Le Plan Solaire Méditerranéen est-il au point mort ?


Lancé en juillet 2008, à l’initiative du Président Nicolas Sarkozy, le Plan Solaire Méditerranéen est l’un des six projets phare de l’Union pour la Méditerranée laquelle regroupe 43 pays européens et méditerranéens et vise à relancer la coopération euro-méditerranéenne.

Pour mémoire, le Plan Solaire Méditerranéen est avant tout un projet politique et industriel d’envergure tendant au renforcement de la production d’énergie solaire du pourtour de la méditerranée (Maghreb et Moyen-Orient).

Son objectif est d’accroître l’utilisation des énergies renouvelables et de renforcer l’efficacité énergétique en méditerranée afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre et de réduire la vulnérabilité du système énergétique de chaque pays et de la région dans son ensemble.

Le Plan Solaire Méditerranéen prévoit notamment :
  • la construction de capacités additionnelles de production d’électricité d’origine solaire, d’une puissance totale de 20 Gigawatt à l’horizon 2020 ;
  • la consommation « locale » (par la région) de l’électricité produite dans le cadre du Plan et l’exportation d’une partie de la production vers l’Union Européenne, afin d’assurer, au mieux, la rentabilité des projets ;
  • le développement de mesures d’efficacité énergétique et de maîtrise de la demande d’énergie (avec un objectif de 20% d’économies d’énergie en 2020 par rapport à 2005) ;
  • l’instauration de cadres législatifs, réglementaires et institutionnels adaptés au développement massif de projets durables et rentables dans le domaine des énergies renouvelables et notamment solaires.

Le coût total du Plan Solaire Méditerranéen a été estimé entre 38 et 46 milliards d’euros pour la période 2009-2020.

La mise en place de celui-ci devait, en principe, se dérouler en trois étapes.
  • En 2008, les objectifs à atteindre ont été définis par les différents Etats.
  • Depuis 2009/2010, une phase pilote avec un « plan d’action immédiat » composé de projets pilotes a été lancée afin de tester les mécanismes réglementaires, financiers et institutionnels mis en place. En outre, un projet de plan directeur est actuellement en cours d’élaboration s’intéressant à la mise en place de cadres stratégiques et réglementaires favorables, au renforcement des soutiens financiers, à la modernisation des systèmes et des infrastructures de transmission, au développement industriel et à la création d’emplois ainsi qu’à l’amélioration du développement des capacités et du transfert de savoir-faire.
  • La phase de déploiement à grande échelle de projets d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique était initialement prévue pour la période 2011-2020.

 Mais face aux mouvements révolutionnaires, souvent qualifiés de « printemps arabes », qui ont secoués les pays du pourtour méditerranéen depuis décembre 2010, il convient de se demander si la réalisation effective du Plan Solaire Méditerranéen n’apparaît pas aujourd’hui compromise.

Tunisie, Egypte, Libye, Yémen, aujourd’hui Syrie. Les révolutions arabes ont dessiné un nouveau paysage politique sur les rives Sud et Est de la méditerranée et ont incontestablement bouleversé de manière radicale les acteurs, la structure et les ambitions du Plan.
De nombreux observateurs ont estimé que l’Union pour la Méditerranée et avec elle le Plan Solaire Méditerranéen étaient les premières victimes du printemps arabes en raison notamment de l’éviction du pouvoir de ses principaux piliers (Ben Ali en Tunisie et Hosni Moubarak en Egypte).

Il convient, selon nous, de tempérer cette vision.
En effet, si à court terme les différents processus de révolutions ont apporté leur lot de contraintes (baisse du rythme de l’activité économique, méfiance des investisseurs étrangers, développement des flux migratoires non maîtrisés et par voie de conséquence apathie de certains projets de l’Union pour la Méditerranée), à moyen terme, loin d’être un frein au développement des partenariats euro-méditerranéens, les révoltes arabes nous semblent au contraire inaugurer une nouvelle ère propice à la croissance des échanges commerciaux.

 En effet, la première des libertés, ex-æquo avec la sécurité, n’est-elle pas l’accès à l’énergie comme moyen d’émancipation.

Il faudra cependant, pour cela, que les projets tiennent compte des nouvelles attentes des sociétés civiles arabes issues des révolutions.
Ainsi, les différents acteurs du Plan devront désormais composer avec une nouvelle donne arabe émergente dans laquelle les projets solaires devront être motivés par le principe de co-développement et où la société civile aura probablement un plus grand rôle à jouer.

Ces changements devraient renforcer dans le futur l’intérêt des partenariats euro-méditerranéens.

La réalisation de projets de co-développement solidaire dans le domaine des énergies renouvelables devrait en outre, contribuer à régler, dans une perspective partenariale, certaines questions relatives aux rapports humains entre les pays du Nord et du Sud. En particulier, cela pourrait peut-être aider à résoudre la question des migrations de populations en dépassant une simple approche sécuritaire et en l’inscrivant plutôt dans une logique d’interdépendance en accordant la priorité à la formation de techniciens et ingénieurs locaux.

 Le co-développement devrait également favoriser le rapprochement des cultures et contribuer à réfuter les antagonismes grâce à l’introduction de plus de transparence dans les relations économiques entre les Etats membres et à la mise en place d’une stratégie « gagnant-gagnant » des acteurs économiques de chaque pays.

C’est dans cette logique que s’inscrit l’action du secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée, Fathallah SIJILMASSI qui tente aujourd’hui de relancer les projets de l’Union pour la Méditerranée. 
Pour prouver que les différents Plans adoptés en 2008 ne sont pas enterrés, ce dernier a promis, lors de la dernière réunion du Bureau de l´Assemblée Parlementaire de l’Union pour la Méditerranée (mars 2013), la mise en œuvre « d’une série de projets concrets au cours des prochains mois ».

Les travaux concernant le Plan Solaire Méditerranéen n’ont d’ailleurs jamais véritablement cessé. Le Projet de plan directeur du Plan Solaire Méditerranéen réalisé par le Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée après 18 mois de travail avec les différents intervenants (Commission européen, Ligue Arabe, Etats membres, institutions financières, etc.) a été présenté du 13 au 21 février dernier à un Comité conjoint d’experts nationaux.

L’adoption à l’échelon politique de ce plan directeur du Plan Solaire Méditerranéen est prévue pour décembre 2013.

L’Union Européenne souhaite également la relance des projets, et notamment du Plan Solaire Méditerranéen. Le Président du Parlement Européen, Martin SCHULZ a ainsi souligné l’importance « d’aller de l’avant dans ce sens pour donner un nouvel élan économique et plus d’investissement, qui profiteront aux pays des deux rives de la Méditerranée ».

Cette déclaration s’est doublée d’une promesse puisque ce dernier a ajouté que « les crédits alloués par la Communauté européenne pour développer les projets de l’Union pour la Méditerranée ne seront pas affectés par les restrictions budgétaires récemment décidées ».

S’il convient d’admettre que les révolutions arabes ont sans doute retardé l’avancement des travaux de l’Union pour la Méditerranée concernant le Plan Solaire Méditerranéen ainsi que les autres initiatives, il semble désormais qu’une nouvelle dynamique s’installe et que les différents acteurs souhaitent mener à bien ces grands projets initiés en 2008.
Par Frédéric Ichay  - Source de l’article Figaro Blog

Aucun commentaire: