Depuis 2006, le think-tank IPEMED, Institut de prospective économique du monde méditerranéen, œuvre à rapprocher, par l’économie, les deux rives de la Méditerranée.
Une ambition nécessaire et une démarche inédite dans le but de contribuer à façonner un avenir commun dans la région. Par une approche inclusive, transversale et multidisciplinaire, mobilisant des centaines d’experts, de chefs d’entreprise et d’hommes politiques des deux bords de la Méditerranée.
Son fondateur et président, Jean-Louis Guigou, économiste, professeur d’Université et haut fonctionnaire français spécialiste de l’aménagement du territoire, en collaboration avec Pierre Beckouche, professeur des Universités, spécialiste des de géographie économique, consultant auprès de l’OCDE et expert associé de l’IPEMED, vient de publier un ouvrage « Afrique-Méditerranée-Europe : La Verticale de l’avenir », publié dans la collection L’âme des peuples aux éditions Nevetica.
De quoi s’agit-il ? D’une ambition. Celle d’un projet de régionalisation Afrique- Méditerranée-Europe porté depuis sa création par l’IPEMED. L’idée est celle d’une intégration régionale s’appuyant sur des liens capitalistiques Nord-Sud au moyen de quatre outils :
- 1/ Une Fondation visant à accélérer la transition économique des pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée et des pays subsahariens et assurant également l’intégration régionale,
- 2/ Une banque intercontinentale, dont le ressort serait l’ensemble de la région,
- 3 / Un traité régional de coproduction impliquant les organisations professionnelles industrielles financières ou de salariés,
- 4/ Une organisation économique efficiente, à l’image de celle des Etats américains (OEA)
Et peut-être conviendrait-il de rajouter un autre point, surmontant un autre handicap, celui de l’absence d’une institution de recherche regroupant les centres d’études d’Europe, de la Méditerranée et d’Afrique ; qui existent bel et bien, mais en ordre dispersé…
Jean-Louis Guigou observe que les vagues d’intégration régionale (l’ère des grandes régions Nord-Sud) existent depuis des années, notamment en Asie Orientale et Océanie (2,2 mds d’habitants, 21 000 mds de $ de PIB, 53% d’exportations intrarégionales – chiffres 2015, source Cnuced) et en Amérique (1 md d’habitants, 25 000 mds de $ de PIB, 56% d’exportations intrarégionales).
Les ententes commerciales en Europe, Méditerranée et Afrique sont loin d’être négligeables (2 mds d’habitants, 20 000 mds de $ de PIB et 77% d’exportations intrarégionales), mais souffrent d’un manque chronique d’intégration avec une multiplicité d’accords régionaux : UMA, CEDEAO, CEMAC, EAC, SACD, SACU, CCG, ACP…
L’Europe est incontestablement le plus grand exemple d’intégration régionale dans le monde, avec un taux d’intégration commerciale supérieur au trois-quarts, mais elle n’a pas réussi à valoriser les pays en développement de son voisinage.
L’Afrique ne reste pas à l’écart de ce mouvement des intégrations régionales. Mais, jusqu’à présent, cela prend la forme d’une juxtaposition d’institutions régionales concurrentes plutôt que d’une stratégie d’ambition continentale.
L’alternative est claire : ou bien la grande région Europe-Méditerranée-Afrique réussira son intégration régionale, ou elle se réduira à un objet de convoitise des deux autres dont nous observons les prémisses.
Le président français E. Macron a conscience des enjeux et vient de mettre en place un Comité présidentiel pour l’Afrique. Son ambition est de créer un axe intégré Afrique-Méditerranée-Europe et de favoriser l’arrimage des continents européen et africain avec au centre la Méditerranée.
M. Guigou remarque que la Méditerranée est devenue un dragon européen et que les implantations industrielles en Afrique du Nord sont profitables à tous, dans une finalité qui est le contraire des délocalisations. Il en veut pour preuve et exemple les réussites extraordinaires de l’industrie aéronautique marocaine à Casablanca (cf. le succès de l’International Marrakech AirShow, rendez-vous incontournable de tous les acteurs de l’industrie aéronautique mondiale) et de l’industrie automobile à Tanger, ou constructeurs et équipementiers automobiles démontrent la pertinence de l’intégration économique régionale entre les pays européens et les pays du sud-Méditerranéen.
Au choc des civilisations de Samuel Huntington, peut-être convient-il d’opposer la convergence des civilisations défendue par M. Emmanuel Todd, sachant qu’il est impératif que les Européens changent radicalement leur conception des rapports centre/périphérie et développent en association un modèle régional régulé, productif, solidaire et durable.
Par Didier Lacaze - Source de l'article Atlasinfo
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