Pour Jean-Louis Guigou, président-fondateur de l'institut de prospective économique du monde méditerranéen (Ipemed) qui milite depuis dix ans et plus pour un partenariat structurant entre l'Europe et le sud de la Méditerranée, le verbatim récent des propos du président de la République, ainsi que de son Premier ministre, ressemble à une sorte de « divine surprise ». Explications, par Jean-Louis Guigou.
En faisant des recherches sur les discours, débats et interviews d'Emmanuel Macron, concernant la Méditerranée et l'Afrique, j'ai fait une fabuleuse découverte.
Le 7 avril 2017, en pleine campagne présidentielle, dans une tribune publiée par le journal l'Opinion, le député Édouard Philippe et 23 élus de droite et du centre, ont clamé leur indignation devant « La Méditerranée, cette absence qui ne laisse rien présager de bon ». Édouard Philippe s'interrogeait et interpellait ainsi les candidats : « Qui formulera un projet faisant de la France le pivot de ce défi essentiel pour, excusez du peu, l'Europe, l'Afrique et le Moyen-Orient ? »
Et de poursuivre : « Encore faut-il que quelqu'un ait cette vision et nous propose de refaire de notre mer commune à nouveau un "axe du monde" ». Le même Édouard Philippe, se résignait : « Seul le candidat de la gauche radicale aborde régulièrement cette question, ce qui nous incite à saluer sa hauteur de vue, mais certainement pas à acquiescer à ses solutions ».
C'était ignorer que, de son côté, séparément, un autre candidat, Emmanuel Macron, prêchait pour une vision géopolitique historique, associant dans un partenariat ambitieux, l'Europe, la Méditerranée et l'Afrique. Le 1er avril à Marseille, Emmanuel Macron déclarait ainsi : « Nous allons refonder non pas une nouvelle politique de la Méditerranée simplement, nous allons refonder une route de la liberté et de la responsabilité qui ira de l'autre rive de la Méditerranée et qui traversera toute l'Afrique. »
Et de poursuivre, dans une interview accordée au quotidien Le Monde, le 23 avril : « Je veux établir un partenariat ambitieux entre la France, l'Europe, la Méditerranée et l'Afrique qui renforce nos intérêts mutuels dans tous les domaines : climat, commerce, emploi, innovation, mais aussi sécurité et stabilité. Aux côtés des relations entre États, ce partenariat s'appuiera sur les forces vives africaines et françaises : intellectuels, ONG, diasporas de France et d'Afrique, entreprises. »
Dans la lignée de Braudel, Mitterrand et De Gaulle...
À Beyrouth, à Alger, à Tunis, les discours d'Emmanuel Macron reprennent les termes clés de son projet : construire ensemble notre avenir, partenariat, défis communs, filières intégrées, colocalisations...
Ainsi, les deux visions d'Édouard Philippe et d'Emmanuel Macron sont similaires et complémentaires : ils veulent mettre le Cap au Sud. D'un côté, Édouard Philippe veut revenir à la vision braudelienne de la Méditerranée-monde, carrefour exceptionnel entre l'Europe, l'Asie et l'Afrique. De l'autre, Emmanuel Macron reprend et modernise la vision de François Mitterrand : « Sans l'Afrique, la France n'aura pas sa place au XXIe siècle ». Il reprend aussi les idées maîtresses du Général De Gaulle, qui affirmait en 1944, à Brazzaville « Il faut engager les colonies sur la route des temps nouveaux, c'est-à-dire, la voie du progrès de la liberté et de la responsabilité. »
Le bon Dieu fait bien les choses : Emmanuel Macron est devenu notre Président, Édouard Philippe son Premier ministre. L'Europe va être refondée, la Méditerranée intégrée, revivifiée, et l'Afrique associée. Comme le déclarait le président Macron lors de son investiture, le 14 mai à l'Élysée : « La géographie se rétrécit, le temps s'accélère. » Le moment est venu de bâtir ensemble notre XXIe siècle, avec nos voisins du Nord et du Sud, arrimer l'Afrique et l'Europe et redonner à la Méditerranée sa centralité.
La construction de cette grande région intercontinentale Europe-Méditerranée-Afrique n'est pas une vue de l'esprit. L'IPEMED y travaille depuis dix ans, mettant en évidence les tendances lourdes qui sont à l'œuvre (régionalisation de l'économie mondiale, coproduction, circuits courts...). L'impulsion politique du Président Emmanuel Macron et de son nouveau Premier ministre, Édouard Philippe, va permettre de passer de la vision à la stratégie et aux outils pour réaliser cet ambitieux projet.
Par Jean-Louis Guigou - Source de l'article La Tribune
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