Les
nouveaux acteurs politiques islamiques d’Afrique du Nord ainsi que plusieurs
institutions financières islamiques internationales participent depuis
aujourd’hui à la conférence « Economic Agendas of Islamic Actors », organisée
par l’IEMed.
Cette conférence vise à faire connaître les politiques chargées
d’assurer une transition économique réussie dans les pays du printemps arabe et
d’exposer quelles sont les priorités des nouveaux gouvernements, comment ces
derniers pensent promouvoir la croissance, le commerce et l’investissement,
dans quelle mesure ils veilleront à s’intégrer, du point de vue économique,
parmi leurs voisins arabes et l’UE ou à s’inspirer du modèle turc de
croissance, entre autres questions.
Albert
Carreras, secrétaire à l’Économie et aux Finances du Gouvernement de la
Catalogne, a assuré lors de l’ouverture du séminaire que le passage vers des
démocraties représentatives est un changement critique qu’il est impératif
d’opérer dans le cadre d’une bonne situation économique. C’est pourquoi il a
défendu la complémentarité entre les économies du nord et du sud de la
Méditerranée et a cité l’économie catalane, sa pluralité de secteurs au sein
d’une économie avancée et liée à la cohésion et au système de bien-être social,
comme exemple susceptible d’être intéressant pour les transitions économiques
en cours sur la rive sud de la région.
Lors
du premier débat de la conférence, modéré par Andreu Bassols, directeur de
l’IEMed, Abdeslam Ballaji, député du Parti de la justice et du développement et
président de l’Association marocaine d’études et de recherche en économie
islamique, a expliqué l’évolution politique du Maroc de ces dernières années et
a indiqué les principes des réformes politiques que, en matière d’économie, le
gouvernement, où son parti est majoritaire, souhaite entreprendre.
Pour
sa part, Ridha Chkoundali, conseiller économique d’Ennahda en Tunisie, a décrit
les grands axes de travail mis en place par le gouvernement de coalition
tunisien pour redresser la situation économique. Ils vont de l’orientation
exportatrice vers des pays autres que ceux de l’UE au soutien apporté aux
coopératives et aux associations locales, mesures destinées à favoriser le
développement dans de larges couches de la société, sans oublier la recherche
de l’investissement étranger pour les secteurs économiques à valeur ajoutée et
la diversification des sources de financement, qui comprennent la participation
des banques islamiques.
Pour
l’Égypte, Abdalhafez Elsawy, conseiller économique du Parti de la liberté et de
la justice du président Mohamed Mursi, a expliqué qu’après la révolution du 25
janvier 2011, le chômage et l’inflation ont augmenté alors que le tourisme – un
secteur clé de l’économie égyptienne – a baissé. Parmi les mesures que le
gouvernement de M. Mursi pense appliquer, il a souligné la lutte contre la
corruption et le soutien à apporter au secteur privé. Ces recettes devraient,
dans la nouvelle ère démocratique, permettre au pays d’approcher une croissance
comparable à celle de la Turquie, pays méditerranéen à la démographie
semblable, doté d’un système démocratique représentatif, et possédant un PIB
quatre fois supérieur à celui de l’Égypte.
Lors
du débat qui a suivi sont intervenus Albert Alsina (Fons Mediterrània Capital,
Grupo Financiero Riva y García), Anwar Zibaoui (coordinateur général d’ASCAME)
et Anthony Terence O’Sullivan (responsable de la division « Développement » de
l’OCDE). Ils ont insisté sur le besoin urgent qu’il y a à ce que les
gouvernements des trois pays arabes concrétisent leurs politiques économiques
et les mettent en application. En effet, la situation de pauvreté et de chômage
de leurs populations les oblige à obtenir à court terme de premiers résultats.
Les
grands principes des finances islamiques et leur rapport avec l’application de
la loi islamique ont été exposés pendant la séance suivante par trois experts :
Abderrahman El Glaoui, directeur pour le Maghreb de la Banque islamique de
développement ; Wadï Mzid, directeur d’agence de la Zitouna Bank (Tunisie) et
membre de l’Association tunisienne d’économie islamique (ASTECIS) et Adil
Alaoui, directeur de la société marocaine Dar Essaffa.
Les trois intervenants ont expliqué les
fondements et les concepts essentiels de la banque islamique (interdiction
d’obtenir des intérêts, de spéculer ou d’investir dans des domaines non permis
par le Coran, entre autres) et son parcours historique, de ses débuts, survenus
dans les années soixante-dix en Égypte, à sa rapide expansion de ces dernières
années, qui s’est traduite par l’implantation de plus de trois cent succursales
dans soixante-quinze pays. Ils ont tous les trois souligné le potentiel de
croissance des finances islamiques, conforté par une population d’1,5 billion de
clients musulmans possibles, et ont insisté sur l’attrait de ses produits,
socialement responsables, face à une banque classique entachée par l’ombre de
la crise économique et financière.
La
dernière session a servi à analyser diverses propositions de renforcement de la
coopération euro-méditerranéenne et entre pays arabes et acteurs islamiques. Y
ont participé Brahim Allali, conseiller du Centre islamique pour le
développement et le commerce islamique de l’Organisation de coopération
islamique, Hassan Malek, président de l’Association égyptienne pour le business
et le développement, et Mehmet Yalcintas, membre du comité de direction et
président de la Commission de recherche et de publications de l’Association
indépendante des industriels et des entrepreneurs de Turquie (MÜSIAD). Ils ont,
entre autres, défendu la complémentarité qui existe – et plus encore dans
l’actuelle situation de crise économique – entre la rive sud et est de la
Méditerranée et les pays européens, ainsi que la nécessité de progresser dans
le domaine de la formation et des secteurs technologiques et à valeur ajoutée
dans les pays méditerranéens et de promouvoir l’échange commercial sud-sud et
les petites et moyennes entreprises.
Source de l'article IEMed