La guerre qui ravage la Syrie depuis près de trois ans, ne serait pas seulement le résultat d'une révolte contre le régime de Bachar al-Assad, mais également le théâtre d'un conflit géopolitique gazier, selon Sami Nader, expert en matière énergétique.
Selon l'expert en matière énergétique Sami Nader, l'enjeu principal de la guerre syrienne ne réside pas dans les affrontements qui opposent les rebelles au pouvoir de Bachar al-Assad mais dans les manœuvres géopolitiques de la Russie, du Qatar et de la Turquie, qui s'affrontent sur la géopolitique du gaz.
Dans un entretien accordé à L'Orient-Le Jour, Sami Nader soutient que la solution de la guerre en Syrie serait à chercher dans une résolution du conflit gazier. Pourquoi la Russie s'acharne à soutenir Bachar al-Assad ? Que gagnent le Qatar et la Turquie à épauler les rebelles ?
La suprématie gazière russe en question
La Syrie est en effet au centre d'un conflit mondial dont le dossier du gaz est le vrai fond du problème. La position centrale du pays dans la région fait l'objet de toutes les convoitises. En effet, le potentiel de développement du réseau de pipelines suscite beaucoup d'intérêts, afin d'exporter les hydrocarbures d'Asie centrale et du Golfe. L'ouverture méditerranéenne de la Syrie fait de Damas un point de transit incontournable pour l'énergie dans la région.
Dans cette optique, deux projets de gazoduc s'affrontent : Southstream et Nabucco. Le premier consoliderait la suprématie russe en matière de distribution de gaz vers l'Europe. Il relierait les puits gaziers autour de la mer Caspienne sans passer par l'Azerbaïdjan et la Turquie. Le second projet contournerait la Russie. Nabucco permettrait ainsi de diversifier les sources d'approvisionnement énergétique de l'Europe.
Depuis quelques années, la Turquie et le Qatar planchent sur un gazoduc supplémentaire rattaché à Nabucco, qui prendrait source au Qatar et continue jusqu'en Turquie, en passant par l'Arabie saoudite et la Syrie. Le projet est rejeté par le gouvernement syrien en 2009, sous prétexte qu'il mettrait à mal les relations politiques et économiques solides entre Damas et Moscou.
L'influent Qatar
Dès le début du conflit, Bachar al-Assad reçoit le soutien de Vladimir Poutine et de Gazprom, qui souhaitent empêcher l'émergence de concurrents énergétiques trop entreprenants. De leur côté, les Qataris soutiennent les révolutionnaires rebelles. Ainsi, l'Émirat arme les rebelles à hauteur de 3 milliards de dollars, selon le Financial Times, en espérant que le nouveau pouvoir permettra au projet de pipe qatari d'être favorisé. Ce projet de rattachement à Nabucco donnerait au Qatar la possibilité d'éviter le détroit d'Ormuz, contrôlé par l'Iran.
Cette bataille énergétique n'explique pas tout dans le conflit entre sunnites et chiites à l'œuvre en Syrie mais elle est indéniablement un des clés du ballet diplomatique auquel on assiste depuis plus de deux ans. On voit bien depuis le début du conflit deux coalitions apparaître : Russie-Chine-Iran-Syrie d’une part, et la coalition Etats-Unis-Europe-Turquie-Qatar d'autre part. Elle met également en lumière le fait que le Qatar finance également des rebelles salafistes, émanation politico-religieuse de l'ennemi héréditaire saoudien.
Cette militarisation de l'opposition face à la répression effroyable du régime de Bachar al-Assad a fait basculer le pays dans une lutte armée qui semble avoir échappé à ses principaux acteurs, les manifestants pacifiques syriens, mais avec une influence étrangère de plus en plus importante, allant de la Turquie aux monarchies du Golfe.
Source de l'article AufaitMaroc
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire