L’éducation doit se réformer pour créer des entrepreneurs

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Sur les deux versants de la Méditerranée, l’horloge démographique tourne implacablement : d’un côté, des actifs vieillissants et de l’autre des actifs en surnombre.

Pourtant, quelle que soit la dynamique à l’œuvre, l’espace méditerranéen est confronté à un véritable défi : assurer aux jeunes de la région un avenir prospère, robuste et heureux, et, ce faisant, favoriser le développement économique et le progrès des sociétés.

On ne peut songer à bâtir un avenir radieux pour les jeunes sans s’atteler à deux enjeux clés. Le premier est l’éducation et la formation des jeunes aux emplois de demain. Le second vise à préparer l’économie de demain, en misant sur le numérique, un secteur d’activité qui enregistre la plus forte croissance dans le monde et qui stimulera l’innovation et la croissance économique pendant les cinquante années à venir.

Ces deux défis sont en réalité étroitement liés : il s’agit de faire coïncider le chantier qui nous attend dans le secteur éducatif avec une certaine idée de l’entreprise. Les compétences et les valeurs liés à l’entrepreneuriat sont évidentes : résolution des problèmes, pensée critique, esprit d’équipe et prise de risque. Évidemment, ces qualités diffèrent beaucoup des compétences développées par les systèmes et les programmes éducatifs pour lesquels une profonde refondation s’impose. Les réformes sont toujours plus faciles à annoncer qu’à mettre en œuvre, mais celle qui nous occupe ne concerne ni l’administration ni les programmes scolaires : elle exige un changement d’attitude et de mentalité qui suppose une adhésion de la communauté dans son ensemble et pas seulement une action des institutions éducatives.

Pour plus de 40 % des entrepreneurs de la région, la principale difficulté est de trouver chez les candidats au recrutement les qualifications qu’ils recherchent, sachant que la majorité de ces compétences sont non techniques, à l’instar de celles que je mentionne plus haut. Dans La Terre est plate, Thomas Friedman montre que le savoir ne constitue plus un avantage concurrentiel, mais que la persévérance, la curiosité et la prise de risque le sont. Comment faire en sorte que ces qualités entrent dans les programmes scolaires et la mentalité d’un pays ? En récompensant les jeunes qui en font preuve et en demandant à l’école d’impliquer les jeunes dans des activités à visée sociale, pour qu’elle se retrouve au cœur de la collectivité. L’investissement humain et social au sein des écoles et auprès de la collectivité détermine souvent l’acquisition de compétences entrepreneuriales chez les jeunes adultes et leur donne une raison d’être au monde.

Cet investissement peut se traduire par un plus grand rapprochement avec le secteur privé et des liens plus étroits avec les entreprises, les start-up et le marché du travail, notamment pour les lycéens, les instituts de formation technique et les universités. Il n’existe pas de martingale du succès, mais les nombreuses expériences qui ont associé le secteur privé à des établissements scolaires ont débouché sur une adéquation satisfaisante entre les attentes scolaires et la réalité de l’emploi. Les jeunes gens peuvent faire preuve d’une grande créativité lorsqu’il s’agit de joindre les deux bouts, pourvu qu’on leur donne les moyens véritables de découvrir de nouvelles professions et de mettre à profit leur dynamisme.

Installer les jeunes dans un vrai métier est d’autant plus important que la jeunesse méditerranéenne fait l’objet de rivalités. À l’échelon local, les groupes violents et d’influence les ont identifiés comme des cibles vulnérables à recruter. D’après une enquête récente, les jeunes considèrent que l’absence d’emplois et de perspectives est le premier vecteur de recrutement pour l’État islamique. À l’international, la guerre des talents pourrait priver la région méditerranéenne de ses meilleurs éléments, alors que beaucoup de jeunes s’exilent en quête d’un meilleur avenir : les Émirats arabes unis, les États-Unis et l’Allemagne sont par ordre de préférence les trois premiers pays où la jeunesse arable souhaiterait s’établir si elle en avait la possibilité.

La diversité des ressources et des talents du pourtour méditerranéen ainsi que sa position géographique en font un espace idéal pour l’innovation et l’entrepreneuriat. Les changements qui s’imposent doivent avoir lieu sans délai, au regard de la force exponentielle que représente simultanément l’économie du numérique, qui pourrait apporter à la Méditerranée des perspectives de croissance économique sans précédent si des investissements judicieux en faveur de l’école et de l’entrepreneuriat sont effectués dès aujourd’hui.

Par Hala Fadel - Source de l'articel Blog Banque Mondiale

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