Les Rencontres d'Averroès
Entre les interrogations sur le retour du califat et les spectacles de Live Magazine, les 22es rencontres d'Averroès ont également présenté une danse de la Libanaise Nancy Naous au Théâtre national de Marseille, La Criée.
Entre les interrogations sur le retour du califat et les spectacles de Live Magazine, les 22es rencontres d'Averroès ont également présenté une danse de la Libanaise Nancy Naous au Théâtre national de Marseille, La Criée.
« These shoes are made for walking » de Nancy Naous, présenté aux Rencontres d’Averroès de Marseille. |
Emmanuel Laurentin (producteur de l'émission La Fabrique de l'histoire et coproducteur des Rencontres d'Averroès), aux manettes de la manifestation pour la deuxième année consécutive, a souhaité concevoir les tables rondes de cette année comme un voyage: à travers l'histoire pour mieux comprendre ; mais aussi à travers les enjeux de la mondialisation et des rapports entre l'Europe et la Méditerranée; pour finir par un zoom sur les migrations, sujet d'actualité s'il en est. Avec en point d'orgue, le constat d'échec des accords de Barcelone qui, il y a 20 ans, posaient les bases d'un partenariat euro-méditerranéen pour un dialogue constructif entre les riverains sud et nord de la Méditerranée.
La première table ronde a embarqué l'auditoire «des frontières héritées au retour du califat». Les quatre intervenants, des chercheurs et des historiens, ont tenté de relire l'histoire contemporaine de la Méditerranée-Sud à l'aune des récents développements que connaît la région et notamment de la naissance et du développement du groupe État islamique.
Les trois tables rondes suivantes devaient développer les autres aspects liés à la thématique, et voir intervenir une dizaine de spécialistes dont l'économiste libanais Fouad Khoury Hélou. Mais les attentats qui ont endeuillé la France ont contraint les organisateurs à écourter la manifestation.
Un petit tour d'horizon donc de ce qui a pu être présenté.
En ouverture, un hors-série Marseille de Live Magazine, « le journal vivant sans papier ni écran ». Pendant plus de deux heures, ce nouveau média a offert un spectacle en 13 séquences – même pas superstitieux ! –, entre « entertainement » et information. Une quinzaine d'intervenants venant du monde du journalisme, de la réalisation vidéo, de l'architecture, de la recherche, de la photo, de la programmation, de l'informatique, de l'édition, de la bande dessinée, de la musique, de l'écriture, du droit, des réseaux sociaux... ont raconté leurs histoires méditerranéennes. Bien que non-comédiens, ils sont tous montés sur scène pour livrer un reportage «Live» sur un vécu ou une expérience. Drôle, surprenant, émouvant, aucun de ces récits n'a laissé indifférente une salle comble avec plusieurs centaines de spectateurs. À signaler que Live Magazine est une idée venue des États-Unis, et dont les présentations en France se comptent encore sur les doigts d'une main (trois présentations à Paris depuis les débuts il y a un an).
Dabké désossée
Pleins feux sur la scène contemporaine libanaise avec These shoes are made for walking, spectacle de danse signé Nancy Naous/Compagnie libanaise 4120.CORPS, avec Waël Kodeih à la composition musicale, Cynthia Zahar à la scénographie et Dalia Naous et Nadim Bahsoun, à l'interprétation. Avec ce nouveau spectacle, la chorégraphe Nancy Naous, encore une fois en complicité avec le musicien Waël Kodeih, se laisse porter par le foisonnement des questionnements liés aux événements. La performance qui s'est déployée sur la scène du Petit théâtre de la Criée avait pour but de secouer la torpeur qui pourrait nous saisir au regard des bouleversements qui chamboulent nos pays et nos sociétés. Le spectacle se nourrissant des danses traditionnelles, et notamment de la dabké, ici désossée, à l'image des corps fractionnés et des sons décomposés jusqu'à l'extrême comme pour en extraire toute énergie vitale..
Les Moultaka de Beyrouth en coffret
Ces Rencontres d'Averroès de Marseille ont été l'occasion pour l'association Shams – initiateur et producteur des Moultaka ibn Rùchd, petites sœurs beyrouthines des rencontres marseillaises – de présenter le coffret, tout frais sorti de l'impression, regroupant les actes des trois éditions (2012, 2014 et 2015) des Moultaka ibn Rùchd. Ces Moultaka organisés à Beyrouth en partenariat avec Transverscité/Marseille et Espaceculture (initiateur des Rencontres de Marseille) se sont attachés pendant leurs trois éditions à la pensée du philosophe et théologien, et se sont ancrés dans l'actualité sociale, culturelle et politique. « Publier les échanges de ces rencontres est un acte de construction et de mémoire que nous posons en espérant qu'il servira d'appui à des suites sous différentes formes qui restent à réfléchir, en lien avec les Rencontres d'Averroès de Marseille qui sont une référence essentielle », affirment les organisateurs des Moultaka.
Pour l'instant, les rencontres de Marseille semblent avoir été placées pour leur 22e édition sous une double malédiction : à l'annulation d'une partie suite aux attentats de Paris, vient s'ajouter une menace de fermeture. En effet, la ville de Marseille, principal financier de la structure Espaceculture organisatrice des Rencontres, a annoncé se désengager, pour des raisons de restriction budgétaire.
Une des rares portes de dialogue encore ouvertes sur la Méditerranée se voit ainsi brutalement menacée de clôture.
Rencontres d'Averroès ou Moultaka ibn Rùchd, autant d'affaires à suivre, de Marseille, à Beyrouth..
Par Aline GEMAYEL - Source de l'article l'Orient le Jour
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