En froid avec Tunis après l'attentat de Berlin, la chancelière obtient le renvoi de 1 500 migrants vers leur pays d'origine. Elle promet, en échange, une aide au développement et la création d’un centre de formation financé par l'Allemagne pour inciter les jeunes à rester sur place.
Ce vendredi, Angela Merkel était en voyage officiel à Tunis, où elle a pu rencontrer le président de la République, Béji Caïd Essebsi. L’occasion pour eux de sceller un accord migratoire. Ainsi, le projet d’installation d’un camp pour retenir les migrants cherchant à rejoindre l’Europe, évoqué en fin d’année 2016 par le ministre de l’Intérieur allemand, a été définitivement enterré. En lieu et place, la chancelière a annoncé la création d’un centre de formation professionnelle, qui sera financé par l’Allemagne. Il doit permettre aux Tunisiens expulsés d’Europe et à ceux qui seraient tentés par l’émigration de s’insérer plus rapidement et plus efficacement dans le circuit économique. Selon Merkel, les quelque 1 500 Tunisiens en situation irrégulière en Allemagne ont vocation à partir «volontairement» ou de «manière coercitive».
Trente jours pour confirmer ou infirmer une nationalité
La durée du processus d’expulsion a été au cœur des discussions. Et pour cause, le Tunisien Anis Amri, auteur de l’attentat de Berlin du 19 décembre qui a tué douze personnes, avait fait l’objet d’un rejet de son visa en juin 2016, mais faute de papier fourni par l’administration tunisienne, il n’avait pas pu être expulsé. Le nouvel accord oblige désormais la Tunisie à confirmer ou à infirmer la nationalité tunisienne d’un migrant illégal en trente jours. Une fois sa nationalité établie, la Tunisie a sept jours pour envoyer un passeport – souvent déchiré par le migrant à son arrivée en Europe – qui permet le processus d’expulsion.
Le président Essebsi a également annoncé l’arrivée d’un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur dans l’ambassade et les consulats de la Tunisie en Allemagne pour faciliter le travail d’identification des migrants. Une collaboration plus étroite entre les ministères des deux pays a également été annoncée. Rappelons que l’Allemagne a accueilli, toutes nationalités confondues, plus d’un million de migrants depuis 2015.
«Retrouver nos enfants pour le meilleur et pour le pire»
«Il ne s’agit pas seulement de renvoyer ces Tunisiens, mais de les aider à trouver des conditions de vie convenables», a assuré Angela Merkel. Le président tunisien a insisté sur la responsabilité pour le pays de «retrouver nos enfants pour le meilleur et pour le pire». A l’Assemblée des représentants du peuple, la chancelière a félicité les élus et les Tunisiens pour la «réussite» de leur révolution. Pendant ce temps, devant le Parlement, une quinzaine de militants de l’association No Border Tunisia se sont rassemblés avec des banderoles dans la langue de Goethe. «Nous voulons la libre circulation des personnes entre l’Europe et la Tunisie comme il y a la libre circulation des marchandises», a revendiqué Riadh Ben Ammar, militant de No Border Tunisia.
La délégation allemande, qui comptait le ministre du Développement et une douzaine de businessmen, a aussi promis une enveloppe d’aide au développement de 250 millions d’euros. Une somme destinée notamment à aider les jeunes à se former à un métier en adéquation avec les demandes du marché et à développer les zones rurales sinistrées économiquement. Merkel a par ailleurs rappelé que les 250 entreprises allemandes basées en Tunisie emploient 55 000 personnes. «Ce doit être un partenariat gagnant-gagnant», a insisté la chancelière. Mais pour ce qui est d’inciter ses compatriotes à se rendre en Tunisie pour les vacances, Angela Merkel a préféré ne pas répondre.
Par Mathieu Galtier - Source de l'article Libération
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