Rabat, le lundi 10 septembre 2012 – Les médicaments génériques n’ont pas été les vedettes de l’été qu'en France. De l’autre côté de la Méditerranée, ces produits et les économies qu’ils permettent de générer étaient également au cœur des discussions (et pour tout dire de la polémique).
Le Maroc s’est récemment lancé dans une ambitieuse réforme de son système de santé, dont le lancement du Régime d’assistance médicale (RAMED), l’amélioration des prestations de l’Assurance maladie obligatoire (AMO) et la mise en place de la Politique pharmaceutique nationale (PPN) sont les principaux axes. A elle seule, la PPN a des airs de petite révolution : elle a en effet pour objectif un meilleur accès de tous les Marocains aux médicaments et projette pour atteindre ce but une diminution de leurs prix de 30 à 60 %. Le ministre de la Santé, El Hossein El Ouardi poursuit sa mission avec opiniâtreté, tentant de faire fi des nombreux obstacles sur son chemin. Une première victoire a été obtenue : la signature d’un accord avec les représentants de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP), Maroc innovation santé (MIS) et l’Association marocaine du médicament générique (ENMG). L’engagement des trois organisations ouvrait la voie à une baisse rapide du prix des produits de santé.
Exclus des négociations, les pharmaciens se rebiffent
Les pharmaciens d’officine pourraient cependant jouer les troubles fêtes. Particulièrement courroucés de ne pas avoir été consultés avant l’adoption du fameux accord, ils ont annoncé leur décision de quitter la Commission consultative des médicaments et des produits de santé (CCMPS) pour manifester leur désapprobation. De fait, la baisse drastique des prix envisagée par Rabat risque de porter un rude coup à l’économie officinale, notamment dans les campagnes. «Le pharmacien d’officine qui perçoit moins de 10 % de marge nette sur le médicament ne survivra certainement pas à une baisse non maîtrisée des prix » prophétisait sombrement fin août Aberrahim Derraji, pharmacien et fondateur des sites Pharmacies.ma et Medicament.ma, cité par le quotidien Le Matin.
Mêmes ingrédients, mêmes colères
Les rapports entre les pharmaciens et le ministère de la Santé se sont cependant radoucis ces derniers jours à la faveur d’une reprise des discussions. Cependant, ces dernières ne manqueront pas d’être ardues tant les revendications des officinaux sont nombreuses et délicates. Premier sujet capital : la progression de la marge. La Fédération nationale des syndicats de pharmaciens du Maroc (FNSPM) propose de mettre en place une marge dégressive en fonction du prix des médicaments (de 40 % pour les produits les moins chers à 10 % pour les plus onéreux avec une marge intermédiaire de 30 %, par exemple). Par ailleurs, au-delà de différentes revendications réglementaires et fiscales, le débat le plus houleux devrait porter sur le droit de substitution. Les pharmaciens souhaitent que soit dûment inscrite dans la loi la possibilité pour eux de proposer le générique équivalent en lieu et place du princeps prescrit. A l’instar de ce qui a été observé dans tous les pays où le sujet a déjà été soulevé (et désormais réglé), cette idée est loin de plaire aux médecins, qui s’opposent aujourd’hui à cette option. Mais, ils demeurent cependant ouverts au dialogue, puisque déjà le président du syndicat des médecins libéraux, Mohamed Naciri Bennami, cité par le quotidien l’Economiste suggère : « Pour dépasser cette polémique, il est possible d’introduire l’obligation de prescrire des médicaments en Dénominations communes internationales (DCI) ». Un petit air de déjà vu.
Par Aurélie Haroche
Source de l'article JIM
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