L'Union pour la Méditerranée est une manœuvre pour tenir la Turquie hors de l'Union européenne, juge le quotidien turc Milliyet. Mais Ankara pourrait tirer son épingle du jeu en profitant de l'initiative française.
L'Union pour la Méditerranée est une manœuvre pour tenir la Turquie hors de l'Union européenne, juge le quotidien turc Milliyet. Mais Ankara pourrait tirer son épingle du jeu en profitant de l'initiative française.
Il n'aura pas échappé à bon nombre d'Etats européens qu'avec ce projet d'Union pour la Méditerranée (UPM) la France voulait détourner Ankara de sa vocation européenne en l'orientant vers une adhésion à une autre organisation. L'Union européenne n'a d'ailleurs pas particulièrement apprécié que Paris tente par ce projet d'orienter à son avantage les équilibres en jeu dans la région de la mer Méditerranée.
C'est la raison pour laquelle l'Allemagne a contribué quelque peu à diluer ce projet. Il importait dès lors pour Sarkozy de sauver les apparences. Pour autant, la façon dont ce sommet – que la presse européenne a qualifié de "Club Med" – va prendre forme reste très vague.
Il semble ainsi qu'à l'instar du président algérien Bouteflika les chefs d'Etat sont surtout venus à ce sommet pour ne pas laisser la place à d'autres. Dès lors que l'objectif à atteindre n'est pas très clair, il n'y a de toute façon pas grand monde parmi ces chefs d'Etat pour manifester un véritable engouement vis-à-vis de ce projet.
Il n'y a vraiment qu'Israël pour s'enthousiasmer à l'égard de cette UPM, ce qui suffit d'ailleurs à semer le doute dans le monde arabe. La tentative de la France d'organiser une rencontre à Paris entre Bachar El-Assad et Ehoud Olmert – en s'appuyant sur les acquis des pourparlers entre Syriens et Israéliens réalisés grâce à la diplomatie turque – est tombée à l'eau.
Malgré cela, Sarkozy a encore réussi à sauver plus ou moins les apparences. Les diplomates français savaient en effet pertinemment bien que si la Turquie n'avait pas participé à ce sommet celui-ci aurait perdu de son âme. En effet, une UPM sans la Turquie n'aurait aucun sens. Comme l'a expliqué le ministre des Affaires étrangères turc, Ali Babacan, la France avait d'abord envoyé trois lettres d'invitation et dépêché trois envoyés spéciaux à Ankara avant que Sarkozy en personne ne soit finalement obligé de téléphoner à Erdogan. C'est dans ce contexte que les Turcs ont décidé de participer à ce sommet.
Quant à Bachar, qui avait refusé de rencontrer le Premier ministre israélien Ehoud Olmert, il a tout de même fait un cadeau à Sarkozy, fut-il minime, en acceptant d'officialiser des relations diplomatiques avec le Liban, empêchant par là que ce sommet ne fasse l'objet de caricatures trop sévères.
De toutes ces impressions, il ne faut pourtant pas en conclure que l'Union pour la Méditerranée est un concept vide de sens. Il s'agit effectivement d'une zone qui cumule de nombreux problèmes nécessitant une coopération accrue. Néanmoins, il semble difficile que la France, qui suscite davantage le doute que l'enthousiasme dans la région, puisse porter un tel projet. La Turquie a par contre beaucoup plus de chances de réussir dans ce genre d'entreprise.
Semih Idiz - Journal Milliyet - Courrierinternational.com -le 15 juillet 2008
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