Hollande réamorce le projet méditerranéen


La rencontre, vendredi à Malte, de dix pays de l'UE et du Maghreb, est loin de l'ambitieux projet d'Union pour la Méditerranée.

Le dialogue euro-méditerranéen revient sur l'écran radar de la diplomatie française. François Hollande sera vendredi à La Valette pour un sommet rassemblant cinq pays du sud de l'Union européenne (France, Espagne, Italie, Malte, Portugal) et cinq du Maghreb (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie). 
Ce «format 5 + 5», comme l'appellent les diplomates, remonte aux années quatre-vingt et se concrétise par des rencontres informelles plus ou moins régulières entre ministres de l'Intérieur, de la Défense ou des Transports. Mais aucun sommet ne s'était tenu depuis 2003, aucun surtout depuis la chute du Tunisien Ben Ali et du Libyen Kadhafi. L'après-printemps arabe et ses incertitudes rendaient urgent pour les Européens de réamorcer le dialogue avec la rive sud de la Méditerranée. La diplomatie, comme la nature, a horreur du vide. Aux premières loges, les Maltais ont beaucoup poussé en ce sens. L'intention, selon l'Élysée, est donc de «dire l'engagement» des pays du Nord «de maintenir une coopération méditerranéenne ambitieuse», en dépit des difficultés économiques et de la crise de l'euro. Les dirigeants du Maghreb ont répondu présent (l'Algérie et le Maroc dépêcheront leur premier ministre), ce qui est jugé à Paris comme un signe encourageant.
On est loin du flamboyant projet d'Union pour la Méditerranée (UPM), lancé en 2008 avec 43 participants, cette «magnifique idée pour organiser notre rapport avec le Sud», comme larmoie Henri Guaino dans son dernier livre (La nuit et le jour, Plon). Un grand chantier triplement mis à mal par les divisions européennes, le conflit israélo-palestinien et les révolutions arabes. Certes, des appels à la «refondation» ont bien été lancés, en son temps par Alain Juppé. Mais l'UPM, elle-même censée redonner vie au «processus de Barcelone» défaillant, est désormais en état de mort clinique, même si ses structures demeurent. La France a cédé sa coprésidence à l'UE, ce qui augure mal d'une impulsion politique pourtant nécessaire.

Une «Méditerranée de projets»
François Hollande reprend à son tour ces efforts de Sisyphe pour tenter de construire une «Méditerranée de projets», comme il l'a annoncé fin août. Certains estimeront la démarche réaliste, d'autres la jugeront minimaliste. Sur cette dernière ligne, le «5 + 5», avec son approche sectorielle, paraît adapté. «Ces réunions permettent d'envisager des ripostes collectives et méditerranéennes dans tous les secteurs, y compris celui du contrôle de l'immigration et de l'éducation, fondamentale dans les pays arabes en voie de démocratisation», relève Daniel Rondeau, ex-ambassadeur à Malte (aujourd'hui à l'Unesco), fervent partisan de la concertation entre les deux rives de la Mare Nostrum. La France avancera ainsi l'idée d'un «Erasmus de la Méditerranée» et poussera en faveur du développement de projets dans les énergies renouvelables dont le solaire. La défense, la sécurité, la coopération culturelle seront aussi sur la table.
Le «Club des dix» permet aussi d'échapper au point de blocage israélien. Il laisse en revanche en suspens l'hypothèque de l'Égypte, naguère pilier de l'UPM avec Moubarak (la Jordanie lui a succédé à la coprésidence Sud) mais dont les intentions demeurent floues. À Paris, on compte également articuler le dialogue euro-méditerranéen avec la diplomatie économique dans une région où les nouveaux interlocuteurs ont brouillé la visibilité sur les marchés. «Nous n'en sommes pas à la construction d'un véritable ensemble euro-méditerranéen. Mais on a le droit (ou le devoir) de rêver», positive Daniel Rondeau. 
Par Alain Barluet 
Source de l'article Le Figaro

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