En 2017, la Commission européenne va s’attaquer à un problème de taille : la surexploitation des stocks de poissons en mer Méditerranée.
"La surpêche en mer Méditerranée, c’est le prochain chantier de la Commission européenne", relate à Sciences et Avenir Stéphan Beaucher, expert pêche pour l’ONG The Pew Charitable Trusts.
Dans un entretien vidéo, le spécialiste en politique de gestion des pêches pointe du doigt la situation préoccupante des stocks de poissons en Méditerranée. "L’écosystème méditerranéen est à bout de souffle" : très nombreux dans cette mer, les navires de pêche se regroupent dans la bande littorale. Ils pêchent surtout dans les premiers 250 mètres de profondeur, "là où se concentre l’essentiel de la biodiversité marine". En Méditerranée, la surpêche est telle qu’on ne connaît actuellement pas d’outils pour remédier à cette situation. "On pêche quatre fois plus de poissons qu’on ne le devrait si on voulait que les stocks se reproduisent harmonieusement. Et c’est un taux moyen !" Parmi toutes les espèces pêchées, le stock méditerranéen de merlus figure parmi les plus surexploités : nous pêchons ainsi 12 fois trop de merlu dans le Golfe du lion. Pour limiter la surexploitation des stocks méditerranéens, la France devrait réduire son effort de pêche de 35 à 40 %... "Jusqu’à maintenant, les pouvoirs publics ont été totalement absents, déplore Stéphan Beaucher. Pendant très longtemps, on mettait la Méditerranée sous le tapis ; maintenant, on n’a même plus besoin de le faire : plus personne n’y pense !" A Bruxelles, les décideurs considèrent la Méditerranée comme "une cause perdue", selon l’expert en politique des pêches.
"Sortir d’une vision à court terme, inadaptée aux rythmes biologiques des espèces"
En 2017, la pêche dans cette région s’apprête à (enfin) devenir une priorité pour la Commission européenne, qui compte mettre l’accent sur la dimension sociale de cette activité économique. "Le but, ce n’est pas que la pêche en Méditerranée devienne un outil de génération de profits et de bénéfices importants, mais qu’elle nourrisse un maximum de personnes et qu’elle soit source d’emplois. En jouant sur cette composante-là, on devrait pouvoir rétablir la situation localement. Malheureusement, le coût social risque d’être important : il y a encore beaucoup trop de bateaux qui opèrent en Méditerranée". Face à ce constat, l’Europe met en place des plans de gestion sur plusieurs années, notamment dans le Golfe du Lion. "L’idée, c’est de sortir de la vision à court terme qui consiste à définir chaque année combien on va pêcher l’année prochaine" mais de définir des objectifs sur 5 à 10 ans. Une démarche "plus adaptée aux rythmes biologiques des espèces". En outre, le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) prévoit entre autres mesures des formations pour les pêcheurs et des démolitions de bateaux. Enfin, des actions portant sur le repos biologique permettront de suspendre la pêche en période de reproduction ou si une espèce devient vulnérable. Les stocks de poissons se remettront-ils un jour de la surpêche qu’ils subissent aujourd’hui ?
par Valentine Delattre - Source de l'article Sciences & Avenir
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