Bâtir une Méditerranée de projets


« Nous devons refaire de la Méditerranée un espace de prospérité, de démocratie et de mobilité. » Par Pouria Amirshahi, député socialiste des Français de l’Etranger (Maghreb/Afrique de l’Ouest), qui accompagne le déplacement du chef de l'Etat, François Hollande, en Algérie et Mathieu Hanotin, député socialiste de Seine-Saint-Denis.

La visite de François Hollande en Algérie, les 19 et 20 décembre, amorcera, à n’en pas douter, un renouveau des relations entre les deux rives de la Méditerranée. Elle constituera également une étape historique des relations bilatérales franco-algériennes, ce que réaffirmera le Président de la République devant les deux chambres algériennes réunies.

Après des années d'engagement en faveur de la reformulation des rapports entre nos deux pays, d'une nouvelle ambition francophone partagée, mais aussi pour un dépassement des conflits mémoriels, nous nous réjouissons qu’Alger et Paris se tendent à nouveau la main. Il est temps de tourner la page de l’animosité et de la compromission qui ont empoisonné, durant des décennies, nos relations avec l’Algérie et les autres pays du Maghreb.

En rendant un hommage historique aux victimes du 17 octobre 1961 à Paris, le Président de la République a déjà manifesté sa volonté de porter un regard lucide sur notre héritage colonial, pour mieux le dépasser. Sur l’ensemble du pourtour méditerranéen, les sociétés civiles sont en attente d'une relation apaisée et fraternelle.

Il convient aussi de comprendre les raisons des déconvenues successives qu’ont essuyé l’ensemble des initiatives amorcées depuis le début des années 1990, tels que le processus de Barcelone ou plus récemment l’Union pour la Méditerranée. Manque flagrant de moyens, absence d’ébauche d’un projet économique commun, primauté d’une vision sécuritaire obnubilée par la peur des flux migratoires, les éléments qui font les succès historiques n’étaient simplement pas réunis. À cela s’est trop souvent ajouté le soutien, parfois criminel, apporté par une partie des élites européennes à des régimes dictatoriaux et oppressifs.

Des deux côtés de la Méditerranée, la crise économique frappe avec force. Les conséquences sociales sont dramatiques : chômage, pauvreté, jeunesse en grande difficulté. Tout est là pour favoriser le repli sur soi : identitaire au Sud, nationaliste au Nord.

Et pourtant, nous avons toutes les cartes en main pour ouvrir un nouveau modèle de développement. Il nous faut sans plus tarder nouer un solide partenariat avec le Maghreb au service d’une meilleure complémentarité économique : pour bâtir une Méditerranée de projets, nous devons nous engager dans des projets industriels et scientifiques communs plutôt que de faire perdurer le sentiment d'une concurrence. Partager la valeur ajoutée autour de filières de production est la meilleure réponse de moyen et long terme à la double frustration qui prévaut aujourd'hui : d'un côté la seule immigration choisie, de l'autre la concurrence par des plus faibles salaires.

Nous devons refaire de la Méditerranée un espace de prospérité, de démocratie et de mobilité. Désormais, l’Histoire de ce berceau de nos civilisations s’écrira avec les peuples qui le bordent. Les soulèvements arabes nous ont montré que, loin des théories réactionnaires du « choc des civilisations », les attentes de justice démocratique et sociale ne peuvent plus être ignorées.

Cette nouvelle ambition méditerranéenne implique enfin de revoir entièrement la politique de mobilité des personnes, sans laquelle aucun projet ne vivra véritablement. Artistes, chercheurs, chefs d'entreprises et étudiants doivent pouvoir circuler plus et plus facilement. Notre avenir commun sera d'abord celui des femmes et des hommes de nos deux pays. Aux côtés du Président de la République, nous continuerons à défendre la refondation d’une destinée commune avec nos amis du Maghreb.
Source de l’article Blogs Mediapart

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