Dans une note de la Commission Trilatérale de novembre 2011, à destination des institutions européennes, cinq auteurs dont Elisabeth Guigou (députée française, PS) et Peter Sutherland (Goldman Sachs International) appellent à la constitution d’un bloc Europe-Afrique intégré, qui faciliterait le recours à une main-d’œuvre jeune et peu coûteuse, et l’accès à un formidable marché de 3 milliards de consommateurs.
Les
révoltes des pays arabes, entraînées par la révolution tunisienne de décembre
2010, n’ont pas manqué d’inspirer les tenants du mondialisme, qui rêvent d’un
vaste marché global, corollaire d’un monde sans frontières gouverné par les
multinationales.
La
Commission Trilatérale a ainsi adressé, en novembre 2011, une note d’une
quarantaine de pages aux autorités européennes, intitulée Europe’s Response to
the Arab Awakening (« La réponse de l’Europe au réveil arabe »), co-écrite par
cinq auteurs membres de la Trilatérale : Elisabeth Guigou (députée PS,
actuellement présidente de la commission des Affaires étrangères du Parlement
français), Andrzej Olechowski (homme politique polonais), Volker Perthes
(directeur de l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité),
Stefano Silvestri (président de l’Institut des affaires internationales
italien) et Peter Sutherland (PDG de Goldman Sachs International, ancien
directeur général du GATT et de l’OMC, ancien membre de la Commission
européenne, ancien président de la section Europe de la Trilatérale, membre du
comité de direction du groupe Bilderberg)
Le
message est clair : il faut profiter du Printemps arabe pour avancer vers la
réalisation d’une Communauté euro-méditerranéenne, allant beaucoup plus loin
que l’actuelle Union pour la Méditerranée.
Pour
Peter Sutherland, le temps est venu d’avancer sérieusement l’idée d’un Marché
unique EuroMed. Le volume des échanges commerciaux entre l’UE et la zone MENA
(Moyen-Orient et Afrique du Nord) pourrait, selon lui, être de 3,5 à 4 fois
plus important si chaque région atteignait le niveau d’intégration de l’UE.
Quatre fois plus de profit pourrait être réalisé, autrement dit.
Pour
cela, l’Union européenne doit commencer par se présenter comme une « Europe
ouverte », et offrir aux pays arabes un accès plein et entier à son marché
interne, qui passe par les quatre libertés de mouvement : circulation des biens
(incluant les produits agricoles et textiles), des services, du capital et des
personnes.
En
somme, nous devrions instaurer un marché du travail méditerranéen (« un espace
Schengen méditerranéen de la mobilité transitoire »), permettant de puiser dans
le dynamisme des populations jeunes et bon marché d’Afrique du Nord, et de
créer une nouvelle classe moyenne de consommateurs pour les produits européens.
Une
telle ouverture, affirment les auteurs, serait nécessaire lorsque l’on
considère l’importance croissante des pays arabes pour l’économie européenne,
et la structure démographique de ces jeunes pays. L’Europe, vieillissante,
aurait besoin d’immigration.
Or,
la politique migratoire étant une sujet trop controversé pour générer un
consensus au sein de l’UE, Peter Sutherland suggère de recourir à la procédure
de « coopération renforcée » prévue par le Traité de Lisbonne. Ainsi, des
groupes volontaires de pays voulant puiser dans la main-d’œuvre nord-africaine
pourraient offrir des visas de travail aux migrants de ces régions, et prendre
en charge leur formation. En cas de succès, cela inciterait d’autres pays à
suivre la même voie.
Elisabeth Guigou |
Une
fois cette étape réalisée, il s’agirait d’aller plus loin encore dans
l’élargissement et l’intégration.
En
additionnant la population européenne estimée d’ici 2050 (500 millions
d’habitants) à celle des pays méditerranéens et du Moyen-Orient (500 millions
d’habitants en 2050), nous atteignons le chiffre d’un milliard d’habitants
d’ici 2050. Si, comme le suggère Elisabeth Guigou, nous ajoutons à cette somme
la population de l’Afrique sub-saharienne (2 milliards d’habitants en 2050), le
« bloc » euro-africain atteindrait alors 3 milliards d’êtres humains,
c’est-à-dire plus que la Chine, et un tiers de la population mondiale.
Un
tel espace partagé de développement économique et social, de paix et de
sécurité collective, permettrait à la grande région «
Europe-Méditerranée-Afrique » de faire entendre sa voix sur la scène
internationale.
L’Europe-Afrique
– un bloc régional majeur qui ne serait pas un simple espace de libre-échange
comme l’ALENA, le MERCOSUR ou l’ASEAN – serait en effet bien mieux placée pour
négocier avec les organisations internationales comme l’OMC, et les autres
puissances mondiales majeures.
Jusqu’à
une intégration de toutes ces puissances et un marché global unique ?
Source
de l’article Agoravox
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