Plus d'une trentaine de délégations au niveau ministériel d'États membres de l'UpM étaient présentes à Barcelone, lundi 23 et mardi 24 Janvier, pour participer à ce deuxième forum régional de l'Union pour la Méditerranée au palais de Pedralbes, siège de l'institution.
L'ambassadrice Delphine Borione, secrétaire générale adjointe de l'UpM chargée des affaires sociales et de la société civile, détaille pour La Tribune le travail accompli par l'institution en faveur des jeunes et des femmes.
La Tribune - Sur les 47 projets de coopération régionale labellisés par l'UpM pour un montant de 5,5 milliards d'euros, combien concernent directement les jeunes et/ou les femmes ?
Delphine Borione - Nous avons choisi d'orienter notre action vers des projets concrets, qui ont un impact direct sur les populations, à travers trois objectifs prioritaires : le développement humain, le développement durable et la stabilité régionale.
La jeunesse est une priorité transversale dans ces trois composantes : 26 projets contribuent directement à renforcer le développement humain (éducation et enseignement supérieur, employabilité des jeunes, croissance inclusive et renforcement du rôle des femmes) et touchent plus de 200 000 bénéficiaires, dont 100 000 jeunes et 50 000 femmes.
Quelles actions vous paraissent les plus exemplaires ?
Pour donner quelques exemples, sur le plan de l'employabilité, nous avons lancé le projet « Génération entrepreneur » qui consiste en un programme de formation pour l'emploi et pour la création d'entreprises dont bénéficieront 79 000 étudiants d'écoles et d'universités d'Algérie, d'Égypte, de Jordanie, du Liban, du Maroc, de la Palestine et de la Tunisie, et qui devrait créer des opportunités d'emploi au travers de programmes de mentorat et d'incubation de startups.
En matière d'autonomisation des femmes, nous avons mis en œuvre huit projets qui visent la formation, l'accès au leadership, l'entrepreneuriat ou l'éducation. Le projet de l'UpM de « Former des citoyens responsables », mené par Ideaborn, vise à contribuer à la prévention de la violence contre les filles et les femmes par le biais de la mise en œuvre d'un programme d'éducation civique rénové au Maroc et en Tunisie.
Autre projet, « Développer l'autonomisation des femmes » promu par la Fondation des Femmes de l'Euro-Méditerranée, poursuit trois missions spécifiques : fédérer les acteurs et les actrices de l'égalité et les faire travailler ensemble sur un pied d'égalité ; favoriser la recherche académique et la réflexion prospective sur le genre et les femmes et, enfin, valoriser et soutenir les expériences et les projets de terrain.
Que préconisez-vous, au sein de l'UpM, pour soutenir les jeunes entrepreneurs ?
On observe sur les marchés du travail des problèmes structurels et un nombre restreint d'emplois décents et formels. « L'Initiative méditerranéenne pour l'emploi (Med4Jobs) » est un programme conçu par l'UpM pour répondre à ces enjeux. Conçue comme une initiative intersectorielle, elle se fonde sur des projets concrets au bénéfice en priorité des jeunes. L'un de ses axes majeurs d'action est l'employabilité, pour identifier et renforcer les expériences de formation visant à combler le décalage existant entre les compétences des travailleurs et les besoins du marché du travail dans la région. Nous développons aussi les infrastructures nécessaires au développement de l'activité des entreprises, telles que les pépinières d'entreprises et les programmes de coaching.
Autre exemple, celui du projet Maharat, qui forme les étudiants afin qu'ils soient prêts pour leurs futurs emplois, et les aide à créer leurs propres entreprises. D'ailleurs le secteur privé est impliqué dans l'ensemble du processus, notamment au sein des activités de formation.
Nous visons aussi la création d'entreprise auprès des jeunes femmes. Le projet « Jeunes femmes créatrices d'emploi » (AFAEMME) a permis de promouvoir l'auto-entreprenariat et l'esprit d'entreprise chez plus de 2 000 jeunes femmes universitaires au Maroc, Espagne, Tunisie, Jordanie, Liban et Albanie.
Où en êtes-vous avec l'essaimage de l'École de la deuxième chance en Méditerranée ?
En décembre 2014, le projet de réseau Med Nouvelle Chance - s'inspirant de l'École de la deuxième chance en Méditerranée de Marseille (E2C Marseille) - a obtenu la labellisation de l'UpM. Ce projet est développé en Algérie, Égypte, Espagne, France, au Maroc et en Tunisie. Il promeut un réseau régional de centres d'orientation, de formation et d'insertion professionnelle accrédités pour la mise en œuvre d'un modèle pédagogique commun et innovant, en vue de renforcer l'employabilité des jeunes diplômés sans emploi, ou ayant quitté le système scolaire sans diplôme.
Le soutien opérationnel de l'UpM s'articule autour de trois axes : accompagnement à la structuration du Réseau MedNC ; communication ciblée; appui technique de qualité pour la recherche de financement et pour la mise en place d'un mécanisme d'accréditation régionale.
Le Secrétariat Général de l'UpM s'est-il engagé sur la question de la facilitation de la mobilité des jeunes ?
La jeunesse méditerranéenne du XXIe siècle est l'une des plus connectées et des plus mobiles au monde. Les échanges Erasmus+ entre la rive Nord et la rive Sud de la Méditerranée ont concerné plus de 6 500 étudiants ces deux dernières années (2015 et 2016), 90 % des flux suivant une trajectoire Sud-Nord.
Renforcer la coopération régionale sur ces questions est une priorité pour nous. Nous avons ainsi lancé le 15 décembre 2016, avec nos États membres et les parties prenantes concernées, un processus de dialogue qui permettra de faire émerger de nouvelles initiatives régionales.
La mobilité académique a été placée, dès sa conception, au cœur du projet pédagogique de l'Université Euro-Méditerranéenne de Fès, créée il y a trois ans, et qui constituera un véritable pôle régional d'excellence pour tous les pays de l'UpM et au-delà, accueillant plus de 7 000 étudiants de toute la région et offrant un large éventail de programmes.
Mais la mobilité peut prendre d'autres formes. Le projet HOMERe met en relation les entreprises ayant des projets d'expansion ou de développement commercial en Méditerranée avec de jeunes talents de la région pour les accueillir en stage de fin d'études. C'est un exemple pilote qui a vocation à monter en puissance.
Depuis plusieurs années, au sein du Secrétariat général de l'UpM, vous portez aussi personnellement la cause des femmes et de l'économie sociale et solidaire (ESS). En quoi estimez-vous avoir avancé sur chacun de ces deux points ?
Mon engagement en faveur des femmes de la Méditerranée est parti d'un constat : on ne peut atteindre un développement équilibré sans la moitié de la population qui la compose. Investir sur les femmes en leur donnant leurs droits, c'est un impératif moral mais également une source de bonne économie. On ne pourra pas résoudre les problèmes de la Méditerranée sans les femmes car elles apportent une énorme valeur ajoutée. En effet, investir sur les femmes augmenterai le PIB de chacun des pays de 25% à 30%.
Il est donc prioritaire pour l'UpM de travailler au renforcement du rôle des femmes. Nous agissons à un niveau politique, avec la construction d'un agenda commun pour promouvoir le rôle des femmes.
Investir dans la contribution des femmes à la société est une réponse aux défis de la Méditerranée : c'est aussi ce que notre conférence de l'UpM, intitulée « Femmes pour la Méditerranée : moteurs de développement et de stabilité » a souligné avec force en octobre 2016. Les participants ont identifié des pistes concrètes pour renforcer le rôle vital des femmes en tant qu'agents de changement pour la région, dans les domaines aussi sensibles que la création d'emploi, le développement durable, la lutte contre l'extrémisme et les défis migratoires.
Et sur l'ESS ?
Sur l'ESS, nous avons plusieurs projets en chantier avec la Banque européenne de reconstruction et de développement, l'organisation internationale du travail et des associations comme l'IESMed, afin de développer ce secteur d'activité très prometteur. Il y a de nombreux emplois potentiels, mais également une possible réponse aux besoins des sociétés que ne peut pas toujours fournir les États.
Nous sommes ce facilitateur qui permet de réunir les États, les organisations internationales, la société civile et les acteurs privés.
Par Camille Ayral, - Source de l'article La Tribune
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