L’UE doit faire une offre politique à la hauteur des révolutions engagées. Elle créerait ainsi des « dragons » économiques et démocratiques qui tireraient sa croissance et la sortiraient de son engourdissement.
Pour nombre d’intellectuels du Nord de la Méditerranée, le modèle européen présente ce que l’histoire, l’intelligence et la raison peuvent concevoir de mieux et d’exceptionnel. Cette vision n’est pas de nature à favoriser la compréhension de l’Autre car l’erreur est de laisser croire que ce modèle a été, en totalité, généré par les Européens au sens étroit du terme. La Méditerranée a été le ciment de l’Europe dont la civilisation et le modèle ont pour contributeurs les Grecs, les Romains mais aussi les Arabes. Ensemble, ils ont façonné la démocratie, imaginé le monothéisme, valorisé la raison, promu l’émancipation et la liberté individuelle devenues depuis des valeurs universelles. Et les révolutions actuelles dans les pays arabes laissent surgir l’aspiration à partager les mêmes valeurs au Nord et au Sud.
Une première vague en europe, qui a débuté dans les années 1980 et qui se poursuit, a permis d’élargir le périmètre de la démocratie. Après avoir chassé les dictatures au Portugal, en Espagne et en Grèce ; après avoir contribué à faire tomber le communisme et intégré les pays d’Europe centrale et orientale ; après avoir accompagné la modernisation de la Turquie dans la perspective de son adhésion, l’Union européenne a intégré la Slovénie, bientôt la Croatie et accepté les candidatures de la Macédoine, du Monténégro, de l’Albanie et de la Serbie. Un effort politique et financier sans pareil ! Ainsi se dessine un grand ensemble intégré de 500 à 600millions d’habitants (avec la Turquie) avec des pays associés comme la Norvège et la Suisse.
Une deuxième vague d’élargissement de la démocratie atteint la rive sud de la Méditerranée. Cette deuxième vague a touché d’abord la Tunisie et l’Égypte. Elle va avoir ses effets positifs sur l’ensemble des pays de la rive sud de la Méditerranée et au-delà en Afrique subsaharienne. À terme, plus rien ne sera plus comme avant : les libertés individuelles s’élargiront et les gouvernants devront tenir compte des aspirations légitimes de leurs populations. Mais ces révolutions au Sud interpellent les pays du Nord pour de profonds changements : plus de solidarité, plus de partage de la valeur ajoutée, plus de mobilité, plus de prise en considération du temps long. Une vraie convergence des civilisations pourrait se mettre à l’œuvre entre les pays du Sud et du Nord de la Méditerranée.
Alors que ces convergences vont être lentes, des questions à court terme imposeront des réponses précises et ambitieuses. Supposons que le futur pouvoir légitime de la jeune République de Tunisie issu des urnes se tourne vers l’Europe et dépose sa candidature à l’adhésion. Cela questionnerait les fondements de la construction européenne : culturels, méditerranéens et historiques ou simplement géographiques ?
Pour nombre d’intellectuels du Nord de la Méditerranée, le modèle européen présente ce que l’histoire, l’intelligence et la raison peuvent concevoir de mieux et d’exceptionnel. Cette vision n’est pas de nature à favoriser la compréhension de l’Autre car l’erreur est de laisser croire que ce modèle a été, en totalité, généré par les Européens au sens étroit du terme. La Méditerranée a été le ciment de l’Europe dont la civilisation et le modèle ont pour contributeurs les Grecs, les Romains mais aussi les Arabes. Ensemble, ils ont façonné la démocratie, imaginé le monothéisme, valorisé la raison, promu l’émancipation et la liberté individuelle devenues depuis des valeurs universelles. Et les révolutions actuelles dans les pays arabes laissent surgir l’aspiration à partager les mêmes valeurs au Nord et au Sud.
Une première vague en europe, qui a débuté dans les années 1980 et qui se poursuit, a permis d’élargir le périmètre de la démocratie. Après avoir chassé les dictatures au Portugal, en Espagne et en Grèce ; après avoir contribué à faire tomber le communisme et intégré les pays d’Europe centrale et orientale ; après avoir accompagné la modernisation de la Turquie dans la perspective de son adhésion, l’Union européenne a intégré la Slovénie, bientôt la Croatie et accepté les candidatures de la Macédoine, du Monténégro, de l’Albanie et de la Serbie. Un effort politique et financier sans pareil ! Ainsi se dessine un grand ensemble intégré de 500 à 600millions d’habitants (avec la Turquie) avec des pays associés comme la Norvège et la Suisse.
Une deuxième vague d’élargissement de la démocratie atteint la rive sud de la Méditerranée. Cette deuxième vague a touché d’abord la Tunisie et l’Égypte. Elle va avoir ses effets positifs sur l’ensemble des pays de la rive sud de la Méditerranée et au-delà en Afrique subsaharienne. À terme, plus rien ne sera plus comme avant : les libertés individuelles s’élargiront et les gouvernants devront tenir compte des aspirations légitimes de leurs populations. Mais ces révolutions au Sud interpellent les pays du Nord pour de profonds changements : plus de solidarité, plus de partage de la valeur ajoutée, plus de mobilité, plus de prise en considération du temps long. Une vraie convergence des civilisations pourrait se mettre à l’œuvre entre les pays du Sud et du Nord de la Méditerranée.
Alors que ces convergences vont être lentes, des questions à court terme imposeront des réponses précises et ambitieuses. Supposons que le futur pouvoir légitime de la jeune République de Tunisie issu des urnes se tourne vers l’Europe et dépose sa candidature à l’adhésion. Cela questionnerait les fondements de la construction européenne : culturels, méditerranéens et historiques ou simplement géographiques ?
Cette interpellation forte de l’Europe devrait l’amener à une double évolution refondatrice :
d’abord la création d’une avant-garde et d’un cycle d’intégration communautaire avec la mise en commun de la diplomatie, de la défense et des politiques économiques, autour du couple franco-allemand élargi à ceux qui le souhaitent, ensuite la formulation d’une offre conséquente et à l’élaboration d’un nouveau statut de membre associé à l’UE, comme le sont la Norvège et la Suisse. Être membre associé de l’UE, ce serait reconnaître une communauté de destin et de valeurs, un ancrage définitif et historique beaucoup plus attractif que ne le sont la zone de libre-échange proposée en 1995 à Barcelone, ou le voisinage ou même le statut avancé proposé au Maroc. Quoiqu’il en soit, l’UE doit faire une offre politique à la hauteur des révolutions engagées par les pays arabes. Ce faisant, elle créerait sur son flanc sud des dragons économiques et démocratiques qui tireraient sa croissance et la sortiraient de son engourdissement, voire de son déclin ! Sans réponse audacieuse, ces pays sud méditerranéens, profiteraient de la mondialisation en passant des accords privilégiés et différenciés avec les États- Unis, la Chine, mais aussi les puissances émergentes. Dans un troisième scénario, certains de ces pays s’installeraient dans l’instabilité, générant insécurité et foyers extrémistes aux portes de l’Europe.
Si l’Europe privilégie le statu quo, si elle ne bouge pas sur l’islam et continue à manipuler les peurs de ses populations, si elle refuse la mise en place de préférences collectives, si elle n’agit pas sur le conflit israélo-palestinien pour imposer une paix juste et durable basée sur les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, si elle renie ses propres valeurs, si elle a peur de l’Étranger et si elle refuse le redéploiement de son appareil de production au Sud, alors nous n’aurons aucune chance de construire la région méditerranéenne et constituer plus tard l’axe Europe- Méditerranée-Afrique. Mais si l’Europe impulse sa vision à long terme du monde multipolaire, tout peut rapidement évoluer.
Radhi Meddeb. Président d’Ipemed
Jean-Louis Guigou. Délégué général d’Ipemed
Source : http://www.ipemed.coop/spip.php?article831
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d’abord la création d’une avant-garde et d’un cycle d’intégration communautaire avec la mise en commun de la diplomatie, de la défense et des politiques économiques, autour du couple franco-allemand élargi à ceux qui le souhaitent, ensuite la formulation d’une offre conséquente et à l’élaboration d’un nouveau statut de membre associé à l’UE, comme le sont la Norvège et la Suisse. Être membre associé de l’UE, ce serait reconnaître une communauté de destin et de valeurs, un ancrage définitif et historique beaucoup plus attractif que ne le sont la zone de libre-échange proposée en 1995 à Barcelone, ou le voisinage ou même le statut avancé proposé au Maroc. Quoiqu’il en soit, l’UE doit faire une offre politique à la hauteur des révolutions engagées par les pays arabes. Ce faisant, elle créerait sur son flanc sud des dragons économiques et démocratiques qui tireraient sa croissance et la sortiraient de son engourdissement, voire de son déclin ! Sans réponse audacieuse, ces pays sud méditerranéens, profiteraient de la mondialisation en passant des accords privilégiés et différenciés avec les États- Unis, la Chine, mais aussi les puissances émergentes. Dans un troisième scénario, certains de ces pays s’installeraient dans l’instabilité, générant insécurité et foyers extrémistes aux portes de l’Europe.
Si l’Europe privilégie le statu quo, si elle ne bouge pas sur l’islam et continue à manipuler les peurs de ses populations, si elle refuse la mise en place de préférences collectives, si elle n’agit pas sur le conflit israélo-palestinien pour imposer une paix juste et durable basée sur les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, si elle renie ses propres valeurs, si elle a peur de l’Étranger et si elle refuse le redéploiement de son appareil de production au Sud, alors nous n’aurons aucune chance de construire la région méditerranéenne et constituer plus tard l’axe Europe- Méditerranée-Afrique. Mais si l’Europe impulse sa vision à long terme du monde multipolaire, tout peut rapidement évoluer.
Radhi Meddeb. Président d’Ipemed
Jean-Louis Guigou. Délégué général d’Ipemed
Source : http://www.ipemed.coop/spip.php?article831
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