Spécialisée dans les sujets sur le Moyen-Orient, cette agence de production, ancrée à Barcelone, est dirigée par des pros du reportage de guerre. Rencontre avec des hommes et des femmes passionnés.
L'équipe de BEW TV (Martin Cocher) |
Dans son village de Souleimaniye, au Kurdistan irakien, Kawsar, une jeune Kurde iranienne, s’entraîne à la kalachnikov. Puis, après un trajet en 4 x 4, on voit la jeune fille se placer derrière les sacs de sable du front et mitrailler une maison occupée par des islamistes. Ces images sont signées Sébastien Bouillé, pour France 24. Il est l’un des reporters de BEW TV (Between East and West), agence de production spécialisée dans les sujets sur le Moyen-Orient. BEW livre aussi des documentaires ou des reportages à France Télévisions, Arte, BFMTV, RTS (Radio Télévision Suisse), Planète... La société a déjà vendu 13 formats longs en seulement un an et demi d’existence. A sa tête, des hommes chevronnés comme le grand reporter franco-iranien Emmanuel Razavi.
La culture du reportage de guerre
Surprise, c’est à Barcelone, dans le quartier bobo de Sarrià, que cette start-up française s’est installée. Sur les murs des bureaux s’affichent les images des reportages tournés par les membres de l’équipe. Tous des baroudeurs passionnés. Emmanuel Razavi, homme élégant aux cheveux poivre et sel, termine une réunion avec ses associés, Sébastien Bouillé et Thomas Barbier. Il y a peu, Razavi chapeautait encore la rédaction des magazines de TVSDC, l’organisme de développement des chaînes nationales qataries. Il a aussi réalisé des reportages et des documentaires au Moyen-Orient, dont le célèbre "Ben Laden, les ratés d’une traque".
Pourquoi avoir choisi de s’installer à Barcelone ?
" Nous sommes comme les entrepreneurs français. L’Espagne est un pays facile en termes de business. Les chaînes de télévision sont simples à aborder : quand le projet plaît, on te dit oui en quarante-huit heures, et tu signes. En France, c’est quatre mois au minimum."
Et Sébastien Bouillé, grand brun barbu et souriant, de renchérir : "Paris ou la France ne sont pas la seule planche de salut pour les agences de prod hexagonales."
Prendre le contrepied de ce qui se fait
C’est en raison de sa situation géographique, à une heure d’avion du Maghreb, que le choix de la capitale catalane s’est imposé. C’est aussi le siège de l’Union pour la Méditerranée, organisme qui finance des projets dans les pays concernés. "Nous avons la culture du reportage de guerre, et avons tous vécu au Moyen- Orient", explique Emmanuel Razavi.
Les diffuseurs s’adressent à nous car nous savons de quoi nous parlons. Nous avons une réputation d’hyper spécialistes. Nous voulons montrer le vrai visage de l’Orient : il n’y a pas que des kalachs et des barbus, on y rencontre des gens éclairés, voire féministes."
Leur collaboratrice, Katia Clarens, ex-grand reporter au "Figaro Magazine", confirme. Pour Bew, elle a suivi Yasna, une Française partie en Syrie à la recherche de sa fille – "Jamais sans ma fille", diffusé sur France 2. Puis, pour "Arte Reportage" (1), des femmes cyclistes à Kaboul "La résilience est mon créneau, explique la journaliste. Montrer ces jeunes femmes qui se battent pour rouler à vélo, c’est positif, porteur d’espoir. Nous travaillons la plupart du temps dans des pays en guerre, mais même au milieu du chaos, il y a des gens fantastiques."
Pour BEW TV, l’Espagne n’est pas seulement la base arrière du Moyen- Orient, c’est aussi un acteur-clé des Etats du bassin méditerranéen, au contexte politique unique. Razavi explique :
Ce pays nous passionne. Je regrette que les télévisions françaises n’aient pas voulu d’un sujet de fond sur la politique espagnole alors que c’est un vrai laboratoire."
"Ici, on voit l’émergence de mouvements citoyens comme Ciudadanos et Podemos qui sont en train de mettre fin au bipartisme, constate Katia Clarens. C’est intéressant d’observer qu’en Espagne, la contestation se place à l’extrême gauche, pas comme en France. Nous sommes là pour réaliser un long documentaire sur Podemos." "Avec BEW TV, nous aimons prendre le contrepied de ce qui se fait ailleurs, conclut Emmanuel Razavi, amener d’autres codes de lecture."
Source de l'article TeleObs
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