Et si le projet maghrébin demeure
cramponné au chapitre des mythes, même si «le printemps arabe» a relancé
l’espoir de lui donner une existence réelle, c’est bien en raison des
antagonismes politiques entachant les rapports inter-maghrébins notamment ceux algéro-marocains.
Les
conséquences qui en découlent sont lourdes : un mal-développement chronique au
plan économique et une stagnation/enlisement au niveau de la sphère politique.
Ce qui, d’ailleurs, a été, encore une fois, rappelé par des économistes, opérateurs
économiques et des banquiers issus des pays de l’UMA, devant les représentants
du bureau régional pour l’Afrique du Nord de la Commission économique des
Nations unies pour l’Afrique (UNECA).
Ce
dernier les ayant réunis, mi-janvier dernier, dans le cadre d’une réunion de
concertation sur l’intégration maghrébine, à laquelle fut associé le
secrétariat général de l’UMA, est-il indiqué dans un rapport de synthèse
émanant du bureau onusien dont El Watan Economie détient une copie. Pour les
représentants de l’UNECA, le «printemps arabe» a, certes, ressuscité l’espoir
d’aboutir à une intégration maghrébine réelle, mais à défaut de la redéfinition
de l’ordre des priorités, d’une mobilisation des ressources à la dimension des
ambitions et d’un engagement plus soutenu de la part des différents acteurs à
l’intégration, cet espoir risque de fléchir. «Si le printemps arabe a relancé
les espoirs sur cette union de 90 millions personnes, il n’en demeure pas que
les échanges entre pays membres sont évalués entre 2 et 3% du PIB».
Une
proportion susceptible d’être dépassée aux yeux de l’Union des Banques
Maghrébines, pour peu que le secteur banquier, maillon fort dans toute
politique économique, soit plus dynamique et moins frileux. Et de faire le
parallèle avec l’Europe, dotée d’une monnaie unique et dont 70% des échanges
sont en interne. «Il faut redéfinir l’intégration maghrébine en fondant son
espoir sur la vitalité du secteur bancaire pour sortir l’union de la
léthargie», est-il souligné dans le document de l’UNECA. A l’heure du grand
défi que constitue l’instauration d’une zone de libre-échanges
euro-méditerranéenne pour les économies maghrébines, le projet de l’UMA n’est
plus ce qu’il était, un idéal, mais un impératif de survie, a-t-on insisté.
«Situé entre la première puissance économique mondiale - la Zone euroet la zone
économique la plus convoitée en ce moment - l’Afrique subsaharienne, le Maghreb
a une partition à jouer».
Outre
un rapprochement plus significatif des politiques économiques nationales aidant,
la finance est, à ce titre, un facteur déterminant, son harmonisation est l’une
des conditions à même de permettre d’aller à pas sûrs vers cette intégration
maghrébine tant convoitée. D’autant que, forte de 93 banques dont 104
établissements financiers, 1300 points de vente avec une moyenne de 400
nouvelles agences bancaires par an, la zone n’a rien à envier à ses partenaires
de la rive Nord. Seul hic, précisent les auteurs du document, «le système
bancaire maghrébin reste focalisé sur les échanges à l’international. Les 30
milliards de dollars déboursés/an dans les importations de céréales alors que
la région ne manque pas de terres fertiles en est le parfait exemple. Les
contraintes logistiques ne facilitent pas non plus les échanges. Exemple : il
faut 23 à 40 jours pour relier le Port de Tanger Med à celui d’Oran, soit plus
que pour rallier Singapour et Shanghai».
D’autre
part, est-il encore relevé, «l’harmonisation des codes fiscaux et des codes
d’investissement est un autre impératif au même titre d’ailleurs que les
réformes des systèmes de change entre les 5 pays membres, dotés chacun de sa
monnaie nationale». Néanmoins, dans le milieu des affaires, la création de la
Banque maghrébine pour l’Investissement et le Commerce (BMICE) dont l’annonce a
été faite à partir de Nouakchott (Mauritanie), début janvier 2013, invite à
l’optimisme. Et, «si les chefs d’Etat n’ont pas encore convenu d’un sommet,
lequel ne saurait tarder, les hommes d’affaires, eux, seront bientôt en
conclave à Marrakech», ajoute la note de l’UNECA.
En
somme, pour les participants à la réunion de concertation, en dépit de tous ces
constats peu reluisants, «les lignes bougent depuis le déclenchement du
printemps arabe. Matérialiser le rêve UMA, c’est possible. Toutefois, les
rapports intermaghrébins, au même titre que ceux euromaghrébins, ne doivent
plus rester tels qu’ils le sont actuellement, c’est-à-dire dominés par le
syndrome sécuritaire, lequel est édifié autour des trois risques que
constituent l’immigration, l’intégrisme et la drogue. Car, pour désactiver ces
trois risques, ces rapports doivent évoluer vers un solide partenariat axé
autour du développement, de la démocratie et de l’intégration maghrébine».
Par
Naima Benouaret – Source de l’article Elwatan
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