La dynamique foncière dans les villes
méditerranéennes : évolutions, acteurs et gouvernance
The real estate dynamic in Mediterranean cities: evolutions, actors and
governance
* * *
Résumé
Depuis
les années 1980, les conditions de la production foncière et immobilière ont
considérablement évolué dans les villes du pourtour méditerranéen : l’urbanisme
de projet a fait florès, les politiques de libéralisation ont favorisé
l’introduction d’investisseurs privés ; les crises financières et immobilières
récentes perturbent les marchés fonciers urbains. Récentes, ces tendances ont
évidemment des répercussions majeures tant sur les villes que sur les sociétés
urbaines. D’où l’intérêt de remettre le foncier à l’agenda des recherches sur
les villes méditerranéennes. À cette fin, nous proposons trois grands axes de réflexion : l’étalonnage des
prix et des valeurs (et ses évolutions récentes) ; la production foncière :
acteurs, filières et gouvernance ; les luttes sociales en lien avec le foncier
et l’immobilier et les arbitrages opérés par les pouvoirs publics entre
intérêts économiques et demande sociale locale.
Annonce
Argumentaire
Depuis
les années 1980, les conditions de la production foncière et immobilière ont
considérablement évolué dans les villes du pourtour méditerranéen. L’urbanisme
de projet a fait florès tant dans les métropoles du Sud que dans celles du
Nord. Ensuite, les politiques de libéralisation ont favorisé l’introduction
d’investisseurs privés, en particulier étrangers et dotés d’un capital
dépassant parfois de très loin les capacités des investisseurs locaux et
nationaux, y compris quand il s’agit d’acteurs publics. Par ailleurs, au
Maghreb, mais la remarque vaut peut-être aussi dans d’autres régions, le
foncier étatique mobilisable est de plus en plus rare[1], ce qui oblige
probablement les acteurs publics à revoir leurs stratégies et, peut-être, à de
nouveaux arbitrages en faveur, soit du logement social (et du relogement
éventuel des habitants des bidonvilles), soit d’une valorisation optimale des
terrains en question, quitte à utiliser une partie des bénéfices procurés par
la vente du foncier pour alimenter des fonds de promotion du logement social.
Enfin, les crises financières et immobilières récentes perturbent
incontestablement les marchés fonciers urbains : au grand dam des autorités
nationales, les Emiratis ont suspendu certains de leurs investissements dans
quelques grands projets qu’ils avaient initiés dans les grandes métropoles de
la rive sud de la Méditerranée dès 2008,
tandis qu’en Espagne, pour se limiter à cet exemple, de nombreux chantiers
restent inachevés.
Récentes,
ces tendances ont évidemment des répercussions majeures tant sur les villes que
sur les sociétés urbaines. D’où l’intérêt de remettre le foncier à l’agenda des
recherches sur les villes méditerranéennes. A cette fin nous proposons
deux grands axes de réflexion.
1) L’étalonnage des prix et des valeurs
(et ses évolutions récentes)
Dans
quelle mesure, en initiant des opérations de grande ampleur dans les quartiers
centraux (Barcelone) ou dans les marges urbaines (friches portuaires, espaces
sous-investis comme les berges du Lac de Tunis, etc.), les acteurs de
l’urbanisme de projet ont-ils bouleversé, non seulement les marchés fonciers et
immobiliers locaux, mais aussi la
hiérarchie des places en ville? Dans le même ordre d’idées, quelles sont
les répercussions de la crise financière et immobilière actuelle sur la
dynamique urbaine ?
2) La production foncière : acteurs,
filières et gouvernance
L’objectif
de ce deuxième axe est d’examiner les modalités de fonctionnement des marchés
fonciers urbains, qui sont liées à la montée en puissance des nouveaux acteurs (privés, étrangers) et
aux politiques de libéralisation. Outre l’identification des systèmes
d’acteurs, la réflexion pourra porter sur les stratégies des acteurs en
question et les outils de la production foncière et immobilière, sans oublier
les négociations à l’œuvre dans la gouvernance foncière. De fait, la dynamique
foncière constitue un observatoire des « régimes urbains[2] », ainsi que des
interactions et modes de relation entre acteurs publics et acteurs privés. La remarque vaut pour les grands projets mais
aussi pour les espaces «sinistrés » par les
crises en cours, qui font peut-être l’objet de nouvelles attentions tant
de la part des acteurs publics, qui cherchent, par exemple, à terminer des
opérations, que des acteurs privés qui peuvent voir dans ces espaces
aujourd’hui en voie de dévalorisation,
en tout cas pour certains d’entre eux, de nouvelles opportunités de profit.
3) Actions collectives et arbitrages
Selon
les partisans de la radical geography et de la critical urban theory, les
restructurations urbaines imposées par
l’urbanisme « néolibéral » suscitent de nouvelles luttes sociales. Qu’en
est-il dans les villes méditerranéennes ? Note-on ici ou là des mobilisations
liées à des situations de compétition pour l’espace ou pour le foncier, même
si, jusqu’à présent, les grands projets ont surtout concerné les marges
urbaines, en tout cas en ce qui concerne les villes du Maghreb et du Machreq[3]
? Comment réagissent les pouvoirs publics en de telles situations ? Doit-on
affirmer avec les auteurs néomarxistes
comme Neil Brenner, que l’action publique urbaine est désormais
subordonnée au « capitalisme
mondialisé[4] »? En d’autres termes, quels sont les arbitrages opérés par les
pouvoirs publics entre les logiques économiques transnationales d’un côté et la
demande sociale locale, de l’autre ?
La
journée d’études que nous proposons ne prétend évidemment pas faire le tour de
la question, mais vise à fournir des éclairages et à poser quelques jalons pour
des recherches futures.
Par
Elsa Zotian – Source de l’information Calenda
[1] Denis E., 2011, « La
financiarisation du foncier observée à partir des métropoles égyptiennes et
indiennes », Revue Tiers-Monde n° 206, pp. 139-158.
[2] Stone, C., (1989), Regime Politics: Governing Atlanta , 1946-1988, University Press of Kansas ,
Lawrence .
[3] Barthel P.-A. et Verdeil É., 2008,
« Experts embarqués dans le “tournant financier”. Des grands projets urbains au
Sud de la Méditerranée », Annales de la Recherche Urbaine, n° 104, pp. 38-48.
[4] Pinson G., 2009, Gouverner la ville
par projet, Paris, Presse de Sciences Po, p. 24.
Programme - (10h-16h30)
Introduction : Olivier Legros (UMR CITERES-EMAM, Tours)
–
Michela Barbot
(UMR Institutions et Dynamiques Historiques de l'Economie, ENS Cachan) : « La
formation des prix dans la longue durée à Milan »
–
Guilhem Boulay
(UMR TELEMME, MMSH Aix-Marseille) : « Coalitions de croissance et
requalification des centres : l’exemple de Marseille »
Déjeuner
–
Brendan Blayac
(UMR CITERES-EMAM, Tours) : « Jeux d’acteurs autour du foncier à Tanger »
–
Hend Ben Othman
(IRMC-Tunis) : « Projet urbain et maîtrise foncière dans le Grand Tunis : de
nouveaux modes de régulation? »
Discussion générale
Lieux et date :
- MSH Tours, salle de
réunion - 2ème étage - 33 allée Ferdinand de Lesseps -Tours, France (37)
- Le vendredi 22 mars
2013
Contact :
Olivier
Legros - courriel : olivier.legros@univ-tours.fr
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