Pour Fathallah Sijilmassi, secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée, les jeunes peuvent être le meilleur atout pour la stabilité et le développement de la région. Pour peu qu’ils soient entendus et accompagnés dans leurs difficultés.
Fathallah Sijilmassi, secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée / Massimiliano Minocri |
La Croix : Huit ans après la création de l’UpM, quel est le principal objet de ce deuxième forum régional réuni à Barcelone ?
Fathallah Sijilmassi : Ce forum, qui a réuni les délégations ministérielles des 43 pays membres, l’UpM entre dans une nouvelle et troisième phase de son existence et fait face à de nouveaux défis.
La première phase, de 2008 à 2011 a été celle du lancement mais aussi celle du doute, car la mise en œuvre de cette organisation intergouvernementale s’est heurtée à de nombreuses difficultés, la principale étant les blocages politiques qui existent dans la région.
Mais en 2011, ce que l’on a appelé les « printemps arabes » ont contribué à créer une nouvelle situation qui a convaincu les différents pays de la nécessité de dialoguer et de travailler ensemble, notamment à travers l’UpM qui s’est imposée comme l’espace incontournable de cette coopération régionale.
Durant la seconde phase, de 2012 à 2016, se sont tenues dix conférences ministérielles thématiques pour définir un agenda commun dans dix domaines stratégiques, des infrastructures à l’environnement en passant par l’énergie ou l’industrie.
Puis il a fallu faire en sorte que les sociétés civiles et les acteurs de la coopération s’approprient cet agenda pour faire en sorte qu’il débouche sur des projets concrets, des actions de terrain qui impactent la vie des gens.
Quel en a été le résultat ?
F. S. : Quarante-sept projets ont été labellisés par l’UpM dont vingt-cinq ont déjà été lancés touchant au développement humain – formation, emploi, promotion des femmes, etc. – au développement durable – villes, accès à l’eau ou aux technologies numériques entre autres.
Mais là encore, cette phase de production a coïncidé avec la montée en puissance négative du terrorisme et des migrations irrégulières. C’est dans ce contexte que les ministres des États membres se sont réunis, en novembre 2015 – une première depuis la création de l’UpM – pour mandater le secrétariat général de travailler à une nouvelle feuille de route qui répondrait à ces défis.
Je me félicite que ce deuxième forum ait été l’occasion d’adopter, à l’unanimité, cette feuille de route qui se prononce pour un triple renforcement : du dialogue politique, de l’intégration régionale et des capacités d’action de l’UpM, en particulier de son accès aux moyens financiers qui permettront d’amplifier son efficacité.
Ce deuxième forum a aussi été l’occasion pour l’UpM de réaffirmer que la jeunesse euro-méditerranéenne était au cœur de ses priorités. Quel est le problème ?
F. S. : La jeunesse n’est pas un problème mais un atout pour la région. C’est le message principal que nous souhaitions faire passer à travers cet événement.
Souvent, on présente la jeunesse du Sud sous le prisme de la radicalisation ou de l’immigration illégale. Ce sont des problèmes réels et graves, mais qui ne doivent pas occulter que des millions de jeunes euro-méditerranéens souhaitent d’abord étudier, travailler, entreprendre et apporter leur contribution à la société.
Voilà pourquoi nous avons tenu à inviter à ce forum plusieurs des bénéficiaires de nos projets, pour qu’ils puissent témoigner de leurs difficultés, mais aussi de leurs attentes et de leurs espoirs. Je suis persuadé que si nous savons les écouter et les accompagner dans leurs besoins, ils seront un facteur clé pour la stabilité et le développement de la région.
C’est en tout cas le sens des initiatives que nous avons déjà développées comme, par exemple, le projet HOMERe. Lancé par des Français, chefs d’entreprise ou conseillers au commerce extérieur, il vise à mieux connecter les universités et le marché du travail en développant les stages en entreprises.
C’est le type de projets que ce deuxième forum régional va permettre d’amplifier. Je viens ainsi de signer, au nom de l’UpM un accord avec l’agence suédoise de coopération internationale qui s’engage à verser 6,5 millions d’euros pour développer des programmes en faveur de l’emploi des jeunes.
Vous avez été nommé au secrétariat général en 2012 et votre mandat se termine en mars 2018. De quoi êtes-vous le plus fier ?
F. S. : La fonction que j’occupe invite à l’humilité, car le secrétariat général de l’UpM ne fait que mettre en œuvre les décisions prises par les États membres. Nous sommes la main au service de la volonté politique. Mais lorsque je quitterai ce poste, j’espère pouvoir dire que je laisserai à ma ou mon successeur, une institution qui a à son actif un bilan car nous avons produit du contenu et dessiné une vision pour l’avenir.
Je sais qu’il y a encore des débats autour de l’UpM en tant qu’institution. Certains se demandent si c’est le bon format, le bon cadre pour le partenariat Euro-Méditerranéen. À ceux-là, je réponds que l’UpM a prouvé, dans la durée, son utilité et son efficacité. Les pays du Sud ont besoin d’action, leur jeunesse attend des réponses concrètes. C’est ce à quoi l’UpM a tenté de répondre en travaillant à semer des graines pour assurer l’avenir de la région.
Par Antoine d’Abbundo - Source de l'article La Croix
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