Les médecins étrangers à la rescousse des patients français

De plus en plus de médecins étrangers viennent pallier le manque de praticiens en France. Nicolas Tabary, responsable du pôle chirurgie et anesthésie au CHI Poissy raconte.

Nicolas Tabary est responsable du pôle chirurgie/anesthésie depuis plus de dix ans.
Nicolas Tabary est responsable du pôle 
chirurgie/anesthésie depuis plus de dix ans.
Pourquoi rencontrez-vous la nécessité de recruter des médecins étrangers ?
Docteur Nicolas Tabary :  « L’anesthésie est une spécialité de garde, pénible, les horaires sont contraignants. La législation impose un repos de sécurité. Il faut donc dispose d’un nombre de médecins suffisant. Chaque nuit, à Poissy, ils sont trois par exemple. Cette spécialité ne souffre pas d’un manque d’attractivité, mais beaucoup de jeunes praticiens préfèrent aller dans le privé à l’issue de leur formation car c’est mieux payé.
De quels pays viennent les médecins étrangers qui travaillent à l’hôpital ?
Du Maghreb, pour la grande majorité, et particulièrement de Tunisie. Ils sont remarquablement bien formés dans ces pays et il existe des conventions, et une cohérence dans les études, entre les facultés françaises et maghrébines. Les étudiants suivent le même cursus, comprenant une partie théorique, une autre pratique. D’autres médecins viennent d’Afrique : Sénégal, Mali, Cameroun principalement – et des Pays de l’est : Bulgarie et Roumanie. Là, il existe des incertitudes sur la qualité de leur formation. Nous avons connu des déceptions.

Les médecins venus d’Afrique et des Pays de l’est sont-ils moins compétents ?
Cela dépend. Il nous est arrivé de rencontrer des soucis avec ceux qui avaient suivi l’intégralité de leurs études dans leur pays. À cela s’ajoute la barrière de la langue, principalement pour les Bulgares et les Roumains. Dans mon service, je compte deux médecins Bulgares, venus de leur initiative en France durant leur formation pour approfondir leurs connaissances. Ils sont restés pour fuir la corruption dans leur pays et bénéficier d’infrastructures de qualité. Et ils font un très bon travail.

Est-ce qu’il y a une évaluation à leur arrivée en France ?
L’Union européenne vérifie les compétences linguistiques des médecins en provenance d’un pays qui n’est pas membre de l’UE. Ensuite, à l’hôpital de Poissy, nous évaluons leurs connaissances avant de les laisser travailler en autonomie, comme pour un praticien débutant français. Ils sont toujours encadrés par des médecins seniors, pendant plusieurs années parfois. De plus, en anesthésie, le travail se fait toujours en binôme avec une infirmière expérimentée.

Constatez-vous des réticences de la part des patients de se faire soigner par ces médecins ?
Bien sûr, il y a des réflexions et des inquiétudes mais cela reste marginal. Poissy est une ville où la population est très mixte. Donc ce cas de figure se rencontre plutôt à Saint-Germain-en-Laye. Le problème vient surtout des difficultés de langage. Car le plus souvent les compétences sont équivalentes avec celles d’un médecin français. D’ailleurs, l’un des plus brillants médecins anesthésistes que j’ai rencontré durant ma carrière est un étranger qui a fini ses études en France. Il est parti travailler dans un autre établissement français depuis.

Est-ce qu’il arrive aussi que des étudiants français poursuivent leurs études dans d’autres pays ?
Oui, pour échapper au numerus clausus imposé à l’entrée des écoles. Avant c’était la Belgique. Les autorités de ce pays en ont eu marre de voir des médecins formés chez eux repartir en France. Elles ont donc légiféré pour endiguer le phénomène. Maintenant, c’est la Roumanie où les études sont payantes. C’est un système pervers. »
Source de l'article Les Nouvelles

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