Aujourd'hui dimanche à Rome, les discussions sur l'avenir de la Libye seront éclipsées par le forcing du Maroc pour que l'UE fasse le plus rapidement ''appel'' de la décision de la cour de justice européenne d'annuler l'accord agricole, conclu en 2012.
Sur plainte du Polisario, la décision de la Cour de justice européenne annoncé jeudi d'annuler l'accord de libre échange agricole entre le Maroc et l'UE irrite européens et marocains. Déjà, la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini annonce que Bruxelles va faire appel, et aura des discussions à Rome avec le ministre marocain des affaires étrangères Salah Eddine Mezouar. Mais, en fait, sur quoi porte cet accord?
A Rabat, la décision de la cour de justice européenne d'annuler le protocole de libéralisation entre le Maroc et l’UE des échanges en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche, passe mal. Dans un communiqué rendu public vendredi, le ministre de l’Agriculture Aziz Akhannouch avait qualifié la décision de la Cour de justice européenne « d’incohérente ». «À l'heure où l'accord, au bout de trois années d'application, s'approche d'une clause de rendez-vous censée l'orienter vers une plus grande ouverture, nous assistons à cette décision incohérente, qui va à l'encontre de l'esprit de partenariat historique entre le Maroc et l'UE», ajoute le ministère marocain de l'agriculture, qui estime que cette décision est « étonnante et surtout incompréhensible», et qui « bafoue les engagements de l’UE vis-à-vis de l’agriculture marocaine ». En outre, les deux parties « ont eu à faire des concessions afin de conclure un accord juste et équitable bien que la balance commerciale agricole reste excédentaire en faveur de l'Europe'', rappelle le ministère marocain pour qui il est clair que ''les motivations de cette décision sont ailleurs».
La décision de la CJUE sera au menu de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de l’UE, prévue lundi 14 décembre à Bruxelles. Et les pays membres pourraient faire appel de cette décision rapidement, d'autant que ''tous les travaux préparatoires ont commencé en vue de proposer au Conseil de faire appel'', avait indiqué un haut responsable européen sous couvert d'anonymat.
Forcing marocain
Le ministère marocain des Affaires étrangères avait dit s’attendre à ce que l’UE « prenne les mesures internes appropriées en vue de trouver une issue définitive à cette procédure, au demeurant de son seul ressort ».
Selon l’agence espagnole Europa Press, le « Coreper (Comité des représentants permanents des gouvernements des États membres de l'Union européenne) a donné son feu vert aux services juridiques pour faire appel ». Ce comité doit également se pencher sur les mesures urgentes à prendre pour suspendre ledit arrêt, qui demande l’annulation de l’accord avec effet immédiat.
A Rome par ailleurs, et à la veille de la réunion du conseil des ministres des Affaires étrangères de l’UE, Salaheddine Mezouar et la Haute Représentante de l'UE pour les Affaires Etrangères, Federica Mogherini devraient discuter du dossier en marge de la réunion de concertation sur l'avenir de la Libye. Selon Mogherini, « les accords bilatéraux » conclus entre le Maroc et l’UE « ne sont pas remis en cause »
Flash-back sur un ‘’bon’’ accord pour le Maroc
Les négociations Maroc-UE sur cet accord agricole dénoncé par le Polisario, conclu au bout de six ans, présentait beaucoup d’avantages pour le Maroc, qui profitera de l’élargissement de la liste des produits bénéficiant du libre accès sans limitation des quantités sur le marché européen (huile d’olive, haricots verts, salade, fruits à noyaux, melon). L’UE aussi a eu droit à son lot d’avantages dans le nouvel accord. Les produits laitiers en provenance de l’UE entreront librement sur le marché marocain à l’exception du lait liquide et de la poudre de lait non écrémé. D’autres produits dits sensibles, comme l’huile d’olive, le concentré de tomate, les viandes et la charcuterie, sont soumis à des contingents tarifaires à leur entrée au Maroc. En outre, cet accord agricole annulé par la CUJE prévoyait un calendrier de libéralisation sur 10 ans pour les exportations des pays de l’UE vers le Maroc selon trois groupes de produits. Plus concrètement, le ministère de l’Agriculture marocain prévoyait de réaliser un gain immédiat net d’1 milliard de dirhams, correspondant à la différence entre le gain réel qui est de 1,7 milliard et les retombées des concessions accordées à l’UE de 700 millions de dirhams. L’accord devait permettre de dégager un gain fiscal d’environ 285 millions de dirhams dès la première année de son application dans la mesure où les opérateurs économiques marocains devront économiser 362 millions de dirhams en droits de douane à la faveur des conditions préférentielles, alors que les opérateurs européens doivent payer 77,3 millions de dirhams de moins. Par ailleurs, le processus de libéralisation sur 10 ans permettra aux exportateurs marocains d’économiser jusqu’à 1,7 milliard de dirhams en droits de douane par an et 865 millions de dirhams pour les opérateurs de l’UE.
Source de l'article Maghrebemergent
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