Lundi 20 janvier 2014 débute à Rabat un troisième round de négociations autour de l’ALECA, l’Accord de libre-échange complet et approfondi entre l’Union européenne (UE) et le Maroc. Ces négociations se poursuivront pendant quatre jours et porteront sur les apports de cet accord dont le but est de faciliter et fluidifier l’intégration de l’économie marocaine dans le marché intérieur de l’UE.
Toutefois, la conclusion de cet accord sera-t-elle sans engendrer quelques effets négatifs ? A quel point pourra-t-elle influer les questions économiques, sociales et environnementales liées au Maroc ? Et comment maximiser son bénéfice? Sous commande de la Commission européenne, le cabinet de conseil néerlandais «Ecorys» s’est prêté à l’exercice d’examiner ces différents aspects de l’ALECA. ALM a pu avoir en exclusivité les grandes lignes de ce document toujours en examen chez la Commission européenne.
Le tableau que dresse l’étude menée par ce cabinet mandaté par la Commission européenne demeure globalement rassurant mais ce fait n’empêche pas que certains secteurs en souffriront. En effet, l’ALECA devrait à long terme faire grimper le PIB du Maroc de près de 1,6% et le pouvoir d’achat des Marocains de 1,6 à 1,9%. Cette augmentation attendue en matière de salaires et celle qui en résulte, à savoir l’accroissement de la demande, feront en sorte que les prix des biens de consommation connaissent à leur tour une hausse de 0,4%.
En termes de gains attendus en revenu national, un ALECA apporterait au Maroc pas moins de 1,3 milliard d’euros, soit l’équivalent de 14,6 milliards de dirhams. Ce ne serait pas tout, l’étude en question démontre que la conclusion de l’ALECA aura un impact remarquable sur les flux commerciaux. Fait qui ne sera pas sans améliorer la balance commerciale du Royaume car avec un tel accord, les exportations connaîtront à long terme une augmentation escomptée de 15%.
S’agissant des importations, ce taux sera établi autour de 8%. Parallèlement à cela, qu’il s’agisse du commerce, des salaires, des prix des biens de consommation ou du PIB, cet accord n’aura pas une grande influence sur l’UE. Ladite étude démontre en effet que quoique les gains de l’UE suite à l’ALECA s’élèveront à 1,4 milliard d’euros, l’apport de ce dernier sur les créneaux précités avoisinerait même un zéro. Par ailleurs, si à long terme les effets macroéconomiques sont dans l’ensemble positifs, il existe des secteurs qui se verront dépassés par cette libéralisation.
On en cite principalement celui du cuir, le premier affecté par l’ALECA. Ce secteur demeure à l’heure actuelle peu structuré et la signature d’un accord de libre-échange complet engendrera une dégringolade de production de l’ordre de 3,6% à long terme. Mis à part le grand perdant qui est le cuir, l’alignement des mesures non tarifaires (MNT) du Maroc à celles de l’UE exposera le secteur de l’agriculture à une grande concurrence.
Au moment où le secteur des fruits et légumes en tirera un grand profit, les céréales et quelques autres cultures connaîtront une baisse de production estimée à 2,7 % à long terme. Les services, les TIC et le offshoring ne sont pas épargnés non plus. Ceci dit, d’autres secteurs fleuriront sous l’ALECA, notamment celui des machines qui gagnerait à long terme 8,5% de valeur ajoutée et il faut dire que la réduction des MNT y est pour quelque chose. L’un des secteurs agricoles les plus importants de par sa valeur ajoutée et des opportunités d’emploi qu’il crée est sans nul doute celui des fruits et légumes. Ce dernier est appelé à augmenter de 4%.
Il est sans rappeler que le Maroc est, à aujourd’hui, le seul pays méditerranéen concerné par l’ALECA. Cet accord est au centre de plusieurs négociations depuis avril 2013 et il est attendu que le troisième round de négociations qui se tiendra en début de semaine réunira les différentes parties concernées et abordera les services et les investissements, deux secteurs absents des dernières réunions.
Exportations : Le grand décollage
Les exportations marocaines connaîtront une belle augmentation suite à l’Accord de libre-échange complet et approfondi avec l’Union européenne (ALECA). Les chiffres en disent long. 89% pour les secteurs des équipements de transport, 71% pour le secteur des machines et 50% pour les véhicules automobiles. En effet, si l’on se base sur l’étude menée par le cabinet de conseil néerlandais «Ecorys» et qui a pour objectif de mesurer l’impact économique, environnemental et social de l’ALECA, la libéralisation des échanges sera bénéfique pour le secteur des autres machines qui connaîtra en valeur absolue la plus grande augmentation des exportations. Cette hausse est évaluée à plus de 3,3 milliards d’euros à long terme, ce qui avoisine les 37 milliards de dirhams.
Contrairement aux équipements de transport et machines, le secteur des services verra ses exportations flancher compte tenu de la concurrence ardue qui caractérise ce créneau. Pour ce qui est des importations, l’ALECA aura comme impact direct une augmentation générale allant de 5 à 15% dans l’ensemble des secteurs, exception faite de celui des énergies primaires.
Effets négatifs de l’ALECA : Comment les prévenir ?
L’analyse de l’ALECA identifie plusieurs impacts durables. Ces effets ne sont pas forcément en totalité positifs, d’où la nécessité pour le Maroc d’adopter plusieurs dispositions afin d’améliorer ou de prévenir les retombées liées à sa décision de conclure un ALECA.
C’est dans ce sens que le cabinet chargé de mener une étude sur cet accord a adressé un lot de recommandations à la fois au gouvernement, aux bailleurs de fonds, au secteur privé et à la société civile. L’étude recommande principalement de faciliter l’assistance technique et le renforcement des capacités dans le processus de rapprochement réglementaire, de consolider les capacités de modernisation sectorielle des entreprises, en particulier les PME ainsi que de stimuler des améliorations constantes du climat des affaires et de l’investissement.
L’accent a également été mis sur l’importance du renforcement du dialogue public-privé à travers des mécanismes bien structurés, le soutien du développement économique régional et local et l’amélioration de la gouvernance et la lutte contre l’économie informelle. Sur le volet économique tout comme celui du social, il est important que la réglementation suive.
De ce fait un rapprochement réglementaire au niveau sectoriel devrait être entamé au même titre qu’un soutien de la flexibilité du marché du travail. Le tout devrait se faire dans le souci de garantir les droits des travailleurs et le développement du système de protection sociale.
Attentes : Divergences chez les PME
Une enquête qui a été menée en ligne auprès des PME marocaines a montré que les entreprises sont aussi enthousiastes que frileuses quant aux effets de l’ALECA. Les PME jugent important l’apport de l’ALECA en termes d’amélioration de la production et de création d’emploi grâce aux exportations croissantes. Les sondés estiment également que les coûts de production connaîtront une baisse grâce à des importations moins chères et verront d’un bon œil le transfert de technologie que cet échange permettra.
Ces PME ont toutefois indiqué que les questions d’accès au marché européen, notamment la réglementation et les normes techniques, sont cruciales afin d’augmenter leurs exportations vers l’UE. Le manque d´accès au crédit et aux matières premières ainsi que les procédures douanières aux frontières ont également été relevés lors de ce sondage.
Source de l'article Aujourd'hui Maroc
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