Les amendes colossales dissuadent les armateurs de souiller la
Méditerranée
La répression semble bien avoir payé.
Les amendes colossales auxquelles sont condamnés les armateurs dont les navires
polluent la Méditerranée ont eu un effet dissuasif.
Dégazer
dans les eaux sous compétence judiciaire française devient tellement coûteux
que les pollueurs ne s'y risquent plus. Le nombre des pollutions recensées
s'effondre. On en a dénombré 185
l 'an denier dans les eaux territoriales et la zone
économique exclusive françaises contre 350 en 2008.
Certes,
le trafic maritime diminue en Méditerranée mais cela n'est pas de nature à
expliquer ce phénomène. La France ne relâche pas ses efforts. La Marine
nationale et les douanes équipées d'avions de surveillance assurent le même
nombre d'heures de vol depuis des années. L'Agence de sécurité maritime
bénéficie de 50 % de passages satellitaires supplémentaires, autre moyen pour
détecter les pollutions orphelines.
Autre
indication de la victoire des juges sur les pollueurs, le tribunal
correctionnel de Marseille - compétent pour la Méditerranée française - jugeait
hier son dernier dossier de pollution maritime. Depuis le flagrant délit
effectué, le 27 janvier 2012, par un avion de la Marine nationale à l'entrée
des Bouches de Bonifacio, plus aucun contrevenant n'a été interpellé. Les
tiroirs du parquet maritime de Marseille sont vides ; les magistrats s'en
félicitent. Ce jour-là, en milieu d'après-midi, l'avion de la Marine avait
observé un ruban gris argenté d'environ 200 m de large sur une longueur de douze
kilomètres, dans le sillage du Trefin Adam, un chimiquier appartenant à un
armateur turc, battant pavillon de Malte et commandé par un capitaine ukrainien,
Dmytro Kolmoyets.
Au
pilote du Xenon Golf de la Marine nationale, ce dernier confirmait être en
train de nettoyer ses citernes mais assurait ne rien rejeter à la mer.
"Nous procédons au lavage des cuves en cycle fermé, nous récupérons toutes
nos eaux sales", indiquait le commandant de bord. Le navire venait de
décharger à Naples sa cargaison de biodiesel et se rendait à Fos-sur-Mer pour
charger de l'essence sans plomb à destination d'un port grec. La pollution
surprise ne concernait donc pas des hydrocarbures. Si le rejet d'huiles
végétales est autorisé hors des eaux territoriales, il ne l'est pas dans la
zone des douze milles nautiques.
Le
parquet de Marseille avait donc ordonné la consignation du Trefin Adam qui
n'avait repris la mer que contre le versement d'un cautionnement de 350 000 €.
À la barre, le pilote de l'avion commente le film qu'il avait tourné : "À
l'Est de la Corse, j'ai détecté ce rejet d'une substance liquide. Le changement
de coloration de l'eau se situait exactement à la poupe du bateau et dans le
sillage". Pour le pilote, le déversement était toujours en cours, ce que
conteste l'armateur qui a réclamé sa relaxe. Le procureur Cédric Saunier a
requis une amende de 300 000 € contre l'armateur et de 75 000 € contre le
capitaine du navire dont 50 000 € à la charge de l'armateur. Ces amendes sont
supérieures lorsqu'il s'agit d'hydrocarbures.
Le
5 décembre dernier, le même tribunal avait infligé des amendes de 650 000 € à
la compagnie tunisienne de ferries et à l'un de ses commandants pour un
dégazage, le 15 octobre 2009, hors des eaux territoriales. L'affaire est en
appel.
Par
Luc Leroux – Source La Provence
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