Avec des Européens bien placés dans le commerce et l’investissement, l’Algérie semble avoir du mal à aller chercher de nouveaux partenaires économiques. Les statistiques officielles sont, à ce titre, édifiantes.
Huit des dix premiers clients de l’Algérie étaient des Européens en 2015. Ils sont aussi quatre dans le top 5 de nos fournisseurs. Près de 60% de notre commerce extérieur se font avec le vieux continent.
Au fil des ans, la dépendance de l’Algérie vis-à-vis de l’Europe en tant que marché s’est même aggravée puisque en dix ans (2005-2010), l’Europe est passée d’une part de 55% à 68% dans la structure de nos exportations. En revanche, en tant que fournisseurs, d’autres partenaires ont émergé réduisant de ce fait la part de l’Europe qui est passée de 60% à un peu plus de 50% durant la même décennie. Pendant cette période, la Chine a supplanté la France et redistribué les cartes sur le plan commercial, multipliant quasiment par deux la part du continent asiatique dans la structure des importations algériennes qui en représente aujourd’hui le quart. Mais le vieux continent se maintient. Près de 40% des importations algériennes de services l’ont été à partir de l’Europe en 2014, soit près de 3,5 milliards d’euros, selon Eurostat, l’organisme européen en charge des statistiques.
Les pays arabes et africains ont, quant à eux, du mal à se frayer un chemin, leur part ayant certes doublé mais reste bien marginale puisqu’ils ne représentent à eux deux réunis que 6% dans la structure des échanges globaux de l’Algérie contre 3% en 2005.
En matière d’investissements directs étrangers, l’Algérie est étroitement liée à l’Europe qui représentait sur la période 2002-2015 plus de 55% des projets d’investissements déclarés au niveau de l’Agence nationale de développement des investissements (ANDI), selon les statistiques de cette dernière.
Des projets qui font du continent le premier créateur d’emploi en Algérie sur cette période avec une part de près 60% dans l’ensemble des emplois à créer par les investisseurs étrangers. Mais au fil des années, l’Europe s’est vu challengée par les pétrodollars des monarchies du Golfe (voire graphe 1). Entre 2013 et 2014, les flux sortants d’IDE européens vers l’Algérie ont baissé des deux tiers, selon Eurostat pour atteindre à peine 0,7 milliard d’euros. Le stock des IDE européens en Algérie sont de plus de 14 milliards d’euros. Ce qui est à noter, en revanche au cours de la même période, c’est que le stock d’IDE algériens vers l’UE a, quant à lui, doublé pour atteindre près de 2 milliards d’euros (voir graphe 2). En 2014, le groupe Cevital avait finalisé le rachat de deux entreprises français Fagor-Brandt et OXXO pour des investissements de plusieurs millions d’euros.
Ce sont pourtant les pays arabes qui dépensent le plus en investissements en Algérie. Même si leurs projets ne sont à l’origine que de 30% des emplois, les montants alloués à l’ensemble des projets déclarés entre 2002 et 2015 représentaient plus de 50% des investissements étrangers. Entre 2011 et 2013, le premier investisseur étranger en Algérie était le Qatar avec un montant de près de 530 millions d’euros, soit plus que les investissements de la France et des Etats-Unis annoncés durant la même période. L’acquisition quasi-totale de Wataniya Telecom par le Qatar Telecom en 2012 a largement contribué à la performance du petit émirat (selon un rapport sur les IDE en Méditerranée de l’agence Anima). Les Qataris ont aussi investi pour la réalisation d’un complexe sidérurgique à Bellara, alors que le fonds d’investissement émirati Aabar est associé dans un projet de fabrication de véhicules militaires.
Globalement, l’industrie, les services et le BTPH sont les principaux secteurs qui intéressent les investisseurs étrangers avec une part de plus de 90% dans l’ensemble des projets, plus de 85% des emplois créés et plus de 80% des montants déclarés.
La France, qui se veut pourtant un partenaire majeur en Algérie, ne comptait à la fin de 2014 qu’un stock d’IDE de 2 milliards d’euros, soit moins de 10% du stock d’IDE de l’Algérie. Dans la région Afrique du Nord, l’Algérie n’est que la troisième destination française. Selon les statistiques officielles françaises, le Maroc concentre 56% des IDE français en Afrique du Nord, devant l’Egypte avec 21% et l’Algérie avec 13%.
Les IDE français en Algérie sont principalement réalisés dans les activités financières et d’assurance (37%), l’automobile (15%) et les industries extractives et pharmaceutiques avec (9%). Les Etat-Unis, qui restent peu présents en dehors du secteur énergétique, ont investi plus de 5 milliards de dollars dans les hydrocarbures depuis les années 1990. Ces derniers mois, des projets sont cependant annoncés dans le domaine de l’agriculture, du machinisme agricole, de la biotechnologie et des matériaux de construction avec pour objectif de grappiller quelques parts de marché en dehors des sentiers battus. Globalement, l’ensemble du continent américain n’est à l’origine que de 16 projets déclarés à l’ANDI sur la période 2002-2015 pour à peine 65 milliards de dinars.
Percée
Quant à la Chine, sa présence grandissante est non seulement perceptible en Algérie ces dernières années, mais dans toute la région de lAfrique du Nord. La Banque africaine de développement notait dans un rapport datant de 2012 que cette tendance s’inscrit dans la continuité de «la montée en puissance de la Chine dans le commerce et l’investissement mondial». Les investissements chinois en Afrique du Nord représentaient autour de 15% des flux d’IDE vers l’Afrique en 2007. Ils représentent cependant moins de 3% des investissements étrangers globaux de ce pays en 2012. L’Algérie n’en captent que 0,3% (China’s economic presence in Algeria, Thierry Perrault, chercheur au CNRS, janvier 2015).
Grâce aux contrats dans le secteur ferroviaire, le bâtiment et les hydrocarbures, l’Algérie est devenue le plus gros pays d’accueil de la communauté chinoise en Afrique du Nord, selon la BAD. Ainsi, en 2007, la valeur des contrats signés entre des entreprises publiques chinoises et l’Algérie était la plus élevée en Afrique et la cinquième dans le monde. Parmi les investissements réalisés, des contrats d’exploitation et d’exploration dans le pétrole et le gaz, la construction d’une raffinerie à Adrar, et l’extension du réseau ferroviaire. Avec la Chine, le continent asiatique était à la fin de 2015, selon les chiffres de l’ANDI, le troisième plus gros investisseur étranger en Algérie après l’Europe et les pays arabes.
Safia BerkoukAvec des Européens bien placés dans le commerce et l’investissement, l’Algérie semble avoir du mal à aller chercher de nouveaux partenaires économiques. Les statistiques officielles sont, à ce titre, édifiantes. Huit des dix premiers clients de l’Algérie étaient des Européens en 2015. Ils sont aussi quatre dans le top 5 de nos fournisseurs. Près de 60% de notre commerce extérieur se font avec le vieux continent.
Par Safia Berkouk - Source de l'article El Watan
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