Les patrons français comme les
politiques auraient peur de « froisser » leurs homologues marocains. C’est ce
qui trivialement expliquerait, en bonne partie, la faible représentativité
économique de la délégation économique qui accompagne le président François
Hollande. Décryptage
Les
temps changent. En 2007, lors de la visite présidentielle de Nicolas Sarkozy en
Algérie, ce dernier avait été accompagné par une kyrielle impressionnante de
patrons et parmi eux une belle brochette de grands noms du CAC40. C’était
l’époque du président-VRP, bien décidé à tout faire pour que le « made in
France » se vende aux quatre coins de la planète. Concernant l’Algérie, Nicolas
Sarkozy avait même fait siennes des propositions innovantes comme par exemple
l’ouverture du capitale du gazier français GDF en échange de la mise en place
d’un partenariat énergétique franco-algérien. Si le bilan économique général de
l’ancien président français apparaît des plus contrastés, tel n’est pas le cas
en ce qui concerne l’Algérie. Tramways, gestion de l’eau, marché automobile,
hydrocarbures, il est indéniable que la présidence Sarkozy a conforté la France
dans sa position de premier partenaire commercial de l’Algérie. Certes,
quelques grands chantiers, notamment ceux du BTP, ont échappé aux groupes
hexagonaux au profit de leurs concurrents chinois, mais, l’un dans l’autre,
l’Algérie reste une chasse gardée française, du moins sur le plan économique.
Et, à ce sujet, une statistique résume à elle seule cette réalité. Chaque
année, l’Algérie est l’un des rares pays, sinon le seul, avec lequel la France
présente un solde commercial positif et cela alors que cela fait des années que
le commerce extérieur français est déficitaire.
Pas de grands noms économiques, des n°
2 et 3 seulement
Dans
un monde normal, on pourrait penser que cette singularité algérienne oblige les
acteurs économiques, et politiques, français, à être des plus attentifs et des
plus empressés à l’égard d’un marché captif. Pourtant, il n’en est rien. A
preuve, la visite de François Hollande en Algérie et la maigre représentativité
économique dans la délégation qui l’accompagne.
Pas
ou peu de grands noms, beaucoup de numéros deux ou de numéros trois et un Medef
des plus discrets. Certes, le nouveau président français veut trancher avec
l’empressement commercial de son prédécesseur. En veillant à ce que son voyage
en Algérie n’ait pas un trop grand parfum économique mais plus politique, il
cherche d’une certaine façon à restaurer le prestige de sa fonction.
Il
est vrai qu’à force d’avoir fait du rentre-dedans ici et là pour vendre par
exemple le Rafale, Sarkozy a réussi à irriter nombre de ses homologues chefs
d’Etat. Hollande lui, veut montrer aux Algériens qu’il est possible et
nécessaire de parler d’autre chose à commencer par le dossier malien mais aussi
la question de la Syrie voire des situations en Tunisie et en Libye. Mais, dans
le même temps, cette discrétion met en relief la réalité bien étonnante évoquée
précédemment. C’est un peu comme si nombre de patrons français avaient honte ou
éprouvaient une gêne à s’afficher en Algérie. Pourquoi une telle retenue ? La
réponse aussi simple que triviale. Comme leurs homologues politiques, ces
patrons ont en tête l’obsession de ne pas froisser leurs homologues marocains.
Un tropisme marocain !
On
le sait, le Maroc fait l’objet de toutes les attentions de la part des milieux
économiques français et de nombreux patrons, à l’image de Jean-René Fourtou,
président du Conseil de surveillance de Vivendi, sont engagés dans une démarche
volontariste pour convaincre des entreprises françaises d’investir dans le
Royaume. Et, il est vrai, qu’il existe une passion marocaine chez les acteurs
économiques français.
Une
passion qui ne relève pas toujours des critères de rentabilité mais qui a aussi
trait à la qualité de l’accueil sur place. A cet égard, nombreux sont les
économistes français qui estiment que l’engouement envers le Maroc d’hommes
d’affaires et politiciens français est quelque peu disproportionné par rapport
à son potentiel réel. A l’inverse, l’Algérie, dont le potentiel de marché est
évalué à 3 milliards d’euros en termes d’investissement (et dans l’hypothèse de
réformes en ce sens) reste quelque peu « snobée ». Poids de l’histoire,
incapacité à être aussi attractif que le voisin marocain, insécurité,
législation fluctuante : tout cela explique en partie ces réticences.
Mais,
force est de constater que l’Algérie ne bénéficie pas, auprès des milieux
d’affaires français, de la considération que son statut de marché captif
devrait imposer. En tout état de cause, il sera instructif de suivre de près la
visite que François Hollande fera tôt ou tard au Maroc (tout le monde a noté
celle de son Premier ministre Jean-Marc Ayrault la semaine dernière). Et
gageons, qu’à ce moment-là, patrons et hommes d’affaires français seront très
nombreux à être de la partie.
Source
de l’article Maghrebemergent
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