La Tunisie mise sur le médical pour sauver son tourisme

Afrique du Nord Alors que la jeune démocratie est touchée par une crise du tourisme, la branche santé attire les investisseurs.

Le Saphir Palace & Spa, à Hammamet, ne sera réservé dès octobre qu’aux personnes âgées et dépendantes. A gauche, Alexandre Canabal,à l’origine de la future transformation de l’hôtel. 
MARYLINE DUMAS
Le Saphir Palace & Spa, à Hammamet, ne sera réservé dès octobre qu’aux personnes âgées et dépendantes.
A gauche, Alexandre Canabal,à l’origine de la future transformation de l’hôte
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Un hôtel 5 étoiles, la mer de l’autre côté de la rue, une piscine intérieure, une piscine extérieure et, bien sûr, le soleil: le Saphir Palace & Spa, à Hammamet, pourrait faire rêver n’importe quel vacancier. Seulement, à partir d’octobre, il ne sera réservé qu’aux personnes âgées et dépendantes. Dans un pays où le tourisme est en chute libre, la branche santé est considérée comme un moyen de limiter les dégâts.

C’est Alexandre Canabal qui est à l’origine de la future transformation de cet hôtel en maison de retraite. Président de la compagnie française Carthagea, il vise différents objectifs: «Nous allons créer de l’emploi en embauchant 240 personnels de santé. Il y a beaucoup d’infirmiers tunisiens au chômage; nous allons les former à un public français. En plus, nous pérennisons le personnel de l’hôtel. Au total, nous aurons 400 employés pour cette résidence. Enfin, nous trouvons une solution aux hôtels qui sont vides.»

Le Français voit cette première résidence à destination d’Européens francophones comme un projet pilote. Il compte ainsi ouvrir une résidence chaque année pendant cinq ans, puis une tous les deux ans. Les bâtiments ne manquent pas. Le docteur Delestang, qui a ouvert en 2009 une résidence pour personnes âgées au sein d’un hôtel – qui garde cependant une partie hôtellerie classique – en banlieue de Tunis, le reconnaît: «Je reçois chaque jour des coups de fil de gérants d’hôtel.»

Et pour cause, après la révolution de 2011 et les quatre attaques menées par le groupe Etat islamique (EI, Daech en arabe) depuis mars 2015, le tourisme tunisien est en berne. Le Ministère du tourisme note une baisse de 44,6% des recettes pour les cinq premiers mois de 2016 par rapport à 2015.

Au milieu de ce tableau noir, le tourisme médical semble prendre la forme d’une lueur d’espoir. «Nous avons souffert des attentats. Mais le tourisme spécialisé remonte plus rapidement. Au niveau de la santé, il y a une motivation importante des clients qui, une fois qu’ils ont pris leur décision, ne changent plus d’avis», explique Houssem Ben Azouz, directeur général de l’agence Cosmetica Travel et président de la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien.

La clinique privée Pasteur, à Tunis, accueille entre 45 et 50% de patients étrangers. «Nous avons deux catégories de patients étrangers, explique Mondher Ben Ameur, le directeur médical. Les Africains (Algériens, Soudanais, Nigériens, Libyens…) qui n’ont pas les structures adéquates dans leur pays. Et les Européens pour la chirurgie esthétique. Parmi ces derniers, le nombre de patients anglais a chuté après Sousse ( ndlr: le 26 juin 2015, 38 touristes, dont 30 Britanniques, ont été tués sur la plage d’un hôtel) , mais ils reviennent peu à peu.» Karim Yaqoub, chirurgien facial à la clinique Pasteur, reconnaît une baisse de 30% de ses clients depuis 2010: «C’est antérieur aux problèmes de sécurité. Pour moi, c’est plutôt la crise économique mondiale qui nous a fait du mal.»

Le thermalisme est un autre moteur du tourisme médical en Tunisie. «Nous proposons des soins préventifs et curatifs, rappelle Rezig Oueslati, président de la fédération du thermalisme. Il est scientifiquement prouvé que l’eau a des bienfaits pour le corps comme pour le moral. La Tunisie est le 2e pays thermal au monde. Nous sommes en plein boom.»

Le secteur a cependant connu une baisse de 15% des fréquentations en 2015. «Mais les investisseurs sont là, affirme Rezig Oueslati. Avec l’Autriche, nous avons un accord pour construire un village du thermalisme. C’est un projet à 350 millions d’euros (379 millions de francs) qui va créer 5000 emplois sur cinq ans.»

Source de l'article Maryle Dumas - La Tribune de Genève

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