La Chine, partenaire-clé de l'Egypte


Un parc d'attractions géant à quelques kilomètres des tombes antiques de la vallée des Rois et de celle des Reines ? Cette vision, à faire pâlir les archéologues, réjouit la presse chinoise et les autorités égyptiennes. 
La signature, le 12 avril 2012, d'un accord prévoyant "le don" par la Chine de plus de 14 millions de dollars à l'Egypte pour la construction d'un parc à thèmes à Louxor n'est que l'un des nombreux investissements chinois dans des projets de plus en plus variés et pharaoniques en Egypte.
 Le président égyptien Mohamed Morsi et le président chinois Hu Jintao à Pékin le 28 août 2012.
Poursuivant une coopération commerciale amorcée par Hosni Moubarak dans les années 1990, les Frères musulmans, désormais au pouvoir, se lancent à l'assaut des capitaux chinois avec une frénésie qui n'a d'égal que leur hâte de s'émanciper de la tutelle militaire et économique américaine. Au programme : la transformation du Sinaï en "Silicon Valley égyptienne", un réaménagement de la vallée du Nil par l'extension des terres agricoles, l'accès à Internet à haut débit et le développement de partenariats militaires. Projets pour lesquels la Chine est désormais un associé privilégié.

Les investissements chinois, qui atteignaient plus de 500 millions de dollars avant la prise de pouvoir de Mohamed Morsi, en juin 2012, vont augmenter. Les projets sont multiples : la construction prévue d'un train à grande vitesse entre Le Caire et Alexandrie, d'une centrale électrique au nord d'Assouan, d'une trentaine de silos à grains, d'une flotte de pêche en eaux profondes, d'une usine de dessalement d'eau de mer sur la côte méditerranéenne... Afin de soutenir ces efforts, le président Morsi, qui, en août, a consacré à Pékin sa première visite d'Etat hors du monde arabe, a annoncé son intention d'augmenter les vols entre les deux pays de deux à dix par semaine.

Ces projets s'appuient sur une détermination solide. Le volume des échanges commerciaux entre la Chine et l'Egypte a bondi, entre 2009 et 2011, de 5,5 à 9 milliards de dollars. Peu effarouchés par la perspective de l'arrivée des islamistes au pouvoir, les Chinois ont continué à investir en Egypte, alors que les capitaux du monde entier étaient en fuite. Pour la Chine, l'Egypte constitue un enjeu stratégique majeur.

Porte d'accès privilégiée aux marchés européen et américain, avec lesquels elle jouit d'accords préférentiels dont elle peut faire bénéficier les entreprises étrangères installées sur son sol, elle est aussi un relais essentiel vers les marchés d'Afrique et du Moyen-Orient. Au point qu'en 2011 les exportations chinoises dans le pays (7,28 milliards de dollars) auraient dépassé, selon l'ONU, le volume des exportations américaines (6,18 milliards).

Cette situation inquiète les Etats-Unis, préoccupés par la coopération militaire croissante entre les deux pays. Les Américains, soucieux de préserver l'accès privilégié de leurs navires de guerre au canal de Suez, voient d'un mauvais oeil la collaboration des avionneurs chinois et égyptiens qui fabriquent déjà ensemble des simulateurs de vol. Un câble diplomatique américain datant de 2009, révélé par WikiLeaks, s'inquiétait déjà, à la faveur de la visite d'un officier chinois sur une base aérienne égyptienne, de l'intérêt des militaires chinois pour les avions de chasse vendus par les Etats-Unis au régime d'Hosni Moubarak.
Par Claire Talon Le Caire, correspondance

Source de l'article LeMonde

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