Les océans sont parcourus de courants qui relient des régions éloignées ou, à l'inverse, en isolent d'autres.
Pour caractériser ces routes et barrières invisibles, des chercheurs de l'Institut méditerranéen d'océanologie ont mis au point une nouvelle méthode générique, dite « d'écorégionalisation », qui permet de définir les régions bien connectés et leurs frontières, pour expliquer les distributions d'espèces par exemple. Une explication par les chercheurs eux-mêmes.
L’écorégionalisation du milieu marin est une étape nécessaire à sa gestion. Les études existantes de régionalisation sont basées soit sur la distribution des espèces soit sur la distribution des propriétés physiques et biogéochimiques. Cependant, ces approches ignorent la dispersion des espèces par la circulation océanique qui connecte certaines régions et en isole d’autres. Cet effet de dispersion peut être quantifié par la connectivité, qui est la probabilité ou le temps de transport entre des régions distinctes. Ce concept est à la base d'une nouvelle méthode de régionalisation basée sur la connectivité, développée par les chercheurs du MIO (l'institut méditerranéen d'océanologie) et appliquée à la mer Méditerranée.
Cette nouvelle méthode se base sur des simulations d’ensemble de trajectoires lagrangiennes utilisant les courants simulés par le modèle numérique de circulation Nemo-OPA de Mercator Océan à une résolution de 1/12° (soit environ 8 km). Le domaine de calcul, couvrant toute la mer Méditerranée, est divisé en mailles de 50 km de côté. Les trajectoires des particules numériques sont utilisées pour quantifier la connectivité entre chaque maille.
Régionalisation obtenue par la méthode, superposée aux courants moyens dans la couche 0-100 m issus du modèle Mercator PSY2V3. La couleur de chaque frontière correspond à son ordre d’apparition dans la classification hiérarchique. © Léo Berline et al. |
L'écorégionalisation peut aussi aider à suivre les espèces invasives et les polluants
Enfin, la connectivité est utilisée dans une classification, qui conduit à une partition du domaine en régions connectées, séparées par des frontières plus ou moins perméables. Les régions ainsi identifiées en mer Méditerranée sont cohérentes avec la circulation générale avec des frontières situées le long de courants pérennes ou autour de gyres.
Cette nouvelle régionalisation, comparée aux régionalisations existantes et à la distribution de certaines espèces planctoniques, apporte des nouvelles informations sur les différents types d'environnements marins et leur variabilité. De plus, elle peut aider à suivre la dispersion desespèces entrant en mer Méditerranée par le canal de Suez ou à identifier les zones de dispersion de polluants. Cette méthode objective de régionalisation est complémentaire des méthodes basées sur la niche environnementale et généralisable à d’autres régions océaniques et d’autres échelles spatiales.
Cet article a été rédigé par Léo Berline, Anna-Maria Rammou, Andrea Doglioli, Anne Molcard et Anne Petrenko.
Publication scientifique : Berline L., Rammou A. M., Doglioli A., Molcard A., Petrenko A., 2014 A connectivity-based eco-regionalization method of the Mediterranean Sea, Plos One doi:10.1371/journal.pone.0111978
Ce travail a été réalisé dans le cadre du programme européen Coconet (Towards COast to Coast NETworks of marine protected areas).
Source de l'article Futura Sciences
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