La concurrence sur le segment des services de télécommunications classiques a contraint les opérateurs maghrébins à rechercher de nouveaux relais de croissance. L'Internet haut débit mobile est la première arme de cette deuxième bataille des télécoms dans la région.
Effet pervers
Les opérateurs de téléphonie mobile actifs au Maghreb ont largement remporté la première bataille des télécommunications qui consistait à démocratiser les services de télécommunications classiques comme les simples appels et les SMS dans la région. La preuve : à la fin 2012, le taux de pénétration de la téléphonie mobile s’est établi à 120% au Maroc, 118,6% en Tunisie et 102% en Algérie.
Effet pervers de ce succès fulgurant : le chiffre d’affaires moyen par utilisateur (ARPU, Average Revenue per User) de la majorité des opérateurs maghrébins a chuté à moins de 10 dollars par mois en 2011 contre plus de 20 dollars par mois en 2006. C’est que l’aiguisement de la concurrence impose de plus en plus aux opérateurs de baisser leurs tarifs pour grignoter de nouvelles parts de marché ou, du moins, stabiliser leur clientèle.
Pour tenter de renverser la vapeur, les opérateurs ont déjà engagé la deuxième bataille des télécoms au Maghreb, qui consiste à installer des réseaux de troisième génération (3G) permettant de commercialiser un large bouquet de services de télécommunications allant de l’Internet mobile haut débit à la visiophonie, en passant par la messagerie multimédia, la transmission des données, le contenu multimédia à haut débit...
Les enjeux de la convergence entre l'Internet et le téléphone mobile sont principalement la conservation des clients, constamment à l'affût des dernières innovations technologiques, et la diversification des sources de revenus des opérateurs.
La 3 G, enjeu de survie en Tunisie
En Tunisie, pays à la pointe des nouvelles technologies en Afrique qui a connu fin 2010 la première révolution Web 2.0 au monde, l'Internet haut débit mobile est devenu un enjeu de survie pour les opérateurs de téléphonie mobile. « Sans 3G, nous nous sommes sentis complètement désarmés face à nos concurrents qui siphonnaient nos clients grâce à leurs offres Internet haut débit mobile. Notre survie était menacée », affirme Taoufik Jelassi, président du Conseil d'administration de Tunisiana, le dernier opérateur à avoir acquis une licence 3G en Tunisie, en mai 2012. En dépit de sa part de marché de 52% sur le marché mobile, cette filiale du groupe qatari Qtel était contrainte d'emboîter le pas à Orange et à l'opérateur historique Tunisie Télécom.
Arrivée sur le marché en mai 2010, Orange Tunisie avait taillé les croupières à ses deux concurrents en mettant en avant les innovations technologiques que lui permet sa licence 3G et en introduisant l'i-phone sur le marché local. A la fin 2010, la filiale de France Télécom comptait déjà près d'un million d'abonnés (2,3 millions d'abonnés à la fin 2012).
Face à ce rouleau compresseur, Tunisie Télécom s'est empressé d'acquérir, en septembre 2010, une licence 3G pour un montant de 116 millions de dinars (72 millions de dollars). L'opérateur historique tunisien a préféré attaquer Orange sur le terrain des prix en lançant une offre 3G limitée à 25 dinars par mois contre 30 dinars pour l'offre d'Orange.
L'opérateur Tunisiana a, quant à lui, choisi de miser sur les innovations en lançant le routeur 3G/Wi-Fi qui permet de connecter jusqu’à 32 utilisateurs au moyen d'une seule clef 3G ainsi que des forfaits Facebook et visiophonie plafonnés ou prépayés.
Le Maroc surfe à plein régime
Au Maroc, où les trois opérateurs commercialisent l'Internet haut débit mobile, le nombre des abonnés aux services 3G est passé de 2,59 millions au 31 décembre 2011 à 3,273 millions une année plus tard, soit une augmentation de 26,37% en glissement annuel. Ces abonnés aux services 3G représentent désormais 82,73% du parc global des abonnés à Internet dans le royaume chérifien.
L'opérateur historique Maroc Télécom détient 47,22% de parts de marché, suivi par Méditel (34,68%) et Wana (18,1%). Mais les trois opérateurs continuent à se livrer une guerre de prix sans merci qui risque de diminuer leurs marges. Le prix moyen de l'Internet haut débit mobile a d'ailleurs connu une baisse de 33% en une année, passant de 51 dirhams marocains (5,98 dollars) par client et par mois à la fin 2011, à 34 dirhams (3,99 dollars) une année plus tard, selon les données de l’Agence nationale de régulation des télécommunications (ARNT).
Fin du monopole en Libye
En Libye, l'opérateur Libyana commercialise depuis 2007 des offres 3G limitées à un débit de de 384 kilobits par seconde dans quatorze villes du pays. Mais cette situation de monopole devrait s'achever en novembre prochain, date prévue pour le lancement de la clef 3G de l'opérateur Al-Madar, dont le débit pourrait atteindre 42 mégabits par seconde.
Dernier de la classe
L'Algérie est le dernier de la classe au Maghreb dans le domaine de l'Internet haut débit mobile. Le ministre algérien de la Poste et des Technologies de la communication, Moussa Benhamadi, a expliqué, le 11 avril, le retard pris par son pays par un « un souci d’équité entre les trois opérateurs de la téléphonie mobile en Algérie (Djezzy-Mobilis-Nedjma) qui impose d’attendre le passage de Djezzy dans le giron de l'Etat ».
En attendant la nationalisation de l'ancienne filiale de l'égyptien Orascom Télécom, Nedjma et Mobilis ont déjà commencé à s’équiper en matériel nécessaire pour adapter leurs infrastructures à la 3G.
Par Walid Khefi, pour le magazine Réseau Télécon No 62 - Source AgenceEcofin
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