XXe anniversaire du Processus de Barcelone


C’est en 1995 que la première Conférence euro-méditerranéenne des Affaires étrangères a lancé, à Barcelone, un vaste programme de coopération entre l’UE et douze pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée. 

Résultat de recherche d'images pour "XXe anniversaire du Processus de Barcelone"Il s’agit du Processus d’Association euro-méditerranéenne ou Partenariat euro-méditerranéen, aussi connu sous le nom de Processus de Barcelone. Au fil des ans, le partenariat a vu s’élargir le nombre de ses pays membres et a évolué vers l’actuelle Union pour la Méditerranée. 

Cela dit, vingt ans après sa naissance, on constate que son objectif principal (créer un espace de paix et de stabilité, de progrès économique partagé et de dialogue entre les peuples) ne s’est pas accompli. En quoi consistait-il et pourquoi n’a-t-il pas donné les résultats espérés ? 

Un immense projet de transformation et de modernisation

En signant la Déclaration de Barcelone le 28 novembre 1995, les 15 pays membres de l’UE et les 12 pays partenaires méditerranéens se dotaient d’un nouveau « cadre pour gérer leurs relations bilatérales et régionales [...]. Une alliance innovatrice fondée sur des valeurs communes et des principes de coparticipation, de dialogue et de coopération dans l’objectif de créer une région méditerranéenne de paix, de sécurité et de prospérité partagée » (Service d’Action extérieure de l’UE). Telle était la politique de coopération que l’UE adressait aux pays de la Méditerranée du Sud, ceci parallèlement à la politique promue pour rapprocher l’UE des pays de l’Est et du Centre de l’Europe. 

Cette alliance euro-méditerranéenne était structurée autour de trois volets principaux : dialogue politique et sécurité, partenariat économique et financier et partenariat social, culturel et humain. Elle fonctionnait à travers des conférences ministérielles sectorielles tenues périodiquement (indépendamment des conférences tenues par les ministres des Affaires étrangères) qui exerçaient la fonction de secrétariat du Processus.

«Il s’agissait d’un projet de transformation immense qui devait mener à la modernisation des pays partenaires méditerranéens » déclare Senén Florensa, président exécutif de l’IEMed. Entre 1995 et 2006, l’UE a destiné 16 milliards d’euros à ce projet via les programmes MEDA de coopération bilatérale et régionale destinés à promouvoir tant des projets de nature socio-économique (modernisation de l’industrie, promotion du secteur privé, réforme du secteur sanitaire, fonds de développement...) que des réformes politiques et de bonne gouvernance.

Or, il s’avère que les pays partenaires méditerranéens n’ont pas tous fait preuve du même intérêt à cet égard et qu’ils n’ont pas tous saisi de la même manière les opportunités offertes par le nouveau cadre de coopération. Parmi les mieux disposés, citons la Tunisie et le Maroc, qui ont été les premiers à ratifier un Accord d’Association (1997 et 2000 respectivement). Par contre, des pays comme la Libye ou la Syrie ne l’ont jamais fait et certains autres ont bien peu progressé, tels l’Algérie ou, dans une moindre mesure, l’Égypte.

Évolution ultérieure

À partir de l’adoption de la Politique européenne de voisinage, en 2004, les intérêts et les besoins de chaque pays, différents selon leurs relations avec l’UE, ont conduit, en partie, au renforcement de la coopération bilatérale (plans d’action) entre les pays partenaires méditerranéens et l’UE. Depuis lors, le Processus de Barcelone a perduré en tant que forum multilatéral de dialogue et de coopération entre l’UE et ses partenaires méditerranéens. Les fonds de coopération sont maintenant canalisés à travers l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP) destiné tant aux voisins de l’Europe de l’Est qu’à ceux du Sud de la Méditerranée. L’enveloppe financière totale pour l’ensemble des deux régions est de 11 milliards d’euros pour la période 2007-2013. 

C’est en 2005 qu’a eu lieu à Barcelone le Sommet euro-méditerranéen des chefs d’État et de Gouvernement, le seul en son genre tenu jusqu’à ce jour. Un plan de travail (2005-2010) y a été adopté ainsi qu’un code euro-méditerranéen de lutte contre le terrorisme. Les chefs de gouvernement de certains pays comme l’Égypte, Israël, la Jordanie et la Syrie y ont brillé par leur absence. 

En 2008, sous l’impulsion de la présidence française de l’UE, le Processus de Barcelone a pris le nom d’Union pour la Méditerranée (UpM) et s’est institutionnalisé avec la création d’un Secrétariat permanent dont le siège s’est finalement installé à Barcelone à partir de 2010. Ce réaménagement a instauré la coprésidence Nord-Sud de l’UpM (actuellement assumée par le Service d’Action extérieure de l’UE et la Jordanie) et a orienté l’UpM vers le lancement de grands projets structurants au niveau régional et sous-régional dans l’espace euro-méditerranéen. 

Les fonds destinés à la coopération avec les pays voisins de l’UE (Europe de l’Est et Sud de la Méditerranée) s’élèvent à 15 milliards d’euros pour la période 2014-2020.

Le 18 novembre 2015, suite à la révision de la Politique européenne de voisinage, la Commission européenne a présenté les principales lignes d'action de sa politique extérieure vers l’Est et vers la région méditerranéenne.

Pourquoi les objectifs n’ont-ils pas été atteints

Le scénario de paix et d’entente envisagé par la Déclaration de Barcelone de 1995 pour la Méditerranée n’a jamais vu le jour. Il était impossible pour la feuille de route conçue dans la capitale catalane de prévoir l’effet déstabilisateur qu’allaient avoir des évènements comme : l’irruption d’Al Qaeda sur la scène internationale le onze septembre 2001 ou, plus tard, l’invasion de l’Afghanistan ou celle de l’Iraq ; ou encore l’immobilisme politique et l’inexistence de réformes ou d’amélioration de la gouvernance pour beaucoup des pays partenaires méditerranéens ; ou la non-création de la zone de libre-échange en Méditerranée prévue pour 2010 ; ou, finalement, le manque d’intégration régionale sud-sud, l’instabilité causée par le printemps arabe à partir de 2011, la défaillance de deux États comme la Syrie ou la Libye, les crises migratoires et leur lot de réfugiés, ou l’apparition d’État islamique et de son terrorisme ravageant des pays comme la Syrie et l’Iraq et ayant déjà démontré qu’il est en mesure d’attenter contre l’Europe. 

« En définitive, face au panorama actuel, le modèle de démocratie libérale que l’UE tentait d’exporter et la méthodologie utilisée (dialogues de haut niveau et coopération pour avancer vers une meilleure gouvernance) se sont avérés totalement inefficaces. » C’est ce que croit Marc Pierini, ancien diplomate de l’UE (1976-2012) et coordinateur européen des travaux en faveur de la première Conférence Euromed de 1995. M. Pierini affirme que « l’UE doit faire face, une fois pour toutes, aux nouvelles réalités de la région tout en continuant à promouvoir ses valeurs, mais dans une juste mesure et avec réalisme ».

Que faire dorénavant

À la dernière conférence d’EuroMeSCo, le principal réseau de think tanks et d’instituts de recherche sur la politique et la sécurité en Méditerranée (dont l’IEMed assure la coordination), il a été signalé que le contexte régional dans lequel s’inscrit la coopération a considérablement changé. Et ceci pour deux raisons : l’instabilité connue au Sud et à l’Est de la Méditerranée, mais aussi l’affaiblissement du rôle de l’UE en tant qu’acteur régional suite à un certain repli sur soi et aux divisions existant entre les États depuis la crise économique de 2008. Les débats tenus par les experts (une centaine) présents à la conférence ont mis en relief le fait que l’Europe devrait s’impliquer davantage dans la résolution des conflits (Syrie et Libye), assurer une coordination plus performante des projets destinés à la région et continuer à construire, avec ses voisins, des relations basées sur les valeurs qu’ils partagent.

Il paraît évident que l’ampleur des défis à relever et que la complexité des nouveaux scénarios méditerranéens rendent nécessaires l’utilisation d’instruments nouveaux et plus performants. Pour les définir, l’Europe a lancé, au cours de 2015, un vaste processus de révision de sa politique étrangère, dont les premières conclusions ont été présentées à Bruxelles le 18 novembre dernier.

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Source de l'article IEMed

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