêts du futur.

25 ans d’étude des écosystèmes méditerranéens pour anticiper

Entre 1995 et 1998, les chercheurs d’Irstea ont mis en place un dispositif d’observation de la végétation en Provence. Composé de 325 placettes – des surfaces localisées et délimitées servant à effectuer des inventaires des espèces végétales - il a permis de constituer une base de données pour calibrer un modèle simulant l’évolution de la végétation par rapport aux variations des conditions de climat et de sol. Ce véritable outil de prédiction permet de suivre les adaptations de la flore méditerranéenne face au changement climatique, et facilite ainsi le travail des gestionnaires et décideurs politiques.

Après la période de fortes sécheresses et canicules entre 2003 et 2007, les chercheurs ont réalisé en 2008, 10 ans après les premières mesures, une nouvelle campagne de terrain sur les différents sites. Elle a permis de vérifier l’exactitude du modèle développé à Irstea sur le comportement des végétaux en fonction de la disponibilité de l’eau, et a montré des variations entre 5 et 25 % de la composition de la flore : les espèces les plus exigeantes en eau ont été en partie remplacées par des espèces plus résistantes à la chaleur et à la sécheresse. « Cette observation de terrain renforce l’hypothèse que ces différences, plus marquées dans les milieux frais et humides, sont dues aux changements climatiques. Un nouvel inventaire en 2019 permettra d'affiner ces premiers résultats, et un suivi à long terme est programmé. Sur d'autres dispositifs similaires, la grande sécheresse de 2015-2017 fait apparaître des dépérissements massifs d'un nouveau genre dans les parties les plus sèches et chaudes, jusque-là épargnées, où les conditions deviennent insupportables même pour les espèces actuellement les plus résistantes », précise Michel Vennetier, spécialiste des forêts au centre Irstea d’Aix-en-Provence.

Pour faire face au changement climatique, les arbres ont deux options : migrer, en se disséminant par graines au-delà des bornes de leur territoire habituel vers des conditions environnementales plus clémentes, ou s’adapter à ce nouvel environnement. Cette adaptation se fait en avançant leur début de croissance au printemps, leur floraison et la maturité de leur fruit, en augmentant la profondeur de leurs racines et en réduisant leur hauteur, la taille de leurs feuilles et le diamètre des vaisseaux conducteurs de sève par exemple. Lorsqu’une espèce est incapable de migrer ou de s’adapter, c’est l’extinction locale, partielle ou totale. « Le pin sylvestre notamment est en grande souffrance : 50% des peuplements de cette espèce sont en dépérissement. Le chêne liège, le chêne blanc et le sapin sont également en forte régression en zone méditerranéenne. Le chêne vert et le pin d’Alep en revanche se portent bien, précise Michel Vennetier. La mortalité chez les arbres est cependant un processus difficile à comprendre dans le fonctionnement des forêts car plusieurs causes se conjuguent en général : la chaleur, le froid, la soif, la faim, les agressions (insectes, champignons, maladies), et parfois une gestion inappropriée ».

L’impact du changement global sur la végétation
Le changement global a un effet bénéfique et néfaste à la fois : la hausse du CO2 atmosphérique peut favoriser temporairement la croissance des arbres en facilitant la photosynthèse et en limitant les pertes d'eau, mais contribue au réchauffement climatique. Une température plus chaude allonge la saison de croissance mais peut accroître aussi la durée et l’intensité de la sécheresse en été et le risque de dégâts de gel en automne et au printemps, avec des effets défavorables. L’accessibilité de l’eau conditionne la composition de la flore méditerranéenne et sa répartition. La flore est inévitablement confrontée à des périodes plus longues de stress hydrique
Incendies et sécheresses répétés, une menace pour la forêt méditerranéenne

Le feu représente l’une des plus importantes perturbations subies par les écosystèmes forestiers méditerranéens, avec 600 000 hectares brûlés chaque année (10 000 ha en France). Au-delà de l’étendue des parcelles brûlées, les scientifiques se concentrent sur les effets des incendies sur le comportement des peuplements végétaux et la capacité de l’écosystème à se régénérer. Grâce au programme IRISE1 , coordonné par Irstea, on sait aujourd’hui que ce n’est pas un feu isolé qui détruit la forêt, mais la trop grande fréquence des incendies.

L’augmentation de la fréquence et de la durée des épisodes de sécheresse, tels que ceux subis entre 2003 et 2007, puis entre 2015 et 2017, conjuguée à une importante fréquence d’incendies, conduit à un effondrement du fonctionnement biologique de l’écosystème. Une sécheresse persistante après un feu ralentit, voire stoppe la régénération de la forêt. De la même façon, l’impact d’un incendie sur un milieu venant de subir une période de sècheresse prolongée est aggravé. Quatre années de sécheresses successives constitueraient ainsi un seuil critique dans la résistance de la forêt au feu. Le changement climatique, en intensifiant cette conjonction de feux et de sécheresses, fragilise par conséquent ces écosystèmes.

Incendie

50 ans pour gommer les effets d’un incendie

Dans les zones régulièrement incendiées, l’activité biologique du sol se concentre dans les premiers centimètres du sol, où se trouve l’essentiel de la matière organique, exposée à la combustion et à l’érosion. Après le passage d’un incendie, la plupart des paramètres physico-chimiques des sols forestiers retrouvent quantitativement leur niveau initial en 15 à 25 ans. Mais il faut attendre 50 ans pour observer une résilience globale de l’écosystème. En deçà de ce seuil, les communautés bactériennes et la faune du sol, éléments essentiels du processus de régénération, sont moins diversifiées et moins actives. Ce n’est qu’après 150 ou 200 ans sans feu que l’on observe un fort accroissement du stock de carbone dans le sol et un enrichissement de la structure et de la composition de la végétation.

Il suffit d’un seul feu pour interrompre ce processus de restauration, sans toutefois compromettre la capacité de régénération à long terme. Cette dernière n’est pas non plus affectée par un ou deux feux supplémentaires en 50 ans. Mais un quatrième feu sur cette période peut être fatal, ou deux incendies très rapprochés dans le temps (à moins de 10 ans d’intervalle). À ce seuil du "4e feu", on constate la raréfaction d’espèces et de communautés essentielles au fonctionnement de l’écosystème, ainsi que la diminution du stock de matière organique et de sa qualité. Alors que l’incendie a provoqué l’émission de grande quantité de CO2, la forêt n’est plus en mesure de garantir son rôle de puits de carbone, ce qui, in fine, contribue à renforcer l’effet de serre.

Ces connaissances offrent les moyens de dégager des priorités pour la gestion des forêts méditerranéennes : les zones ayant été soumises à plusieurs incendies récents, qu’un feu pourrait dégrader irrémédiablement, sont à considérer en priorité, en regard des forêts n’ayant pas brûlé depuis plusieurs dizaines d’années, plus résilientes. Les trop rares forêts âgées (plus de 150 ans) sont aussi à protéger à tout prix. En raison de l’importance que revêt le stock de matière organique du sol dans la résilience de la forêt, l’apport de compost pour reconstituer la fertilité du sol forestier et la dynamique du milieu devrait être envisagé dans les zones les plus fragilisées après incendie ou sécheresse.

D’une manière générale, afin de préparer les forêts aux changements globaux, et en particulier les forêts méditerranéennes déjà victimes d’importants dépérissements, les scientifiques préconisent un éclaircissement, un rajeunissement et une diversification des peuplements d’arbres. « L’éclaircissement au profit des jeunes arbres permet d’éviter la compétition entre individus et d’éliminer les vieux arbres, plus sensibles et moins adaptables aux changements. La diversification permet de planter ou favoriser des espèces qui assureront l’avenir », conclut Michel Vennetier.

Source de l'article Irstea

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1 - Ce projet pluridisciplinaire a réuni pendant 3 ans des scientifiques de 3 organismes de recherche – Irstea, CNRS, INRA – et de 3 universités des régions d’Aix-Marseille et de Lyon. Le programme IRISE (2005-2008) a été réalisé grâce au règlement européen Forest-Focus, relayé par le ministère français de l’Agriculture et avec le soutien de l’Institut fédératif de recherche "Pôle méditerranéen des sciences de l’environnement".

La Méditerranée positive se donne rendez-vous à Marseille


Pourquoi la France organise-t-elle un Sommet des chefs d’État et de gouvernement de la Méditerranée à Marseille ce 24 juin ?

Le 31 janvier 2018, un peu moins d’un an après son élection, le Président de la République avait annoncé lors d’une visite en Tunisie, son souhait de tenir en France un Sommet consacré à la Méditerranée. Emmanuel Macron a confirmé son intention lors de la Conférence des ambassadeurs à Paris le 27 août 2018. Il a surtout précisé deux choses importantes pour « retrouver le fil d’une politique méditerranéenne différente » : agir dans le format du dialogue 5+5, donc de la Méditerranée occidentale (i) ; impliquer fortement les sociétés civiles et la jeunesse dans ce nouveau processus (ii). C’est avec ces deux consignes que se prépare, depuis, ce Sommet dit des deux rives et qui a lieu à Marseille ce 24 juin 2019.

Il faut mettre en perspective l’événement dans le sens où la Méditerranée constitue un invariant de la politique étrangère de la France depuis très longtemps. Le président de la République suit donc une longue tradition dans laquelle notre pays cherche à peser sur les dynamiques de coopération multilatérale en Méditerranée. De multiples intérêts sont en jeu pour la France et pour l’ensemble des pays riverains de cette région. Pour le dire autrement, les défis sont tels qu’il est illusoire de les traiter séparément. Agir avec efficacité en Méditerranée passe nécessairement par des approches collectives et des projets fédérateurs. En outre, Emmanuel Macron est très attaché à la construction de l’Europe et attentif au futur de l’Afrique. Impossible alors d’ignorer le rôle de la Méditerranée comme interface entre ces deux continents. Sa centralité stratégique et les enjeux majeurs qui s’y concentrent appellent inévitablement des réponses. L’ambition de la France, c’est de les émettre dans une démarche inclusive et multi-partie-prenante. En somme, essayer de reprendre, de manière contemporaine, les intentions régulièrement formulées autour de cette idée politique de Méditerranée. Nous avons eu en 1995 le partenariat euro-méditerranéen, en 2004 la politique européenne de voisinage avec son volet Sud et en 2008 l’Union pour la Méditerranée. Ce qui représente une volonté de relance exprimée chaque décennie avec bien souvent Paris comme chef de file. Je précise que ces différentes politiques et initiatives mentionnées n’ont pas disparu depuis. Elles s’entremêlent et tendent parfois à créer de la confusion dans l’offre de coopération régionale. C’est à ce titre que j’ai souvent parlé de mille-feuille euro-méditerranéen et déploré le manque de synergies entre les actions entreprises. La Méditerranée n’est pas désertée, au contraire, elle déborde ! Trop d’initiatives, sur plein de sujets, avec des périmètres géographiques innombrables. Sur un plan purement stratégique, cela ne facilite pas la vision d’avenir et n’éclaire pas suffisamment les routes de la coopération.

En quoi ce Sommet de Marseille se distingue-t-il des éditions précédentes ?

Comme indiqué, il y a tout d’abord le format retenu : celui du dialogue 5+5. Créé en 1990, il rassemble 5 pays d’Europe du Sud (Espagne, France, Italie, Malte et Portugal) et 5 États nord-africains (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie et Tunisie). Il a pendant longtemps été centré sur les questions de défense et de sécurité, avec des résultats discrets, mais précieux. Ce dialogue s’est ensuite élargi à d’autres thématiques, preuve aussi que ce format à 10 avait parfois du sens et emporte la préférence des responsables concernés. Ces derniers sont visiblement enclins à mettre en avant la Méditerranée « occidentale » vis-à-vis des turbulences et des crises géopolitiques de sa version « orientale ». Quand bien même de réelles tensions existent dans la partie occidentale, à commencer par la relation complexe entre l’Algérie et le Maroc, il faut souligner à quel point le dialogue 5+5 n’est pas farfelu. Reste à voir jusqu’où il peut opérer, avancer et travailler réellement en associant chaque pays. Peut-être que l’un des objectifs à Marseille sera de mettre en avant la constitution d’un G10 méditerranéen. Cela ne doit pas empêcher d’avoir des « invités ». D’ailleurs, l’Allemagne est conviée le 24 juin au sommet des deux rives, comme le sont des institutions internationales (Union européenne, Banque mondiale, BERD, BEI et OCDE) et régionales (Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée et Fondation Anna Lindh sur les cultures) à Marseille, ce sera donc 10+8 ! Il conviendra de suivre, en fonction des annonces de ce Sommet et des suites qui en seront données, les réactions potentielles émanant de Grèce, d’Égypte ou de Turquie. Sans oublier les pays des Balkans ou ceux du Proche-Orient. La France fait le choix du 5+5. C’est audacieux, mais c’est aussi une ligne à défendre et à entretenir par la suite.

Ensuite, le Sommet des deux rives à Marseille se prépare avec un mode opératoire original, consistant à mobiliser les sociétés civiles des 10 pays. Un exercice innovant de consultation est lancé depuis quelques mois, avec la tenue de forums régionaux thématiques : « énergies » à Alger le 8 avril, « jeunesse, éducation, mobilité » à La Valette les 24 et 25 avril, « économie et compétitivité » à Rabat le 29 avril 2019, « culture, médias, tourisme » à Montpellier les 2 et 3 mai, « environnement et développement durable » à Palerme le 16 mai. Ces Forums ont vu se rassembler des centaines de participants issus d’associations, de la recherche, de la formation et de la coopération. Des entrepreneurs, souvent jeunes, ont également été actifs dans ces rendez-vous dont l’objectif était bien qu’ils suscitent de l’émulation collective autour de cette Méditerranée à faire vivre. Des centaines de projets ont été présentés et déposés sur la plate-forme qui collecte les propositions de la société civile. Il y a de tout, de l’inédit comme du réchauffé, de l’original comme du redondant, du fédérateur régional comme du projet local. Le tri et la sélection ne seront pas simples, mais il convient de louer cet état d’esprit engagé qui s’est exprimé en peu de temps. L’accent mis sur la jeunesse, dès le départ, a sans doute contribué à rendre très vivant et spontané le processus. S’il faut parfois reconnaître un peu de naïveté dans certaines propositions (car beaucoup de choses existent déjà ou qu’aucun financement supplémentaire pour ces projets n’est aujourd’hui sur la table…), l’exercice permet d’illustrer l’un des principes forts de cette nouvelle ambition : une Méditerranée positive existe !

C’est bien là aussi le troisième élément original du Sommet des deux rives : mettre l’accent sur cette Méditerranée ouverte et positive. Cela contrebalance la communication incessante sur les maux de cet espace, ses désordres ou ses violences. Il s’agit bien de révéler des solidarités de fait, des coopérations concrètes, des réseaux qui fonctionnent, des initiatives partenariales et des investissements humains, économiques et sociaux qui construisent au quotidien des passerelles entre les deux rives de ce bassin méditerranéen. Emmanuel Macron veut donner de la visibilité à tous ceux qui, de la société civile aux institutions en passant par les entreprises et les scientifiques, œuvrent pour une Méditerranée positive et ouverte. A ce titre, la constitution d’un groupe de 100 personnes (10 dans chaque pays), connues pour leur engagement et leur expérience en Méditerranée, entre dans ce schéma visant à associer au plus près les sociétés civiles à la définition d’un nouvel agenda positif pour la région. Ils se réuniront les 11 et 12 juin à Tunis pour un exercice de synthèse, « l’Assemblée des Cent », au cours duquel ils sélectionneront les initiatives et les propositions d’actions concrètes, pour ainsi les transmettre aux chefs d’État et de gouvernement du Dialogue du 5+5 pour leur Sommet de Marseille quinze jours plus tard.

Quels sont les autres enjeux pour ce Sommet ?

Au-delà des considérations déjà émises précédemment, j’en vois trois à ce stade. D’abord se pose la question de la présence à Marseille. Les situations politiques et gouvernementales sont loin d’être simples dans plusieurs pays et ne le seront sans doute pas plus dans un mois. Entre temps se tiennent les élections européennes. Deuxième enjeu clef pour ce Sommet : le contenu et les propositions. Des annonces fortes sont attendues en pareil exercice diplomatique. Les initiatives retenues et qui composeront l’Agenda positif devront être réellement méditerranéennes et multilatérales, concrètes et intelligibles, portant sur des sujets suffisamment stratégiques ou véritablement innovants. Mieux vaut, sans doute, peu d’annonces et d’initiatives, mais fortes, inclusives et développées dans la durée pour les mesurer. Troisième enjeu, la suite au soir du Sommet : quels financements disponibles ? Quels acteurs ou institutions pour soutenir cet Agenda et faciliter la mise en œuvre des initiatives ? A priori, il n’y a ni budget nouveau ni structure nouvelle à l’horizon. Le pragmatisme devrait donc amener l’Agenda positif de la Méditerranée à s’appuyer, en partie et si les sujets convergent, sur les dispositifs existants (institutions, réseaux, associations) qui fonctionnent dans un état d’esprit pleinement méditerranéen où la somme des diversités joue l’effet de démultiplicateur. Et si les moyens économiques ne sont pas au rendez-vous, le danger est de beaucoup décevoir, entre le déclamatoire et les mises en œuvre…

La promotion d’une Méditerranée soutenable, avec un nouveau narratif plus positif et plus inclusif, passe par cette voie médiane : innover sans renier l’existant ; mobiliser sans frustrer ; militer sans s’enfermer. La Méditerranée est un concept géopolitique. Il doit donc être promu et incarné. Il ne peut toutefois ignorer le contexte global, à la fois d’un monde interdépendant, mais tendu, et d’une région aux problèmes souvent communs, mais qui est terriblement fragmentée. La Méditerranée n’est pas un bocal, mais un espace ouvert sur la mondialisation, dans lequel le monde entier passe, investit et échange. La Méditerranée doit relever de nombreux défis qui se jouent des frontières nationales des pays riverains, exigeant forcément plus de jeu collectif. L’équilibre à trouver dans cette zone est assurément complexe et c’est aussi cette raison qui légitime ce Sommet des deux rives à Marseille : redonner un horizon, voir loin dans le temps et travailler ensemble pour réduire les incertitudes. C’est donc courageux de proposer un tel Sommet dans un tel contexte et de continuer à défendre l’idée de la Méditerranée contre vents et marées. Les circonstances l’exigent.

Par Sébastien Abis - Source de l'article IRIS France