Les 29 et 30 novembre, selon les chiffres fournis par les organisateurs, 70 pays et un millier d'investisseurs convergeront à Tunis afin d'écouter la Tunisie démocratique.
Quatre objectifs y seront déroulés : présenter le plan quinquennal 2016-2020, expliquer les projets de réformes, comprendre les besoins des investisseurs et favoriser le B to B. Sur le papier, c'est limpide mais au regard du contexte général, la tâche ne s'avère pas des plus faciles.
Des menaces multiples : économiques, politiques et sociales
C'est conscients que la jeune démocratie tunisienne est menacée par une profonde crise économique et sociale, la même qui a amené la révolution en 2011 et qu'elle a affaire face au terrorisme qui se nourrit des problèmes dus à cette même crise que nombre de partenaires vont affluer à cette conférence Tunisia 2020. Le lien entre problèmes sociaux et recours au djihadisme est avéré dans un pays à l'ancrage géographique si stratégique pour l'Afrique et l'Europe. De quoi justifier cette Conférence préparée depuis près d'un an. Pour sensibiliser les investisseurs, une banque d'affaires, Arjil, a été mandatée. Elle a choisi Dominique Strauss-Kahn comme VRP de luxe. L'ex-directeur général du Fonds monétaire international s'active en coulisses. D'ailleurs, dès juin 2014, l'ancien homme politique avait publiquement rendu visite à Béji Caïd Essebsi, un BCE alors le leader de Nidaa Tounes et en précampagne législative et présidentielle.
Redorer « la marque Tunisie »
Si les retombées financières ne sont pas garanties à l'issue de ces 48 heures de conférence, l'image du pays en bénéficiera de toute façon. Un signal fort aura été donné, car elles ne sont pas si fréquentes que ça, ces conférences capables de réunir autant de pays, de privés et d'organisations au profit d'un État et de ses acteurs économiques.
On s'active donc depuis quinze jours pour nettoyer le Grand Tunis, les déchets n'ayant épargné aucune parcelle du pays depuis plusieurs années. Objectif : ripoliner les artères et offrir un visage avenant aux visiteurs. Cet aspect cosmétique suffira-t-il à rassurer ? Le climat des affaires souffre d'une administration « social-bureaucratique », selon l'expression de Yassine Brahim, ancien ministre du Développement, d'une justice transitionnelle qui fonctionne avec difficulté, ce qui ne rassure guère les entrepreneurs en cas de litiges, enfin de l'impact des attentats du Bardo et de Sousse en 2015.
Sur le plan sécuritaire, les progrès sont patents même si économiquement, l'État peine à boucler ses fins de mois. La loi de finances 2017 actuellement en discussion au Parlement en est une illustration forte.
Tunis, the place to be
La photo sera belle. Ample, riche en chefs d'État, Premiers ministres, ministres, dirigeants de toutes sortes, qui seront sur le cliché. Fadhel Abdelkefi, le ministre du Développement, ne cesse de répéter lors des roadshows qui se sont tenus aux États-Unis et en Europe que la Tunisie « ne veut pas des aides mais des investissements ». John Kerry ferait le déplacement. Manuel Valls sera présent pour l'ouverture de l'événement. Le chef du gouvernement Youssef Chahed sera à Paris les 9 et 10 novembre afin d'y rencontrer François Hollande notamment. Béji Caïd Essebsi prononcera un discours devant le Parlement européen le 1er décembre. L'Union européenne a d'ores et déjà annoncé un important plan de dons (300 millions par an jusqu'en 2020). Deux équipes de technocrates se sont rendues en Tunisie en octobre afin d'écouter puis de hiérarchiser les dossiers.
Les 29 et 30 novembre ne seront qu'une séquence d'un agenda économico-diplomatique en perpétuel mouvement. « Les résultats, s'il y en a, ne se constateront pas avant deux ans, ce qui est normal », indique un des acteurs du dossier. Un travail en interne sera nécessaire afin de vendre aux Tunisiens – excédés par le chômage et l'inflation – cette opération qui vise à réhabiliter la marque Tunisie aux yeux du monde.
Par Benoît Delmas - Source de l'article LePoint Afrique
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