Le Centre des Etudes
Méditerranéennes et Internationales et La Konrad-Adenauer-Stiftung ont organisé
une Conférence internationale sur « Changements politiques et impacts sur
la sécurité dans la région de la Méditerranée » le 30 et 31 octobre 2012 à Tunis
Réfléchir sur une nouvelle
approche de la sécurité dans la zone méditerranéenne à la lumière des derniers
changements politiques, notamment le printemps arabe, tel est l’objectif du séminaire
de réflexion organisé, sur deux journées, depuis hier, à Tunis, par le Centre
des études méditerranéennes et internationales
et la Fondation Konrad Adenauer (KAS) regroupant d’éminents experts,
universitaires et chercheurs des deux rives de la Méditerranée.
C’est une
rencontre qui permet de décortiquer les différentes facettes d’un problème
sécuritaire qui, selon certains, est en train de s’aggraver avec maints risques
et menaces alors que d’autres le qualifient d’un passage obligé avec les
changements politiques enregistrés sur la rive sud qui coïncident avec un
moment de crise économique et sociale sur la rive nord. Cependant, tout le
monde est d’accord sur l’importance de la réforme des appareils sécuritaires
dans la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, et ce, dans l’urgence.
Pour le représentant permanent de la Fondation Konrad Adenauer, Hardy Ostry,
l’objectif est «la réforme des institutions existantes et le perfectionnement
vers des institutions qui sont soumises uniquement à la justice et à la
Constitution, qui agissent pour le compte du pouvoir exécutif». Selon lui, la
réforme du secteur de la sécurité est l’un des mots clés souvent employés, «qui
peut et parfois doit se présenter différemment suivant le contexte social». Il
a ajouté : «D’après les expériences que nous avons faites également en Europe,
ce processus doit être entamé vite et expressément afin de surmonter rapidement
un affaiblissement inévitable du secteur de la sécurité. Retarder cette tâche
pourrait avoir des conséquences imprévues pour l’avenir.
En outre, les
changements dans la région ont fait apparaître un vide dans de nombreux
domaines, dont profitent les groupes terroristes, tels qu’Al Qaïda, mais
également par des organisations sous forme de milices, qui peuvent être
considérées comme des partisans de l’ancien régime».
Une nouvelle stratégie de lutte
anti-terrorisme
Pour sa part, le directeur du
Centre des études méditerranéennes et internationales, Ahmed Driss, a affirmé
que la situation actuelle «a un impact sur la sécurité, ça c’est certain», mais
il ne croit pas qu’il y ait un changement profond de la stratégie européenne
par rapport à ses voisins du Sud. «La coopération sécuritaire existait entre
les pays de la rive nord et nos pays va continuer parce que nos gouverneurs,
que ce soit en Tunisie, en Algérie ou au Maroc, n’ont de choix que de coopérer.
On le constate dans le cas algérien particulièrement puisque l’Algérie
n’acceptait pas facilement la coopération avec des acteurs externes, disons de
la région pour contrer la montée des groupes terroristes. Aujourd’hui, elle
l’accepte volontiers et on voit déjà une stratégie qui est en train de se
mettre en place avec les Etats-Unis. Le reste du Maghreb accepte cette
coopération parce qu’il n’y a pas d’autres solutions puisqu’ils ne pourront
jamais faire face à cette menace terroriste car les groupes terroristes sont
basés dans une région qui est impossible à contrôler par les moyens dont
disposent les pays de la région», a-t-il ajouté. Selon lui, ce qui va changer dans
cette coopération nord-sud c’est qu’elle doit être en conformité avec la charte
européenne de lutte contre le terrorisme que les pays du Sud n’étaient pas
contraints à accepter ou à respecter. «La stratégie doit aujourd’hui aller dans
le sens de ne pas combattre le terrorisme à n’importe quel prix, mais le
combattre en respectant certaines règles relatives aux droits de l’Homme»,
a-t-il expliqué. Selon lui, la lutte contre le terrorisme se fait par les lois
antiterroristes mais aussi par le comportement des gouvernants, par la
facilitation de l’accès aux droits par la compréhension, la justice, l’égalité
et l’équité.
Entre pessimistes et optimistes
La situation sécuritaire dans la
région méditerranéenne est qualifiée par plusieurs chercheurs, dont Andreu
Bassols, directeur général Iemed à Barcelone, de critique et menaçante avec
notamment «l’émergence d’une force politique salafiste qui est une menace
sécuritaire». «On est dans une logique de conflit interne dans les pays, a
souligné Bassols, alors qu’on était dans une logique de conflit entre les
pays». Il a évoqué la crise économique que l’Europe est en train de vivre et
qui a causé une augmentation du taux de chômage, ce qui a rendu certains pays
«xénophobes» au phénomène d’immigration depuis les pays de la vive sud. «Il
faut qu’on fasse la part des choses et dire que les problèmes économiques n’ont
rien à voir avec les immigrés et que ce sujet ne doit pas être impliqué ou
exploité à des fins électoralistes», a-t-il enchaîné.
Selon lui, il est temps de
donner du contenu aux différentes conventions et initiatives existantes pour
relancer la coopération bilatérale, multilatérale et institutionnelle. Bassols
estime que s’il n’y a pas de croissance économique dans les pays en transition,
la transition démocratique sera en danger ainsi que la stabilité sociale.
Prenant la parole, Gerrit Chlomach, attaché parlementaire de Michael Gahler,
membre du Parlement européen, n’a pas apprécié «la vision pessimiste de la
situation de M. Bassols». «Je suis optimiste», a-t-il affirmé, ajoutant: «La
situation intra-européenne est plutôt positive.
On est attentifs à tout ce qui
se passe dans la région, notamment les élections, et au dialogue avec les pays
méditerranéens pour les assister dans la réforme de leurs propres systèmes
sécuritaires. L’Union européenne pourrait apporter son assistance à ces
réformes. Je suis très optimiste. Il n’y a pas de menaces sécuritaies mais il y
a des risques. On est prêts à accepter les risques pour avoir une stabilité sur
le long terme».
D’après lui, l’Union européenne doit suivre deux principes: la
solidarité et la subsidiarité pour aider les pays en transition, notamment la
Tunisie, à retrouver eux-mêmes le rythme de leur croissance économique, ce qui
affectera positivement la coopération nord-sud dans les deux sens. Il a affirmé
que l’UE est très active sur le plan relations étrangères, notamment en matière
de résolution des conflits régionaux. Le débat continue…
Par Nizar HAJBI – Source Centredes Etudes Méditerranéennes et Internationales
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