- Les avocats de l'UE peaufinent leur défense
- La cour européenne de justice répond en moyenne après 15 à 24 mois
Le Conseil des ministres de l’UE et la Commission européenne -qui ont décidé de faire appel de l’arrêt rendu le 10 décembre par le tribunal de l’UE sur l’accord agricole Maroc/UE- ont confié à leurs juristes le soin de préparer les arguments à présenter devant la Cour de justice. Le pourvoi ne devrait être effectif qu’à partir de la nouvelle année.
Comme on le sait, le 10 décembre dernier, le tribunal de l’UE a annulé une partie de l’accord commercial Maroc/UE du 8 mars 2012 portant sur les produits agricoles, les produits transformés et les produits de la pêche, en estimant que «l’application de cet accord au territoire du Sahara occidental violait le droit international et les engagements de l’UE».
Le Conseil des ministres de l’UE et la Commission européenne -qui n’ont jusqu’à présent fait qu’annoncer leur décision de faire appel de la décision du tribunal- peaufinent actuellement leurs arguments pour introduire leur pourvoi en appel, d’une manière officielle devant la Cour de justice de l’UE (CJUE). Complexité du sujet par ses aspects politiques, fête de Noël et trêve de nouvel an obligent, l’introduction de cet appel n’aura probablement pas lieu avant le début de la nouvelle année 2016.
A titre de rappel, selon les règles de la Cour de justice de l’UE, la Commission et le Conseil disposent d’un délai de deux mois pour introduire leur pourvoi (en principe, ils ont pour cela jusqu’au 11 février 2016). Pour l’instant, les services juridiques de la Commission et du Conseil des ministres de l’UE étudient minutieusement le contenu de l’arrêt du Tribunal de l’UE. Selon des sources communautaires, les avocats de l’UE concentreraient leurs efforts sur notamment deux aspects de cet arrêt: d’abord l’admissibilité du Polisario comme «seul représentant du peuple sahraoui» et ensuite les questions de droit de l’arrêt lui-même. Comme on le sait, la Cour de justice de l’UE peut être saisie de pourvois, qui toutefois se limitent aux questions de droit, contre les arrêts et ordonnances du tribunal de l’UE. Une fois que le pourvoi en appel du Conseil des ministres de l’UE et de la Commission aura été introduit officiellement, on peut se poser la question de savoir de combien de temps dispose la Cour de justice de l’UE pour trancher l’affaire.
La Cour n’aurait pas de délai maximum pour répondre mais si l’on prend en compte les statistiques moyennes des décisions de la CJUE sur plusieurs années, la réponse de la Cour pourrait prendre entre 15 et 24 mois. Et d’aucuns de se demander quelle forme pourrait revêtir sa réponse?
Selon nos informations, celle-ci pourrait être de trois ordres: soit la Cour peut considérer que le tribunal a commis une erreur et que donc le pourvoi du Conseil et de la Commission est recevable et fondé: elle annule tout simplement l’arrêt, soit elle peut décider de poser des questions et des éclaircissements au tribunal, auquel cas elle lui demanderait de revoir sa copie, soit enfin elle estime que le tribunal a agi correctement et elle confirme l’arrêt et demande son exécution immédiate.
Rétroactivité ou pas?
En attendant que toute cette tambouille judiciaire se fasse, la Commission et le Conseil ont réclamé l’introduction «de mesures provisoires, sous la forme de suspension de l’exécution de l’arrêt afin d’assurer la sécurité juridique complète concernant les effets de l’accord agricole Maroc/UE». En effet, l’arrêt du tribunal de l’UE du 10 décembre dernier n’a pas précisé si l’annulation partielle de l’accord agricole Maroc/UE devait être rétroactive sur les effets déjà produits par l’accord agricole, c’est-à-dire une série de réductions de droits de douane pour des produits marocains (en particulier des fruits, des légumes et des produits de pêche).
Si le Maroc a jusqu’ici apparemment considéré que l’arrêt du tribunal de l’UE était «une affaire européo-européenne et que c’est à l’UE seule de traiter cette péripétie juridique» (dixit notre ministre des affaires étrangères) et qu’il a accessoirement imposé l’omerta sur ce dossier hautement sensible, il n’en demeure pas moins que l’on ne peut pas imaginer un seul instant que les responsables marocains restent au balcon et qu’au contraire ils s’activent dans les coulisses et font tout ce qui est possible pour éloigner le spectre d’une annulation même partielle de l’accord agricole Maroc/UE. Hé oui, il faut absolument activer la séance de rattrapage car l’accord Maroc/UE sur la pêche est également potentiellement menacé.
D’aucuns se demandent si le Maroc n’aurait pas un peu trop compté sur les assurances des services juridiques européens chaque fois qu’il s’est agi de signer un accord avec l’UE et où il était question du Sahara… Il n’a pas été possible à la presse de poser des questions lors de la conférence de Mezouar et de Mogherini qui a suivi la réunion du Conseil d’association Maroc/UE, le 14 décembre dernier.
Source de l'article l'Economiste
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