Proposer, à côté de la masse informe d’images et de discours déversée par les médias sur le Maghreb et le Proche-Orient, un festival de cinéma qui déchiffre, met en forme et en perspective la réalité ou l’imaginaire de nos cousins méditerranéens devrait être déclaré d’utilité publique.
Les Rencontres Internationales des Cinémas Arabes, organisées par AFLAM, qui assument cette mission, ont dû comme tant d’autres lutter pour survivre. C’est donc toujours avec plaisir et soulagement qu’on accueille l’annonce d’une nouvelle édition, la 5e qui se déroulera du 21 au 26 novembre au MUCEM, à la Villa Méditerranée, au Cinéma Les Variétés et au Vidéodrome2. Richesse de la proposition : une trentaine de séances à Marseille et en région, plus de 40 œuvres, dont plusieurs avant-premières, des installations vidéos, des conférences, des restitutions d’ateliers de médiation, des café-ciné, deux résidences d’écriture, des échanges avec les invités. Occasion de découvrir le dynamisme et la pluralité des cinémas arabes d’aujourd’hui. À côté des longs-métrages, arrivent en force les web séries, voix de la jeunesse du Maghreb, d’Irak, de Syrie, de Jordanie, du Liban… Ces formats courts abordent, avec un humour décapant, tous les sujets « poils à gratter » : radicalisme, censure, sexualité comme le No Vaseline Fatwa deHicham Lasri, également invité pour son dernier long-métrage Headbang Lullaby.
Les Rencontres aiment le cousinage. Cette année il se fera avec la Grèce à travers son « weird greek cinema», un cinéma contemporain bizarroïde né avec la crise économique. On pourra (re)voir la comédie noire de Filippos Tsitos: Akadimia Platonos dans le cadre d’une journée commune avec Image de Ville et RISC. Comme les années précédentes, hommage est rendu à un réalisateur : ce sera le Marocain Ahmed Bouanani (1928- 2011). Un documentaire d’Ali Essafi évoquera La Septième Porte, Histoire du cinéma marocain entreprise par Bouanani, qui y réfléchit sur la mémoire de son pays, entamée, bousculée, déformée par le récit colonial et celui tout aussi falsifié du pouvoir mis en place après la fin du Protectorat. En présence de Touba Bouanani qui a largement contribué à la reconnaissance posthume de son père, on pourra voir quatre de ses films qui, chacun à sa façon, s’appuyant sur des recherches formelles contemporaines, se réapproprient le patrimoine. Autre réflexion sur l’imaginaire collectif et la Mémoire d’un pays, celle de la vidéaste Katia Kameli, dans Le Roman algérien à travers de vieilles cartes postales et des photos d’anciens journaux.
Les Rencontres s’ouvriront au cinéma Les Variétés avec un film palestinien présenté en avant-première : Wajibd’Annemarie Jacir (sortie nationale le 14 février 2018). À Nazareth, un père marie sa fille. Pour l’occasion, son fils exilé à Rome revient. Tandis que selon la coutume, tous deux distribuent les invitations au rassemblement festif, divergences et tensions remontent à la surface. Un film social, politique, humain « qui raconte une famille, une ville, une culture ». Une belle entrée en matière !
5e Rencontres internationales des cinémas arabes du 21 au 26 novembre
Divers lieux, Marseille lesrencontresdaflam.fr
Par Elise Padovani - Source de l'article JournalZibeline
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